On a tous un peu halluciné en écoutant la sortie de Noël Le Graët, le patron du foot français, déjà dans la tourmente à l’automne après des accusations de comportements «inappropriés» voire de harcèlement, selon plusieurs médias. Mais ce dernier n’imaginait sans doute pas la déferlante qui en découlerait, jusqu’à des interventions publiques de Kylian Mbappé et de la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra.
Au lendemain de la prolongation du contrat de Didier Deschamps à la tête de l’équipe de France, le président de la Fédération française de football (FFF) a été interviewé dimanche soir sur la radio RMC pour savoir si Zidane, outsider pour reprendre les commandes des Bleus, l’avait appelé ces derniers jours. Et manifestement, Le Graët avait du mal à digérer son déjeuner dominical : «Zinédine Zidane, je ne l’aurais même pas pris au téléphone. Pour lui dire quoi ? “Bonjour monsieur, ne vous inquiétez pas, cherchez un autre club, je viens de me mettre d’accord avec Didier” ?».
💥 Noël Le Graët se lâche sur Zidane dans Bartoli Time sur RMC : "Zidane au Brésil ? J'en ai rien à secouer. Il fait ce qu'il veut, ça ne me regarde pas. Je ne l'ai jamais rencontré. On n'a jamais envisagé de se séparer de Didier." pic.twitter.com/odyOBSQpHF
— RMC Sport (@RMCsport) January 8, 2023
Puis Noël Le Graët est venu sur les rumeurs faisant état de l’intérêt de l’ex-numéro 10 des Bleus pour la sélection du Brésil : «Cela m’étonnerait qu’il parte là-bas, a affirmé le patron de la FFF. Il fait ce qu’il veut, cela ne me regarde pas. Je ne l’ai jamais rencontré et on n’a jamais envisagé de se séparer de Didier Deschamps. J’en ai rien à secouer, il peut aller où il veut, dans un club, il en aurait autant qu’il veut en Europe, un grand club. Une sélection, j’y crois à peine en ce qui me concerne.»
«Un président ne devrait pas dire ça»
Si la version 2023 de Le Graët dément celle de 2021, qui déclarait alors : «Si Didier [Deschamps] s’arrêtait, la première personne que je verrai [à la tête des Bleus], c’est Zidane», cette sortie a surtout suscité une avalanche de réponses courroucées pour non-respect à la légende du foot français.
«Zidane c’est la France, on ne manque pas de respect à la légende comme ça…», a cinglé Kylian Mbappé moins de deux heures plus tard sur Twitter. Le message de la star du PSG et des Bleus a été vu plus de 40 millions de fois ce lundi matin. Les critiques se sont abattues de la part d’anciens joueurs de foot tels que Franck Ribéry et Djibril Cissé, mais aussi du basketteur bleu Evan Fournier en passant par des députés. Amélie Oudéa-Castéra, ministre de tutelle de la FFF, a elle aussi tiré à boulets rouges contre Le Graët, déplorant des «déclarations à nouveau hors sol avec en prime cette fois un manque de respect honteux, qui nous heurte tous, à une légende du foot et du sport : un “président” de la première fédération sportive de France ne devrait pas dire ça. Des excuses pour ce mot de trop sur Zinédine Zidane s’il vous plaît.»
Ce lundi, la polémique a continué d’enfler. Dans la matinée, le Real Madrid a été jusqu’à publier un communiqué officiel sur son site, dans lequel le club «regrette les déclarations malheureuses du président de la Fédération française de football, Nöel Le Graët, à propos de Zinedine Zidane, l’une des plus grandes légendes du sport mondial». Pour le club madrilène, «ces propos témoignent d’un manque de respect envers l’une des figures les plus admirées des fans de football du monde entier et notre club s’attend à une rectification immédiate» et rappellent à leurs yeux ceux tenus «à propos de [leur] capitaine, Karim Benzema». Dans son interview, Le Graët a en effet dit «regretter» l’absence de Benzema au Mondial avant d’ajouter que «Giroud n’aurait peut-être pas joué et on n’aurait peut-être pas marqué autant de buts».
Après la déferlante, le patron de la FFF a fini par reconnaître «des propos maladroits qui ont créé un malentendu» ce lundi en milieu de matinée. «Je tiens à présenter mes excuses pour ces propos qui ne reflètent absolument pas ma pensée, ni ma considération pour le joueur qu’il était et l’entraîneur qu’il est devenu», affirme Noël Le Graët dans une déclaration à l’AFP. Il dit aussi tenir «à présenter [ses] excuses» personnelles à Zinédine Zidane.
Samedi, le contrat de Didier Deschamps au poste de sélectionneur de l’équipe de France avait été prolongé jusqu’en 2026 et le Mondial organisé aux Etats-Unis, au Canada et au Mexique, bouchant l’horizon immédiat de Zidane en bleu. Dans son interview polémique de dimanche soir, Noël Le Graët a aussi parlé de sa propre succession : «Avec Didier Deschamps, on a regardé quelques noms possibles pour me succéder. Mais sa motivation est intacte.» Avant d’ajouter : «Il y aura une élection pour le prochain président de la FFF, ce n’est pas une désignation. Mais on peut aider quelqu’un. Je regarderai de près. Je serai là jusqu’à la fin de l’Euro [2024], après on verra bien.» Des propos qui ont là aussi fait réagir. Comme si les destins de Deschamps et de Le Graët étaient liés, et incompatibles avec celui de Zidane.
Mise à jour : à 10 h 40 avec les excuses de Noël Le Graët et le communiqué du Real Madrid.