A un kilomètre du sommet du Grand Colombier, le claquement des sauterelles. Le chiendent soulevé par le vent. Des pelouses sèches parsemées de fleurs rouge sombre, des nigritelles noires. Michal Kwiatkowski, le Polonais des Ineos-Grenadiers, seul en tête, prend une dernière inspiration dans cette portion aplatie, après 16 kilomètres fracassants. Dans les esses, à flanc de roches ou dans une forêt de frênes à la fois dense et lumineuse. Le peloton a subi les pentes granuleuses et rudes du sommet jurassien, et de son arrivée à 1 495 mètres d’altitude.
A 950 mètres, Edgar et Kevin, arrivés à 22 heures jeudi, par le chemin de crête depuis le col de la Biche. Leur «collègue» a la tête dans les chaussettes, fracassé par une insolation. Les deux garçons, pas cocardiers, font remarquer que c’est jour de fête européenne. Les deux ont vu, entendu ou parlé avec des Belges, Espagnols, Danois, Allemands, Norvégiens, Luxembourgeois, Portugais, Suisses, Tchèques.
A 900 mètres, il y a Adèle. La peau plissée par l’âge, la fin de soixantaine. Une adoratrice de «Poupou», Raymond Poulidor, l’homme qui a uni la France entière dans les années 60 et 70. Adèle est seule. Transportée ici seulement par sa passion. Elle a la voix d’une duchesse mais aime l’ambiance très alpe-d’huezienne