Ce soir, Neness n’est pas bavard. La tension lui a bouché la gorge. Neness est un gaillard, épaisse carrure, grosses boucles d’oreilles en or. Il serre un directeur sportif dans les bras, éclate en sanglots. «Putain !» Neness est le masseur «attitré» du jeune Français Kévin Vauquelin. Le soir, il le passe à confession. Lui fait évacuer la course. Le tempère. Neness dit que le statut de leader qu’endosse le coureur d’Arkéa-B & B Hotels pèse une enclume. Qu’il doit emporter tout le monde dans son sillage. L’homme essuie ses yeux. Regard dans le vague. En face, une statue, celle du républicain Giuseppe Garibaldi sur son destrier. Kévin Vauquelin vient de remporter la deuxième étape du Tour de France 2024, la première sur la Grande Boucle pour son équipe bretonne.
Un Français, vêtu d’un maillot rouge, entrant dans Bologne la rouge, bastion de la gauche italienne : on ne pouvait s’empêcher d’y voir un signe d’espoir pour le Nouveau Front populaire. Quand tout semble perdu, comme samedi pour le gamin de 23 ans, qui avait lâché dans la chaleur de la Toscane plus de vingt-neuf minutes et toute ambition au classement général, les lendemains peuvent sourire.
Icône miraculeuse
Dès le début de l’étape, le Normand qui vit à Nice s’échappe avec une dizaine de camarades à travers l’Emilie-Romagne. C’est une terre aux couleurs spéciales. Les frondaisons sont épaisses. La glèbe est roussie. L’horizon est toujours crénelé de cimes. Le Tour allait dimanche d’un saint à un autre. Au départ,