Qui d’autre ? La Néerlandaise Lorena Wiebes, incontestable meilleure sprinteuse du monde, s’est imposée ce samedi 22 mars à San Remo, pour la première édition au féminin depuis vingt ans de la classique cycliste italienne. Maillot de championne d’Europe sur le dos, la coureuse de la SDWorx décroche son premier Monument avec cette 98e victoire en carrière, quelques jours après avoir fêté son 26e anniversaire. Elle a devancé au sprint sa compatriote et vénérable aînée (bientôt 38 ans) Marianne Vos (Visma - Lease a bike) et la jeune Suissesse Noemi Rüegg (EF Education Oatly).
Si Wiebes a fait honneur à son statut d’épouvantail sur une course traditionnellement favorable aux engagés les plus rapides, son finish de tueuse n’est pas la seule clé de son succès. Elle peut tirer un énorme coup de casquette à sa coéquipière Lotte Kopecky, qui a réussi à la ramener, au prix d’une poursuite monstrueuse, sur Elisa Longo Borghini (UAE Team ADQ). L’expérimentée Italienne s’était fait la malle au pied du Poggio, à deux kilomètres de la ligne d’arrivée, et l’on a cru jusqu’au bout qu’elle allait refaire l’une des flibusteries les plus fameuses de ces dernières années sur la côte ligure : celle de Vincenzo Nibali, parti en solitaire pour déjouer les sprinteurs sur la Via Roma en 2018. Las. Kopecky est allée cueillir l’Italienne à 250 mètres de la ligne, offrant sur un plateau l’emballage final à Lorena Wiebes, à jamais la première à décrocher les lauriers d’une course renaissante. Et sans doute pas pour la dernière fois.
Un trio pour la gagne chez les hommes
Du côté des hommes, la Primavera a tenu ses promesses d’une des courses à la meilleure dramaturgie. Non contente d’offrir un décor dantesque, une route coincée entre l’azur de la mer et l’âpreté de la roche, elle offre la possibilité d’une histoire toujours réécrite. Cela faisait des années que l’ultime difficulté du parcours, le fameux Poggio, n’avait pas été abordée par un groupe de moins d’une trentaine de coureurs. Voilà qu’ils ne furent que trois, après que Tadej Pogacar (UAE Emirates XRG) a tiré d’un grand coup la nappe sur la table dressée, faisant tout exploser dans la Cipressa, à 25 bornes du terme. Dans sa roue, seuls le spécialiste des classiques Mathieu van der Poel (Alpecin-Deceuninck) et le chouchou des tifosi Filippo Ganna (Ineos Grenadiers) ont réussi à suivre, le Français Romain Grégoire (Groupama FDJ) étant contraint de lâcher après avoir un temps accroché la remorque.
Le trio prit rapidement une minute sur le reste d’un peloton sacrément amaigri au milieu des pins parasols, filant vers le Poggio comme on va vers son destin. Dans cette dernière montée, rebelote : Tadej Pogacar appuya sur le détonateur dès le pied, décrochant immédiatement Ganna, le plus lourd des trois. Mais malgré des relances après chaque virage en épingle ou presque, le champion du monde en titre ne parvint pas à se défaire de Van der Poel, grimaçant mais plus que jamais sparadrap. La descente ne permit pas non plus de départager le Slovène et le Néerlandais. Qui virent revenir, peu avant la flamme rouge, l’opiniâtreté faite homme : Filippo Ganna. Les voilà à trois au moment de lancer le sprint sur la Via Roma et, à ce jeu, Mathieu Van der Poel a prouvé, une fois de plus, qu’il est le plus fort. Il suffisait de tenir jusque-là pour s’offrir le deuxième Milan San Remo de sa carrière, son septième Monument. Comme un certain Pogacar, sur la troisième marche du podium ce jour.