Un géant au tapis, un titan en demie. Dès le tirage au sort des quarts de finale de la Ligue des champions, il était écrit qu’un des deux grands favoris, le tenant du titre, Manchester City, ou le club le plus titré, le Real Madrid, échouerait dès la mi-avril, à une échéance indigne de son rang. Malheur au vaincu. Restait à savoir lequel et de quelle manière il aurait été précipité de l’Olympe. Après un premier acte homérique en Espagne (3-3), les deux équipes ont livré une nouvelle partie indécise et de haut niveau, quoique plus pauvre en feux d’artifice, ce mercredi 17 avril, sur la pelouse de Manchester. Et c’est le Real qui s’en est sorti, après deux heures de défense acharnée.
Très vite, on a vu qu’on avait affaire à des gens sérieux : des passes propres, des défenses bien en place. Le Real a pourtant pris les commandes du match dès la 12e minute, sur un ballon venu du ciel pour trouver Jude Bellingham derrière les lignes adverses. Dans la relative désorganisation qui a suivi, trois passes ont suffi : Valverde, Vinicius et Rodrygo à la réception d’un centre tendu, pour aligner en deux temps Ederson. 0-1 pour les Merengue, le match était lancé.
Manchester City appliqua alors les préceptes bien connus de son entraîneur Pep Guardiola : conservation de balle, petites passes dans les 25 mètres adverses, des joueurs qui se trouvent là où on ne pensait pas que ce fût possible. Mais malgré plusieurs alertes sérieuses (une tête sur la barre d’Haaland à la 18e, une sacoche de De Bruyne repoussée à la 26e), le Real tenait bon, grâce aux retours de l’expérimenté Kroos, l’abnégation de Rüdiger et les parades de son portier ukrainien Lounine.
L’entrée percutante de Doku
La deuxième mi-temps débuta sur les mêmes bases, City poussant le curseur un peu plus loin encore en matière de pression. L’étreinte des Sky Blues asphyxia le Real par longues séquences, repoussant les Madrilènes si près de leur but qu’on crut même qu’ils allaient eux-mêmes y porter le ballon. C’est ce qui faillit arriver à la 51e minute, après une mésentente entre Nacho et Lounine sur une balle en retrait, obligeant le défenseur madrilène à s’arracher pour éviter un but contre son camp. Toujours pas.
Le Real reculait, reculait, mais ne rompait pas. City semblait à court de solutions. Et puis Guardiola a sorti Grealish pour Doku et le ciel mancunien s’est soudain éclairci. Chaque prise de balle du tranchant ailier belge amenait un danger nouveau. Jusqu’à ce que, quelques minutes après son entrée en jeu, l’ancien Rennais ne déborde une nouvelle fois pour adresser un centre tendu dans les six mètres madrilènes. Rüdiger repousse comme il peut dans les pieds de De Bruyne, qui ne se prive pas de crucifier Lounine (75e). On a entendu un grand «ouf» monter des travées de l’Etihad Stadium pour saluer l’égalisation.
Rüdiger buteur décisif
De Bruyne aura derrière deux occasions d’enfoncer le clou : une merveille de frappe enroulée qui est venue lécher la transversale (78e) et une frappe aux onze mètres qui passe juste au-dessus (82e) après un centre en retrait de… Doku, devenu l’arme privilégiée de City. Mais malgré les vagues bleues, les deux formations ne parvenaient toujours pas à se départager à l’issue du temps réglementaire. La domination de City se poursuivait en prolongation, mais le Real parvenait enfin à grappiller quelques miettes. Un contre de Vinicius, avalé par Walker (100e), un premier corner du match obtenu à la 106e minute quand City avait eu le temps d’en enquiller seize. A la suite de ce coup de pied de coin, Rüdiger, dans une improbable position d’avant-centre, manquait le hold-up.
A défaut, il continuait, à l’instar de l’intégralité de ses collègues, de proposer une défense compacte, organisée et finalement intraitable à City. De quoi conduire la soirée jusqu’aux tirs au but, ultime procédé pour enfin séparer chimiquement deux formations si homogènes. De cette épreuve, ce sont les Madrilènes qui s’en sont sortis, malgré un premier raté de Modric. Mais Silva et Kovacic ont buté sur un grand Lounine. Et, comme un symbole, c’est Rüdiger qui inscrit le tir vainqueur. Le Real retrouvera le Bayern Munich en demi-finale, qui a disposé d’Arsenal sur sa pelouse de l’Allianz Arena sur la plus petite des marques.