Menu
Libération
Désillusion

Football aux JO 2024 : un France-Espagne dur et d’argent

A l’issue de prolongations arrachées à des Espagnols coriaces vendredi, les Bleus de Thierry Henry sont passés à côté du titre olympique, qui leur échappe depuis quarante ans.
Maghnes Akliouche et Loïc Badé après la défaite française contre l'Espagne, le 9 août. (Isabel Infantes/REUTERS)
publié le 9 août 2024 à 21h14

Inscrivez-vous pour recevoir gratuitement notre newsletter Libélympique tous les matins pendant les Jeux.

On en concevra pour eux un respect supplémentaire. Trimballés la majeure partie du match par une équipe espagnole d’une fluidité collective à hurler, les Bleus se sont débrouillés pour ne tomber qu’en prolongations (3-5) au terme d’un match merveilleux, plus intense que tout ce que le dernier Euro organisé en Allemagne aura pu nous offrir. Même chez un spectateur neutre et ouvert, le cœur a menacé parfois de sortir de la poitrine, la puissance expressionniste et la dramaturgie secouant les présents du sol au plafond. Voilà pour le foot olympique : il est tout simplement ce que les acteurs en font.

Langage trivial

On disposait vendredi d’un solide repère d’une équipe à l’identité affirmée : la Roja espagnole. Et ses principes de jeu, digérés dès 15 ans – et à très haut niveau – par les joueurs défilant sous ce maillot-là. Deux (le milieu Alex Baena, l’attaquant Fermín López) de ceux qui ont sorti les Bleus en demi-finale de l’Euro voilà un mois étaient là mais les autres sont taillés dans le même bois, l’art du contrôle-passe et du déplacement sans ballon comme points cardinaux. Dès lors, l’objectif tricolore était net : faire rentrer les manieurs de ballon espagnols dans le duel. Les choper, en langage trivial.

A la mi-temps, les Bleus faisaient une tête épouvantable et cette finale olympique semblait partie pour un score de tennis. Après l’ouverture du score sur une double erreur espagnole (relance puis faute de main du gardien Arnau Tenas) scellée par Enzo Millot (1-0, 11e), Pau Cubarsi et consorts ont démarré le manège. Une symphonie de passes et de mouvements sans ballon, tous plus subtils les uns que les autres et conclus à deux reprises par Fermín López (18e et 25e, 1-2), puis un coup franc enroulé d’Alex Baena après que Loïc Badé a découpé un Juan Miranda trop rapide pour lui (3-1, 29e) et l’Espagne était aux manettes.

Prodige collectif

Et rien, mais alors rien ne laissait présager de ce qui allait suivre. La Roja naviguait en eaux calmes. Elle mangeait le chrono à ses heures, se montrait dangereuse quand elle le voulait. Bref : elle voguait paisiblement vers un titre olympique suave, élégant. Au fond, les tricolores auront passé la seconde période à faire la seule chose qui vaille. S’accrocher aux branches, y mettre du cœur. Un arrêt phénoménal de Tenas sur une frappe de Manu Koné (72e) a montré l’acharnement de Philippe Mateta & co, la haute conscience du match sans lendemain, de l’occasion d’une vie qui ne repassera jamais. Un coup franc dans le tas repris avec un certain bonheur par Maghnes Akliouche a remis les tricolores dans le jeu (2-3, 79e). Et, surtout, donné une prise au public du Parc des Princes, qui l’a saisie à pleines mains.

On jurerait que l’ambiance, indescriptible, fut pour quelque chose dans la consultation du VAR durant les arrêts de jeu, l’arbitre brésilien Ramon Abatti envoyant ensuite Mateta égaliser en force sur penalty (3-3, 90e + 3) sous les trombes d’eau. On ne sait pas par quel prodige collectif et mental la Roja est parvenue à remettre la main sur le match. Peut-être se sont-ils dit que c’était du foot, un match comme tous les autres, et qu’ils étaient plus forts à ce jeu-là. L’attaquant du Rayo Vallecano Sergio Camello a d’abord sanctionné un oubli de la défense tricolore (3-4, 100e) avant d’aller fermer la porte quand toute l’équipe de France était à l’abordage (3-5, 120e + 1). Les Bleus devront se contenter de l’argent et il n’est pas dans l’habitude des joueurs de foot français de s’en contenter. Ils auraient pourtant de bonnes raisons de le faire.