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Statue

Jeux paralympiques : Théo Curin, premier athlète handisport au musée Grévin

JO Paris 2024dossier
Participant aux Jeux paralympiques de Rio, investi dans la préparation de ceux de Paris, le nageur a multiplié les exploits et les apparitions médiatiques.
Création sur mesure de la statue du nageur de 23 ans Théo Curin, au Musée Grévin. (Musée Grévin)
publié le 1er mars 2024 à 16h29

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Théo Curin ne sera pas seulement l’une des quelque 250 personnalités statufiées à Grévin. Ni seulement un parmi la vingtaine de sportifs. Il restera comme le premier athlète handisport à entrer au célébrissime musée de personnages en cire installé sur les Grands Boulevards parisiens depuis 1882. Quatorze ans avant la renaissance des JO, 78 ans avant l’apparition des Jeux paralympiques, en 1960 à Rome. Autant dire que le nageur de 23 ans va investir un monument de la culture populaire française (800 000 visiteurs par an) dans lequel il «fréquentera», entre autres champions, Teddy Riner, Kylian Mbappé, Tony Parker, mais une seule championne, Clarisse Agbegnenou.

Né à Lunéville (Meurthe-et-Moselle) en avril 2000, il a été amputé des quatre membres à l’âge de 6 ans à la suite d’une méningite foudroyante. Il a raconté la suite à l’Equipe magazine en février 2022. «Après la maladie, j’ai suivi deux ans de rééducation. Comme un bébé, j’ai réappris à manger et à marcher. Chaque geste du quotidien ressemblait à un Everest. Mon premier grand défi a été d’arriver à fermer mon pantalon seul. Je ne supportais pas que mes parents le fassent. […] Durant la cicatrisation de mes extrémités, je me suis déplacé avec un fauteuil roulant. Puis, j’ai commencé à porter des prothèses. Mon corps restait douloureux. Les greffes de peau que j’avais reçues demandaient de fréquents changements de pansements. Et puis, j’étais en croissance et mes os poussaient en tirant sur ma peau. Alors, chaque année, je devais les faire diminuer. Une épreuve à chaque intervention.»

Sa rencontre, à 7 ans, avec Philippe Croizon, le très médiatique nageur également amputé des quatre membres, va pousser ce phobique de la flotte à plonger dans la piscine de Lunéville. «Rapidement, l’eau est devenue le seul élément où je pouvais me mouvoir librement. Je suis devenu addict. Je me sentais tellement bien dans les bassins que la compétition a été une évidence», poursuivait-il dans l’Equipe magazine.

122 kilomètres dans le lac Titicaca

La compétition, ce sont les championnats de France sur 50 mètres dos, le départ à Vichy en section sport-études les championnats d’Europe, du monde et les Jeux paralympiques de Rio en 2016. Sa spécialité, le 200 m nage libre : 4e aux JO et vice champion d’Europe, médailles d’argent et de bronze aux Mondiaux de 2017 et 2019 ; sans compter des multiples victoires aux championnats de France. Il s’investit parallèlement dans la commission des athlètes chargée de préparer les Jeux olympiques et paralympiques de Paris.

Bientôt les bassins sont trop petits pour lui. Il participe au half-IronMan des Sables d’Olonne (1,9 km de natation, 90 km de vélo 21,1 km de course à pied, soit un semi-marathon). Le report des Paralympiques de Tokyo et les changements de classification des handicaps – il aurait dû concourir contre des nageurs ayant leurs deux bras et estime n’avoir aucune chance – le poussent à abandonner les compétitions classiques. En 2021, il se lance alors dans un défi dingo : la traversée du lac Titicaca, entre le Pérou et la Bolivie, avec l’ex-championne de natation Malia Metella, et l’aventurier écolo Matthieu Witvoet. «Mon message, c’est qu’il peut vous arriver n’importe quoi mais que vous pouvez rebondir. Ce qui me plaît aussi, c’est de relever le défi à plusieurs. En s’associant, on peut faire des choses extraordinaires», disait-il avant cette expérience extrême : 122 km (610 fois la distance dans laquelle il excellait) dans une eau à 10 degrés, en totale autonomie, à 3 812 mètres. Pari réussi en onze jours.

En 2022, il devient le premier athlète handisport à terminer le marathon aquatique de 57 kilomètres entre Santa Fe et Cordoba (Argentine). «Mon handicap ne m’empêche rien. Avec cette confiance, je peux rêver d’aventures de survie ou jouer la comédie.» Car outre le sport, Théo Curin est acteur dans la série Vestiaires – il a aussi joué un rôle dans Plus Belle la vie –, égérie pour Biotherm ou Lacoste (qui lance une chemise à son nom), chroniqueur radio et télé, consultant pour Eurosport. Il participe à des jeux… télévisés (Fort Boyard, Pékin Express). Pour l’ensemble de son œuvre à seulement 23 ans, Théo Curin méritait bien une statue. Fût-elle de cire.