Une avancée historique après des années de négociations. La fédération américaine de football (USSF) annonce ce mercredi avoir conclu un accord «historique» avec les associations de joueurs et joueuses de ses sélections, qui formalise des rémunérations égales entre l’équipe féminine et l’équipe masculine.
«Les deux conventions collectives, qui courront jusqu’en 2028, permettent d’atteindre des salaires égaux à travers des termes économiques identiques», détaille la fédération dans un communiqué, quelques mois après l’annonce d’un premier accord préliminaire avec un groupe de joueuses. «Ces conditions économiques comprennent une compensation identique pour toutes les compétitions, y compris la Coupe du monde, et l’introduction du même mécanisme de partage des revenus commerciaux pour les deux équipes. Grâce à ces accords, les joueurs de l’équipe nationale américaine resteront parmi les mieux payés au monde», précise le communiqué.
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L’annonce intervient quelques mois après celle d’un premier accord préliminaire de la fédération avec un groupe de joueuses, dont la star Megan Rapinoe, qui avait entamé des poursuites contre l’instance en 2019. La fédération (U.S. Soccer) s’était alors déjà engagée à payer l’équipe nationale féminine au même niveau que l’équipe masculine.
La convention collective désormais ratifiée, l’accord doit désormais être approuvé par un tribunal pour mettre fin aux poursuites.
Partage des gains en Coupe du monde
Le plus gros point d’achoppement était la question des revenus perçus lors des participations aux Coupes du monde. Jusqu’ici, la fédération américaine de foot octroyait ses primes en fonction des versements de la Fifa, qui les calculent elle-même en fonction de la progression d’une équipe dans le tournoi. Là où l’équipe féminine règne presque sans partage sur la scène internationale (quatre titres en Coupe du monde, et autant de médailles d’or aux Jeux olympiques), les différences de gains perceptibles dans la grille de la Fifa font qu’elles ont touché beaucoup moins que leurs homologues masculins.
Exemple : la prime de plus de 32 millions d’euros octroyée aux footballeurs français lors de leur succès planétaire en 2018, alors que seulement 3,4 millions d’euros ont été versés aux Américaines lors de leur titre mondial de 2019. Pire, en 2014, les joueurs américains – éliminés en huitièmes de finale – avaient reçu 4,5 millions d’euros alors que leurs homologues féminines n’avaient perçu que 1,45 million pour avoir remporté leur compétition.
Sur ce point, les syndicats ont donc convenu de partager les versements de la Fifa dès le Mondial 2022 au Qatar, ainsi que ceux générés pour la Coupe du monde féminine 2023. Idem pour les prochaines éditions 2026 et 2027. Chaque joueur et joueuse recevra ainsi des primes en fonction de son apparition sur le terrain. Une première mondiale.
«Tous assis à la même table»
La question de ces primes a constitué un volet important du procès intenté par l’équipe féminine américaine en 2019, et notamment porté par Megan Rapinoe, accusant la fédération de «refuser obstinément» de payer ses joueuses et ses joueurs de manière équitable.
Pour l’ancienne internationale Cindy Parlow Cone, reconvertie présidente de la fédération américaine de foot en 2020, tout s’est accéléré lorsque les différents groupes se sont enfin réunis autour d’une même table. «Il y a eu des moments où j’ai pensé que tout allait s’effondrer. Auparavant, essayer de négocier une convention collective avec les femmes, puis faire demi-tour et négocier les conditions de la convention collective avec les hommes et vice versa, était vraiment difficile. Je pense que le véritable tournant a été lorsque nous nous sommes finalement retrouvés tous dans la même pièce, assis à la même table, travaillant ensemble et collaborant pour atteindre cet objectif. Je pense que c’est là que le tournant s’est vraiment produit.»
Les termes de ces conventions collectives introduisent également – et pour la première fois – un mécanisme de partage des revenus commerciaux (diffuseurs, partenaires et sponsors), avec des bonus pour les rencontres à guichets fermés. Pour les tournois de moindre envergure, notamment ceux organisés par la fédération américaine, joueurs et joueuses percevront également des primes de match identiques. Pour les amicaux, les footballeuses et footballeurs toucheront des primes d’apparition et des bonus de performance dont la somme variera en fonction du résultat du match et du rang de l’adversaire.
«Juste valeur»
«Je ressens beaucoup de fierté pour les filles qui vont voir tout cela prendre forme et se voir reconnue à leur juste valeur plutôt que de devoir se battre pour cela. Mon père m’a toujours dit qu’on n’était pas censé être récompensé pour quelque chose que l’on est censé faire. Payer les hommes et les femmes équitablement est ce que l’on est censé faire, s’enthousiasme l’attaquante américaine Margaret Purce auprès du New York Times. Donc je ne suis pas en train de donner des bons points, mais je suis reconnaissante pour cet accomplissement et pour toutes les personnes qui se sont réunies pour le faire.»
Désormais, Walker Zimmerman, défenseur du Nashville SC et membre du conseil de direction de l’association des joueurs de l’équipe nationale (USNSTPA), espère que l’accord «éveillera les autres au besoin de ce type de changement, et inspirera la Fifa et d’autres à travers le monde pour se diriger dans cette direction. […] Ils disaient que l’égalité salariale entre les hommes et les femmes n’était pas possible, mais cela ne nous a pas empêchés d’avancer et d’y parvenir».
Mise à jour : à 16 h 44 avec davantage de contexte sur cet accord et la situation internationale.