Il a fait son pot de départ à Bercy mais veut encore intervenir dans le débat fiscal : pour surfer sur l’euphorie des victoires des Bleus, le ministre démissionnaire de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a souhaité ce jeudi 8 août la défiscalisation des primes JO des athlètes. Comme l’avait réclamé lundi le champion olympique de judo et ex-ministre David Douillet, puis le député LR Olivier Marleix promettant une proposition de loi. «Je proposerai qu’elles soient défiscalisées dans le prochain budget 2025», a annoncé Bruno Le Maire au Figaro dans une conception toute personnelle de la «gestion des affaires courantes» à laquelle il doit normalement s’astreindre.
Le ministre reconnaît pourtant qu’il n’aura plus voix au chapitre lors de la discussion du budget cet automne : «Ce n’est pas à moi d’en décider, je suis chargé des affaires courantes, mais je préparerai des dispositifs pour que ces primes» soient dans le prochain projet de loi de finances, a-t-il précisé. «C’est la prochaine majorité, le prochain gouvernement qui décidera, par un vote souverain […] si elles (sic) suivent la proposition que je fais. […] Lorsqu’on a des résultats aussi exceptionnels, des médailles qui sont exceptionnelles, qui sont la récompense d’années de travail, d’années d’efforts et qui sont la fierté française, il ne faut pas que ces primes soient fiscalisées», a-t-il justifié.
Une proposition de loi dans les tuyaux ?
Cette décision ne risque pas de modifier les déficits publics français : les médaillés français pour ces Jeux bénéficient de 80 000 euros pour une breloque en or, 40 000 euros pour l’argent et 20 000 euros pour le bronze. Un revenu exceptionnel soumis à l’impôt sur le revenu, mais éligible à des dispositifs d’étalement permettant d’en atténuer la portée. «Ces primes peuvent être étalées sur quatre ans, mais aussi lissées sur les deux ans en cours et les deux années précédentes», explique à Libé l’avocat spécialisé dans le sport, Jean-Jacques Bertrand. Un médaillé en or touchant 80 000 euros peut donc déclarer 20 000 par an pendant quatre ans, de quoi réduire grandement son imposition. A noter que les primes étaient moindres aux JO de Tokyo en 2021 (65 000, 25 000 et 15 000 euros).
Lundi, l’ex-ministre des Sports, David Douillet avait qualifié de «scandale» l’imposition des primes, sur RMC. «Pour certains athlètes, c’est de l’argent de poche, et pour d’autres, dans des petits sports, c’est immense. Fiscaliser ça ? Je trouve que c’est une honte», avait asséné le double médaillé d’or olympique de judo (Atlanta en 1996 et Sydney en 2000) en rappelant que ces sportifs obtenaient leur médaille au bout de dix à quinze ans d’entraînement. Dès le lendemain, le député LR Olivier Marleix avait embrayé en annonçant le dépôt à venir d’«une proposition de loi consensuelle pour débuter la législature et poursuivre dans l’hémicycle un moment d’unité nationale».
La question de l’imposition des primes a connu de nombreux allers-retours ces trente dernières années. Exonérées avant 2008, elles ne l’étaient plus en 2010, puis de nouveau entre 2016 et 2018, puis de nouveau imposées depuis. Mais contrairement à ce que lui ont reproché des internautes, David Douillet n’était pas encore ministre en décembre 2010, quand il a été décidé de les imposer de nouveau.