On a bien cru que Neymar les tirerait de là : un début de l’action (un une-deux), un milieu d’action (second une-deux) et l’illustre assurait aussi la fin, résistant à la charge du défenseur Borna Sosa pour effacer le portier adverse d’une feinte et marquer dans le but vide. La Seleçao galérait depuis près de deux heures, subissant le joug d’une supériorité technique et collective croate tout en douceur puisque Luka Modric & co étaient inoffensifs tout à la fois (0 tir cadré durant le temps réglementaire). Elle ne savait plus trop quoi faire et comment le faire, ses deux ailiers – Raphinha et Vinícius Júnior – avaient été rappelés sur le banc sans faire bouger le rapport de force d’un centimètre. Enfin, par la grâce de son talent, la superstar parisienne faisait enfin sauter le verrou. 1-0 à la 105e : 15 minutes à tenir.
Il en restait trois quand Mislav Orsic a pris le boulevard extérieur côté gauche, son centre en retrait a trouvé Bruno Petkovic, les Croates sont revenus à hauteur (1-1) et la suite n’a pas fait un pli : posément, les vieux fusils croates sont allés à la séance de tirs au but comme au ball-trap. Le gardien du Dinamo Zagreb, Dominik Livakovic, a arrêté la première frappe de Rodrygo avant de pousser Marquinhos à mettre la dernière sur le poteau et les vice-champions du monde ont poussé la sélection brésilienne (1-1, 4-2 aux tirs au but) dehors. Au train.
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Dès les quarts de finale comme en 2006 (France), 2010 (Pays-Bas) et 2018 (Belgique), Neymar et les siens n’ayant passé ce cap-là en 2014 à domicile que pour ramasser une soupe historique (1-7) contre la Mannschaft allemande. Les chiffres diront la sévérité du verdict : 12 tirs cadrés en deux heures pour la Seleçao contre un seul, au fond donc, pour leurs tombeurs. Le match a raconté tout autre chose. La Vatreni croate a fait le match qu’elle voulait, tout en contrôle du tempo pour le faire baisser jusqu’au point mort, coupant donc les courses et la supériorité athlétique supposée (les joueurs croates n’aiment pas courir, ça les fatigue) des Auriverde, endormant tant et plus une partie qui a très vite senti le traquenard.
Au-delà, le Brésil n’a pas fait grand-chose depuis un mois. Sortis de l’opération porte ouverte généreusement offerte par les Coréens en 8e de finale lundi, les hommes entraînés par Tite n’auront jamais inscrit que quatre buts en quatre matchs, une statistique misérable au regard du talent qui cohabite dans ce vestiaire. Des tribunes, on a le plus souvent eu le sentiment d’une équipe obsédée par l’aspect défensif, capable de tenir la distance sans se désunir si les choses mettaient du temps à se décanter mais qui se lance, du coup, dans des parties de «je te tiens, tu me tiens, par la barbichette» pas vraiment raccord avec le standing supposé d’un quintuple champion du monde. Il est vrai que le marketing d’une équipe joyeuse et créative, portée par un Neymar éblouissant depuis le début de saison, était suffisamment fort pour tromper le regard énamouré d’un grand public qui veut y croire à chaque fois. Il n’avait aucune chance de leurrer les vice-champions du monde croates.