C’était une tentative de sortir de la polémique par le haut. Pour éviter tout nouveau sur les coraux dans le lagon turquoise de Teahupoo, à Tahiti, la Fédération internationale de surf a proposé e renoncer à la construction controversée d’une tour des juges et d’évaluer l’épreuve avec «des images en direct depuis la terre, l’eau et des drones». Une proposition aussitôt enterrée par le Comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo)
L’idée de juger la compétition via des images filmées «a déjà été expertisée et étudiée récemment, et n’a pas été jugée possible», a expliqué mercredi 20 décembre le président du Cojo, Tony Estanguet, notamment «pour des raisons de télédiffusion, car sur la plage on sera à 900 m de la vague». Or les arbitres, a-t-il expliqué, doivent pouvoir juger les performances de visu, et non d’après les images retransmises.
«Le projet continue, c’est le souhait des acteurs locaux réunis derrière leur président Moetai Brotherson», a ajouté l’ancien triple champion olympique de canoë. «A cinq mois des tests, à huit mois des Jeux, il faut qu’on puisse aller de l’avant», a souligné de son côté Etienne Thobois, directeur général de Paris 2024.
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Des habitants de la baie, des associations environnementales et plusieurs grands noms du surf s’opposent à la construction de cette tour des juges qui risque selon eux de dégrader des fonds marins uniques et nuire à la biodiversité du site.
Après avoir suspendu brièvement les travaux, le gouvernement polynésien a confirmé, le 10 décembre, que l’épreuve allait bien pouvoir être maintenue à Teahupoo. Moetai Brotherson avait alors présenté un calendrier de travaux qui devaient aboutir à une nouvelle tour fonctionnelle le 13 mai, dont l’ambition et la taille avaient été révisées à la baisse. L’ouvrage passait de 14 à 9 tonnes, réduisant ainsi sa surface et son poids. Brotherson s’était prévalu d’avoir obtenu le soutien «unanime de tous les maires, de la fédération de surf et même des associations, à part une, et d’un surfeur, qui pense représenter la communauté des surfeurs».
«C’est un peu tard pour se réveiller»
Ce qui visait Kelly Slater, qui a apporté son soutien aux opposants à la tour fin novembre. «Cela n’a pas de sens d’avoir besoin d’une tour aussi géante pour un événement de deux jours. Donnez de l’argent aux infrastructures locales de la ville pour les dégâts causés par le changement de la rivière qui a provoqué des inondations plus tôt cette année», réclamait la star sur Instagram.
«Il ne faut pas se réveiller au moment du buzz», a réagi le président polynésien après la proposition de la fédération de surf : «C’est un peu tard pour se réveiller». Et de poursuivre : «Il aurait fallu dès le départ qu’ils se positionnent en nous disant : ‘Nous, on estime que l’on peut juger depuis la terre’. A ce moment-là, on se serait mis en ordre de marche pour trouver des solutions techniques.»
A ses yeux, la proposition n’est pas tenable techniquement. La fédération internationale veut «utiliser malgré tout une plateforme située au niveau de la tour des juges, car depuis la terre, ce n’est pas possible de filmer […] Seulement, cette plateforme doit être à 6 m au-dessus de l’eau et il faut des hommes à bord. Cela nous ramène donc à la problématique de départ qui est celle de la sécurité».
Début décembre, lors d’essais techniques, une barge prévue pour l’installation de la tour en aluminium redimensionnée avait brisé du corail, poussant le gouvernement polynésien à mettre en pause les travaux. Le test avait été «mal préparé», avait alors fustigé la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra.
Selon Moetai Brotherson, les essais de nouvelles barges allégées ont été réalisés le 15 décembre et «se sont très bien déroulés». Construire cette tour, c’est «la seule option technique réaliste» permettant «à la fois de tenir les délais, et d’opérer avec un minimum de dégâts pour l’environnement».