«Le Parc des Princes, c’est fini pour nous.» Le comité exécutif de l’UEFA, qui se tenait ce jeudi 8 février à Paris, aura ainsi permis au président du Paris-SG Nasser al-Khelaïfi d’envoyer une petite bombe… ainsi que la pièce maîtresse d’un jeu de dupes qui court depuis des mois. La direction parisienne avait pourtant acté une communication mezzo voce sur le sujet ces derniers jours. Il faut ainsi entendre une réaction épidermique du dirigeant parisien, qui prend sa source plus tôt dans la journée.
Le matin, le Conseil de Paris fermait en effet officiellement la porte à une vente du Parc des Princes, considéré dans Ouest France en début de semaine par la maire socialiste de la capitale, Anne Hidalgo, «comme un patrimoine des Parisiennes et des Parisiens» : rideau. Ancienne, la volonté du Paris-SG d’acheter le Parc répond à une logique à laquelle tous les plus grands clubs européens ont été soumis : la maîtrise de l’outil de travail et des recettes «jours de match», le fait d’être propriétaire permettant de faire des aménagements et de gonfler, à Paris comme partout, le chiffre d’affaires des «hospitalités», ces loges VIP vendues à prix d’or (on parle d’un million d’euros à l’année dans le cas du Parc) aux sponsors. Le veto de la mairie a donc déclenché la réaction d’Al-Khelaïfi. Mais pas seulement. Dans l’après-midi, nombre de médias ou d’influenceurs proches du club se sont ainsi vu soumettre des éléments de langage.
La mairie de Paris pas monolithique
Exemples, en vrac : «Ce n’est pas nous qui choisissons de partir, mais la mairie ne nous laisse pas le choix», «Le président [al-Khelaïfi] construit pour les cent prochaines années et non pas à l’échelle d’un mandat municipal de six ans», «Nous activons nos projets de déménagement et toutes nos équipes sont mobilisées dans ce sens.» Ou encore «le président estime que le club a perdu huit ans mais si la mairie avait dit il y a huit ans que le stade n’était pas à vendre, nous aurions déjà déménagé, sauf qu’ils ont passé ces années à faire miroiter une vente avant de s’y refuser, gaspillant le temps du club.»
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Le tout dernier argument s’entend en partie. Car la mairie de Paris n’est pas d’un bloc sur le dossier de la vente du parc : si Anne Hidalgo s’y refuse, la mairie de Paris a bien sifflé le chaud et le froid sur cette question pendant plusieurs années, les atermoiements évoqués par le club étant donc bien réels. Une autre partie de l’exécutif parisien n’exclut par ailleurs pas des options qu’elle estime très favorables au PSG, comme un bail emphytéotique de 99 ans avec des clauses avantageuses. La sortie pour le moins décalée de l’adjoint à la mairie de Paris, David Belliard, début janvier, expliquant qu’il s’opposerait «à toute vente du Parc des Princes au Qatar ou à d’autres intérêts privés» avait aussi fait hurler – au sens propre, selon des témoins – Al-Khelaïfi, évoquant dans la foulée une manière de racisme.
Partie de poker
Le refus d’Hidalgo pose aussi la question des élections municipales de 2026, l’édile n’ayant pas encore fait savoir si elle comptait se représenter. Dit autrement : en cas d’alternance politique (de gauche comme de droite), le jeu peut s’ouvrir. Et relancer une possible vente du Parc des Princes, ce qui peut pousser le club à entretenir de temps à autre une manière de pression médiatique.
De son côté, la mairie brandit le montant, qualifié par elle de «ridicule», proposé en avril par le club pour racheter le parc : 38 millions d’euros là où le foncier compte parmi le plus cher de France, là où le stade Vélodrome de Marseille a été valorisé à quelque 550 millions d’euros voilà trois ans. Le bail actuel du Parc court jusqu’en 2043, le Paris-SG étant tenu d’y faire jouer son équipe : on a du mal à imaginer que le club y expédie ses équipes féminines (puisque le fait que ce soit une équipe masculine et féminine n’est pas précisé dans le bail) pour «tenir» le contrat tout en expédiant les hommes ailleurs.
Autant dire que la partie de poker va bon train. Et elle n’est pas près de s’arrêter. Il faut en effet cinq à six ans pour construire un stade susceptible d’accueillir un club du standing du Paris-SG, le double en comptant les inévitables recours des riverains ou associations de défense de l’environnement : la communication du club sur le fait de convoquer dans l’après-midi de jeudi les responsables des «projets de déménagement» peut ainsi faire sourire.
Options fantaisistes
Et puis partir pour où ? Evoqués ces derniers jours, les sites yvelinois de Montigny-le-Bretonneux ou Poissy (où le député et ancien maire, Karl Olive, se verrait bien accueillir le PSG dans sa circonscription) sont trop loin de la capitale, «et peu en prise avec une réalité qui voit ceux qui peuplent les loges débarquer en avion privé au Bourget, dîner avec vue sur la tour Eiffel et signer le contrat qui les a amenés là sur un coin de table alors que Kylian Mbappé et consorts exercent leur art en contrebas», s’amuse un très proche du club. Les deux hippodromes, Auteuil et Saint-Cloud, paraissent des options plus crédibles.
Mais il ne s’agit pas précisément de sites en friche, et ils appartiennent à France Galop. Les options Charléty (où évolue le Paris FC) ou Jean-Bouin (à côté du parc, où jouent les rugbymen du Stade Français), probablement diffusées en sous-main par le club, apparaissent quant à elles bien fantaisistes : il faudrait raser l’existant et toucher aux logements sociaux alentours. Sans compter que ces deux sites appartiennent, comme le Parc des Princes, à la mairie de Paris.