«J’ai le cœur vert» : des centaines de Stéphanois habillés aux couleurs de l’ASSE se sont rassemblés ce samedi 29 mars dans le centre de Saint-Etienne en soutien à deux groupes de supporteurs ultras du club de football menacés de dissolution par le ministère de l’Intérieur, en amont du match face au PSG dans la soirée.
«On va se battre jusqu’au bout pour sauver nos associations et indiquer au ministère qu’il fait fausse route», a martelé à la presse avant le départ du cortège Tom Dufieu, porte-parole des Green Angels, en qualifiant l’hypothèse d’une dissolution d’«ineptie». «Etre ultra, c’est donner 100 % de son temps et de son énergie à son club, c’est le contraire de chercher la violence et se servir du foot pour ça», a ajouté Corentin Cartal pour les Magic Fans.
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— AS Saint-Étienne (@ASSEofficiel) March 29, 2025
Alors que l’ASSE doit recevoir le Paris Saint Germain en match de L1 samedi soir, les deux groupes d’ultras ont appelé les Stéphanois à marcher jusqu’au stade Geoffroy-Guichard, l’emblématique «chaudron», et des milliers de personnes sont attendues, selon la préfecture.
Celle-ci a renforcé les dispositifs de sécurité pour encadrer la manifestation et le match, prévu à guichets fermés bien que les supporters parisiens soient interdits de déplacement. Des renforts en matériels (canons à eau, drones) et en unités de forces mobiles ont été mobilisés. Dans leur appel à manifester, les organisateurs ont souhaité une ambiance «familiale et festive» et demandé de ne pas apporter d’engins explosifs, ni de drapeaux de partis ou syndicats.
Reportage
Le ministère de l’Intérieur, qui souhaite endiguer la violence dans le foot, examine la situation de plusieurs clubs de supporteurs, dont celle des Magic Fans et des Green Angels, fondés en 1991 et 1992 et qui gèrent plus de 15 000 membres des kops sud et nord.
Leurs représentants, ainsi que la direction de l’ASSE, sont convoqués mardi devant la Commission nationale consultative de prévention des violences lors des manifestations sportives, qui rendra ensuite un avis consultatif.
«Bien qu’ils soient imparfaits, on l’admet, nos groupes sont structurés», a soutenu Tom Duffieu, des Green Angels, devant la presse. «Ca fait 33 ans qu’on est des interlocuteurs sérieux de l’ASSE, des pouvoirs publics». Quand «certains de nos membres commettent des délits, ils l’assument devant les tribunaux et en interne, on a des procédures qui permettent de jouer notre rôle de régulateur», a-t-il poursuivi.
Une mesure «disproportionnée et inefficace»
Même si aucune décision n’est prise, la menace de dissolution des Magic Fans et Green Angels a suscité une large désapprobation dans une ville viscéralement attachée à son club de foot, bien qu’il ne soit plus à son niveau des glorieuses années 1960 et 1970.
Le président de l’ASSE Ivan Gazidis, qui devait rejoindre le cortège dans l’après-midi, s’oppose ainsi «fermement» à une mesure jugée «disproportionnée et inefficace pour lutter contre la violence et les discriminations dans les stades».
Les deux clubs, principaux animateurs des tribunes populaires avec leurs chants, drapeaux et tifos, ont aussi reçu l’appui des dix parlementaires de la Loire, toutes étiquettes confondues, du maire ex-LR de Saint-Etienne Gaël Perdriau, et même du député LR de la Haute-Loire Laurent Wauquiez, en concurrence avec le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau pour la présidence de leur parti.
Tribune
Dans un communiqué publié ce samedi en fin d’après-midi, que Libération a pu consulter, la place Beauvau a justifié sa demande de dissolution des groupes par la «véritable explosion de la violence à l’occasion des rencontres de football professionnel». Depuis «le début de la saison 2024/2025», ce sont «64 rencontres qui ont été émaillées d’incidents graves», ayant donné lieu à «627 interpellations […], en hausse de 41 % par rapport à la saison dernière, où il y en avait eu au total 718».
Les deux groupes de supporters stéphanois, ainsi que celui de la «Legion X» pour le Paris FC, sont «responsables des incidents les plus violents», a estimé le ministère de l’Intérieur, ajoutant que «d’autres procédures sont en cours d’instruction concernant d’autres clubs en France».
L’institution dirigée par Bruno Retailleau souligne aussi que le déploiement accru de forces de l’ordre pour sécuriser les rencontres de foot, qui «se fait nécessairement au détriment d’autres missions plus prioritaires, telles que la lutte contre la criminalité organisée ou contre la délinquance». Le communiqué du ministère conclut que «les interdictions de stade et les dissolutions n’auront plus de raison d’être dès lors que l’ordre public est respecté et la violence aura disparu».