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Esprit olympique

Rejugé pour dopage, le nageur chinois Sun Yang est bel et bien privé des JO de Tokyo

Jeux Olympiques de Tokyo 2021dossier
Suspendu huit ans pour dopage, rejugé en mai dernier à la faveur d’un énième rebondissement, le nageur chinois triple champion olympique a vu sa suspension réduite à quatre ans et trois mois par le Tribunal arbitral du sport mardi. Il manquera bien les Jeux olympiques de Tokyo.
Sun Yang lors d'une compétition internationale de natation, le 26 juillet 2019 à Gwangju, en Corée du Sud. (MANAN VATSYAYANA/AFP)
publié le 25 mai 2021 à 22h04
(mis à jour le 23 juin 2021 à 9h54)

Sun Yang n’ira donc pas à Tokyo. La star des bassins chinois et mondiaux, adulé dans son pays, ne pourra pas prétendre à nouveaux aux podiums olympiques. Mardi, il a été suspendu quatre ans et trois mois (contre huit ans initialement) par le Tribunal arbitral du sport (TAS) pour avoir détruit à coups de marteau une fiole de son sang lors d’un contrôle antidopage inopiné. Entamée le 28 février 2020, cette suspension s’achèvera donc en juin 2024, soit avant l’ouverture des Jeux de Paris. Sun Yang aura alors 32 ans.

Improbable encore l’année dernière, la question de sa présence au Japon se posait de nouveau à moins de deux mois de l’événement : le triple champion olympique (sur 400 m et 1 500 m en 2012, sur 200 m en 2016) disposait d’une ultime chance de justifier son geste, lors d’un contrôle antidopage inopiné à son domicile en septembre 2018. En février 2020, le Tribunal arbitral du sport (TAS) n’avait pourtant pas été convaincu par la défense du nageur, qui attestait que les contrôleurs n’avaient pas produit «les documents prouvant leur identité», et lui avait infligé huit ans de suspension pour ce geste. Soit la peine maximale, actant par conséquent la fin d’une carrière aussi tumultueuse dans les bassins qu’en dehors.

Mais à la stupéfaction générale, le tribunal fédéral suisse a annulé cette décision en décembre, sanctionnant la «partialité» du président du panel d’arbitres et ancien chef de la diplomatie italienne, Franco Frattini. Dénonçant la cruauté infligée à des animaux en Chine, alors que l’affaire Sun Yang était en cours d’instruction, le magistrat s’était en effet livré à une série de tweets «extrêmement violents» et racistes, avait révélé le tribunal.

Onze titres mondiaux

Le nageur aux onze titres mondiaux, 29 ans, jouait ses qualifs au tribunal, devant la juridiction sportive suprême basée à Lausanne, pour une audience en visioconférence et fermée aux médias fin mai. A la clé, un fort enjeu : la Fédération chinoise de natation avait précisé que les athlètes titrés lors des Mondiaux 2019 de Gwangju (Corée du Sud) seraient «qualifiés d’office» pour les Jeux de Tokyo (23 juillet-8 août).

Sun Yang, qui a remporté là-bas deux couronnes mondiales en 200 m et 400 m nage libre, répondait parfaitement à ces critères. Le natif de Hangzhou avait à l’époque pu participer aux Mondiaux coréens malgré son contrôle de 2018 après que la Fédération internationale de natation (Fina) l’avait blanchi sur un vice de forme. L’Agence mondiale antidopage avait interjeté appel devant le TAS – ce dernier désavouant par la suite la Fina dans sa décision de 2020 – mais le délai de la procédure autorisait le nageur à s’aligner.

Plusieurs adversaires avaient alors manifesté leur mécontentement face à sa présence dans les bassins. «Je ne veux pas voir ce gars concourir aux Mondiaux ou aux Jeux olympiques contre mes partenaires qui travaillent très dur pour être là», avait ainsi lancé sur Twitter le Britannique Adam Peaty, champion olympique du 100 m brasse. Médaillés à ses côtés, respectivement sur 400 m et 200 m, l’Australien Mack Horton avait refusé de monter sur le podium, tandis que le Britannique Duncan Scott refusait de lui serrer la main.

«Sun Yang, il pisse violet»

La défiance ouverte des autres stars du bassin olympique envers le nageur chinois n’est pas nouvelle. En 2014 et dans le plus grand secret, Sun Yang avait été suspendu trois mois pour un contrôle positif à un stimulant (trimétazidine), une sanction rendue publique bien après qu’elle a été purgée. Lors des Jeux de Rio 2016, le recordman du monde du 1 500 m nage libre avait déjà dû affronter l’hostilité de ses rivaux qui couvait depuis longtemps, avant d’éclater pendant la compétition brésilienne. Mack Horton – déjà – l’avait d’abord qualifié de «dopé», avant de lui ravir l’or sur le 400 m nage libre.

D’ordinaire inébranlable, le nageur chinois avait fondu en larmes, avant de riposter en gagnant le 200 m. «Sun Yang, il pisse violet», avait dans l’intervalle assené le dossiste français Camille Lacourt, «dégoûté de voir des gens qui ont triché sur les podiums».