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Suite et fin

Championnats d’Europe d’athlétisme à Rome : le jour le plus décathlon pour Kevin Mayer et Makenson Gletty

Missions accomplies pour les deux athlètes français : Kevin Mayer repart avec les minimas olympiques, Makenson Gletty s’empare de la médaille de bronze pour son premier décathlon en grand championnat.
Kevin Mayer est venu mardi à Rome a bout de son premier décathlon depuis 2022. (Jean-Marie Hervio/KMSP. AFP)
par Caroline Vigent, Envoyée spéciale à Rome
publié le 11 juin 2024 à 22h52

Comme s’il ne s’était pas suffisamment fait remarquer lors de la première journée du décathlon des championnats d’Europe d’athlétisme ! Après s’être révélé lundi aux yeux des téléspectateurs français en dynamitant trois de ses records personnels (au 100m, à la longueur et au 400m) et en terminant la journée à la troisième place du classement provisoire, le très réservé – mais non moins déchaîné sur le stade – Makenson Gletty, 25 ans, a également eu droit mardi 11 juin à l’ovation du stadio olimpico de Rome. Resté cloué dans les starting-blocks faute d’avoir entendu les ordres du starter lors de sa série du 110m haies, l’athlète originaire de Haïti a obtenu le droit de recourir, se retrouvant seul dans la ligne droite, face à ses 10 haies et la ligne d’arrivée, tandis que les autres décathloniens avaient déjà rejoint le concours de disque. Au bout, un nouveau record perso de 13″88 lui offrait à retardement la première place provisoire du décathlon. Qu’il allait lui falloir défendre pendant quatre épreuves encore.

Grosse frousse avant décollage

A commencer par le disque où, de son côté, Kevin Mayer poursuivait son bonhomme de chemin vers la qualification olympique après des haies tout à fait acceptables. L’air, toujours, d’un «Kevin banal», comme il le disait lundi soir, juste venu chez les Romains pour «faire le taf», décrocher les minimas (8460 points), tout en s’économisant pour les JO : «Je n’ai qu’une envie, c’est d’exploser la piste. Alors, toutes les cinq secondes je me répète que je suis là pour les minimas, que le titre de champion d’Europe, ce n’est pas l’objectif cette année. Il faut que j’arrive à me calmer. Je suis quelqu’un qui s’excite énormément pendant un championnat, mais là le but sera de me freiner, parce que je suis capable de faire un seul décathlon à 200 % dans l’année, pas deux.» Il explosait quand même un peu l’aire de lancer du disque, avec 48m53, quand Gletty se contentait d’un jet à 43m54 qui le faisait glisser à la deuxième place du général derrière le Norvégien Sander Skotheim.

Puis est arrivé le concours de perche. Et là, podium et minimas, Makenson Gletty comme Kevin Mayer ont failli tout perdre dans les bourrasques romaines. Lançant raisonnablement son concours à 4m60, Gletty franchissait cette barre à son troisième essai (au décathlon, les athlètes qui échouent trois fois à leur première barre font zéro point, synonyme de relégation dans les tréfonds du classement général). Lançant son concours à une barre moins raisonnable de 5 mètres, Mayer passait lui aussi seulement au troisième essai. Une grosse frousse avant le décollage : tous deux s’envolaient ensuite, mais Gletty moins haut (4m90) que Mayer, qui arrêtait son concours après un succès à 5m30, sans chercher à faire mieux pour remonter des places au général : il restait bien sagement cinquième, Gletty s’accrochait à sa deuxième place. Sander Skotheim, lui, se foirait, l’Estonien Johannes Erm prenait les commandes.

Embardée finale

En début de soirée, l’histoire s’est répétée au javelot, le Kevin de moins en moins banal a brillé (69m54). Le Makenson encore juste techniquement s’est fait distancer (57m47). Et à l’heure où les gladiateurs, rincés, rentraient au vestiaire avant l’embardée finale sur 1500m, Erm était en or, Mayer en argent, Gletty en bronze. Mais tapis à quelques points des deux Français, Skotheim et Kaul, très à l’aise en demi-fond, attendaient leur heure. Il était donc clair que les Français ne resteraient pas tous les deux sur le podium, et c’est Kevin Mayer qui lâchait très vite. Toujours pour s’économiser? Même pas, il était juste vidé. Quant à Makenson Gletty, il parvenait à s’accrocher, ses rivaux pas si loin en ligne de mire, pour ne pas perdre l’avance accumulée au cours de ces deux longues journées de bataille: le bronze était à lui, les minimas olympiques et un record personnel en prime (8606 points). Une deuxième médaille en épreuves combinées pour la France, après l’argent d’Auriana Lazraq-Khlass. Et la treizième pour une équipe de France ressuscitée, avant la dernière journée de compétition, ce mercredi.