Le Tour de France s’élance dans moins de trois semaines, et le coureur français le plus adulé de sa génération, sympathie parfois incomprise de lui-même, sera au départ à Bilbao. Thibaut Pinot, 33 ans, au crépuscule d’une carrière cycliste qu’il souhaite arrêter en fin de saison, fait bien partie de la sélection de la Groupama-FDJ. Un communiqué de l’équipe publié ce mardi 13 juin a mis fin à ce suspens, ce que le principal concerné réclamait à l’arrivée d’un Giro, en mai, qu’il a terminé en cinquième position, muni d’une vigueur nouvelle, comme délesté d’un poids.
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Ces dernières années, Pinot roulait avec son air de peine et ses jambes de souffrance. La faute, avant tout, à une mauvaise blessure au dos provoquée par une chute dès la première étape du Tour de France 2020, dans les hauteurs de Nice, pour laquelle il en veut aux organisateurs, responsables de ne pas avoir arrêté la course quand une pluie cinglante et glaciale s’est abattue. A l’époque, Pinot a combattu la douleur, supplice de trois semaines pour rallier le contre-la-montre final et ses terres. La Planche-des-Belles-Filles, tout près de Melisey, son village d’enfance, où il possède une ferme, entouré de ses proches. «Thibaut était devant moi, je le suivais en voiture, racontait à Libé son frère et entraîneur à la Groupama-FDJ, Julien Pinot, au moment de l’annonce de l’arrêt de la carrière de Thibaut en janvier. Il y avait des fumigènes, c’était fou. Avec le recul, finir ce Tour de France avec sa blessure au dos était une grosse connerie. Derrière, il a mis un an et demi à s’en remettre. Mais le Tour s’achevait en passant dans Mélisey. Ce moment nous suivra toute notre vie. Thibaut a toujours donné plus que ce que son corps ne le pouvait.»
«On s’autorisera aussi à être offensif»
Alors dès le Pays basque, Pinot portera forcément son regard vers le 22 juillet et cette étape entre Belfort et Le Markstein (Vosges), qui partira à quelques kilomètres de Melisey, comme un point final à une histoire avec le Tour de France qui raconte tout à la fois le tourment et l’allégresse. Les étincelles en 2012 (il remporte le maillot blanc de meilleur jeune), la désillusion en 2013, le fait d’avoir été vainqueur de trois étapes dont deux fois au sommet de cols de légende (l’Alpe d’Huez en 2015 et le Tourmalet en 2019), lui qui, en 2019, a failli être l’élu, le premier Français vainqueur depuis 1985 et Bernard Hinault, un espoir entretenu jusqu’à deux jours de l’arrivée, déchiré en même temps que sa cuisse gauche.
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Pour ce dernier Tour, comme le précédent, le Franc-Comtois aura pour rôle de seconder en montagne son leader, David Gaudu, très en difficulté sur le dernier Dauphiné. Victime de cette stratégie orientée vers le classement général, Arnaud Démare n’a pas été sélectionné, victime de son statut de sprinteur et peut-être de ses rapports très frais avec Gaudu, mis au jour il y a quelques mois par ce dernier dans un déballage sur la plateforme Twitch. Pour Pinot, le directeur sportif de la formation, Marc Madiot, ouvre néanmoins une brèche, quelque chose de l’ordre de l’espoir : «On s’autorisera aussi à être offensif avec Thibaut Pinot, Valentin Madouas ou encore Stefan Küng.» Le Franc-Comtois ne sera pas qu’un domestique, et c’est bien sûr attendu. Le frisson de la course n’a jamais claqué sa porte au nez de Pinot.