«Dans vingt ans, quand je vais arrêter ma carrière, je pourrai dire que j’ai battu le Real à la maison.» Le gardien de Lille, Lucas Chevalier, pouvait bien sourire mercredi soir sur le gazon de Pierre-Mauroy. Ses partenaires ont réussi l’exploit de battre le Real Madrid, invaincu lors de ses 36 précédents matches, qui plus est dans sa compétition fétiche, qu’il a remportée à quinze reprises. Chevalier, la mine toujours réjouie : «Ce n’est pas un braquage, ce soir. Tout le monde a été énorme. Je pense que c’est peut-être la plus belle victoire de l’histoire du club. Tout le monde doit mesurer la chance de ce qu’il vit.»
A Villeneuve-d’Ascq, les quinze trophées de la plus prestigieuse compétition européenne entre clubs, dont celui de la saison dernière, qui garnissent l’immense palmarès du Real, n’ont en effet pas pesé si lourd face au Losc, concentré de bout en bout pour écrire l’une des plus grandes lignes de son histoire. Ni Vinicius, ou Jude Bellingham, pour ne citer qu’eux, ne sont parvenus à inverser le résultat d’un match qui s’est décidé juste avant la mi-temps, avec un pénalty de Jonathan David (45e+ 3). L’entrée en jeu à la 58e minute de Kylian Mbappé non plus. Remis à toute vitesse d’une gêne à la cuisse gauche afin de fouler une pelouse française avec le maillot de la Maison blanche pour la première fois depuis son départ du PSG, le capitaine de l’équipe de France a été conspué par une grande partie du public lillois.
Au coup d’envoi, Carlo Ancelotti lui avait préféré Endrick, devenu, à 18 ans et 73 jours, le plus jeune joueur à porter le maillot madrilène dans cette compétition selon le statisticien Opta. Mais même coach Ancelotti, l’un des plus grands maîtres stratèges du football mondial, paraissait à court de solutions. Il n’échappera pas aux critiques sur l’embouteillage de stars offensives incapables de combiner correctement à l’avant.
Le plan de «Pep» Genesio
En face, Bruno Genesio a réussi son pari en titularisant cinq défenseurs de métier pour une composition en apparence prudente, en réalité audacieuse. Les Lillois se sont déplacés en équipe, formant un bloc globalement compact pour réduire les espaces. Outre le plan, certains joueurs ont haussé leur niveau à la hauteur de l’événement, comme le défenseur central Alexsandro, l’ailier Edon Zhegrova, le capitaine Benjamin André. Dans l’entrejeu, le jeune Ayyoub Bouaddi a fêté ses 17 ans par une performance pleine de maturité, malgré quelques scories.
Décryptage
Le club nordiste a construit sa victoire en fin de première période, quand il a obtenu un pénalty grâce à une main d’Eduardo Camavinga dans la foulée d’un coup franc de Zhegrova. Le buteur Jonathan David l’a transformé avec sang-froid et précision pour mettre ses partenaires sur le chemin d’un grand moment.
La perspective de voir le club merengue renverser le match, comme il l’a tant fait ses dernières années à mesure qu’il écrivait l’histoire du football européen, a pris de l’ampleur en seconde période. Mais Lucas Chevalier était là pour rassurer tout le Nord : après un miracle de Tiago Santos, qui a sauvé un ballon sur sa ligne (86e), le gardien a effectué plusieurs grands arrêts (87e, 90e) jusqu’à la délivrance. Après s’être perdu à Lisbonne face au Sporting (2-0) lors de la première journée, le Losc s’est lancé sur la scène européenne. Avec la manière, au terme d’une soirée mémorable.