Personnage tourmenté qui fut poursuivi toute sa vie par la dépression, Jerry West est mort ce mercredi 12 juin, à l’âge de 86 ans. Il était l’«incarnation de l’excellence du basket», ont affirmé les Clippers – seconde équipe de Los Angeles – où il opérait depuis 2017 comme consultant, sans dévoiler les causes de son décès. Mais c’est bien avec leurs rivaux des Lakers, son équipe de cœur, que l’homme a marqué la NBA par son talent de scoreur, au point de servir de modèle au logo officiel de la ligue de basket nord-américaine depuis 1969.
Jerry West, the personification of basketball excellence and a friend to all who knew him, passed away peacefully this morning at the age of 86. His wife, Karen, was by his side. pic.twitter.com/iMwOXmCT2B
— LA Clippers (@LAClippers) June 12, 2024
Meurtri par une enfance difficile, Jerry West le fut aussi par une incroyable série de sept échecs en finale de NBA. Le titre suprême finalement décroché avec son club de toujours, les Lakers, deux ans avant la fin de sa carrière (1960-1974), n’a jamais réellement compensé les frustrations du passé : «Il y a un gouffre dans mon cœur qui ne pourra jamais être comblé», disait ce redoutable shooteur, dont l’un des rares moments de pur bonheur fut la médaille d’or olympique gagnée à Rome en 1960.
Jerry West est né à Cabin Creek, un village de Virginie Occidentale, dans une famille de six enfants où il était battu par son père. En 1951, à l’âge de 13 ans, il fut traumatisé par la mort de son frère aîné lors de la Guerre de Corée. Il se réfugia dans la solitude, le mutisme et… le basket, chaque jour pendant des heures.
Joueur malheureux, «general manager» à succès
Recruté en 1960 par les Lakers, qui venaient de déménager de Minneapolis à Los Angeles, il forma un duo flamboyant avec un autre grand joueur, Elgin Baylor. Mais à six reprises, ses espoirs se fracassèrent sur l’invincible équipe des Boston Celtics de Bill Russell. Jusqu’à la fin de sa vie, il détesta se rendre dans la métropole du Massachusetts.
Son prestige personnel ne cessa de monter, mais ne s’est que tardivement concrétisé par un succès collectif. En 1969, il fut le seul joueur de l’histoire à être élu meilleures joueurs des finales NBA malgré la défaite, grâce notamment à ses 42 points lors de l’ultime rencontre. «C’était affreux, je voulais vraiment arrêter le basket, c’était trop douloureux», admit-il plus tard.
Après les Celtics, ce furent les New York Knicks qui devinrent ses grands rivaux lors de trois finales en quatre ans au début des années 1970. À la deuxième, West souleva enfin le trophée tant convoité, mais cette joie «n’effaça jamais la douleur de certaines défaites». L’année suivante, il perdait une huitième finale, contre les Knicks.
This is the photo of Jerry West that inspired the NBA logo pic.twitter.com/tjiK90RNSy
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De taille moyenne pour son sport (1,91 m), celui qui alternait entre les postes d’arrière et meneur avait le don de marquer dans les moments les plus tendus. Quatorze fois sélectionné au All Star Game, le match amical réunissant les meilleurs joueurs de la ligue, il était aussi un excellent défenseur. Il termina sa carrière à plus de 27 points de moyenne par match, à une époque où le tir à trois points n’existait pas.
Après sa retraite de joueur en 1974, il entraîna les Lakers de 1976 à 1979 puis en devint manager général à partir de 1982 pendant deux décennies qui correspondirent à l’époque dorée de la franchise (8 titres entre 1980 et 2002) – avec entre autres l’immense Magic Johnson. Il orchestra également les recrutements fructueux de Kobe Bryant puis de Shaquille O’Neal. Il avait ensuite rejoint en 2011 le conseil d’administration des Warriors de Golden State, avec qui il a gagné deux titres NBA, puis les Clippers en 2017.
En 2011, marié et père de cinq enfants, il présenta une image très sombre de lui-même dans une autobiographie intitulée «My charmed, tormented life (Ma vie bienheureuse et tourmentée)», où il se décrivait comme une «personne distante, insondable et imprévisible» que ses «démons intérieurs» avaient toujours empêchée d’apprécier ses réussites.