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JO de Paris 2024 : Djokovic-Nadal, le bourreau de la légende

JO Paris 2024dossier
En deux heures et deux sets 6-1, 6-4, le Serbe sort l’Espagnol diminué dès le deuxième tour du tournoi en simple. Dans le crépuscule de sa carrière, Nadal espère désormais briller en double auprès de son dauphin Alcaraz.
De match, il n’y a pas eu en réalité, excepté l’orgueil d’une vieille gloire ; personne ne s’était bercé d’une quelconque illusion, et c’est encore plus agréable ainsi. (Kai Pfaffenbach/REUTERS)
publié le 29 juillet 2024 à 17h41

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Rafael Nadal a peut-être concouru en simple uniquement pour cela : esquisser une dernière danse, devant ceux qui l’ont tant chéri. Quelque chose d’offert au public parisien, que laissait déjà présager le choix du CIO de lui remettre la flamme en mains, parmi les derniers relayeurs partis du Trocadéro. C’est juste qu’il faut avoir la force de l’entendre : ça s’appelle un jubilé, et nous, on n’a plus vingt ans. En soi, quatorze sacres à Roland-Garros, des dizaines de marathons remportés dans le halo du laser de la tour Eiffel, méritaient bien une dernière chorégraphie avec son exécuteur testamentaire, le Serbe Novak Djokovic.

De match, il n’y a pas eu en réalité, excepté l’orgueil d’une vieille gloire, qui a différé l’évidence à la moitié du deuxième set. Personne, d’ailleurs, ne s’était bercé d’une quelconque illusion, et c’est encore plus agréable ainsi : 6-1, 6-4 pour Djokovic, claqués en deux petites heures. Voilà les prolégomènes de leurs mémoires, qui se liront bientôt sur les canapés du monde entier.

Cheval qui boîte

L’enjeu était donc dans les clameurs appuyées, dans ces petits cris étouffés du tennis qui paraissaient soudain moins agaçants. L’indulgence arrive souvent à la même heure que les dernières fois. Il y eut tout de même des émerveillements, face à ce coup droit (de la main gauche) comme enroulé. Mais «Rafa» n’a pas tenu les échanges, et ses premières balles ont rarement excédé les 170 km/h. Comment y échapper lorsque, à 38 ans passés, on a une hanche qui grince, un adducteur qui siffle, et un pied bionique, shooté aux infiltrations depuis près de deux ans.

Nadal n’est à l’évidence plus qu’un cheval qui boîte, et son avenir olympique est désormais remis à Carlos Alcaraz, qui devra soutenir l’échafaudage de leur paire de double. Alcaraz, Espagnol comme lui, féru de terre battue comme lui, appelé à régner sur Roland-Garros pour la génération qui vient, comme lui. Il y a quelque chose de l’adoubement consenti dans ce binôme, si ce n’est de la remise de clés.

L’anecdote retiendra que des journalistes du monde entier se sont emplafonnés pour vivre ça. L’organisation ayant inexplicablement renoncé à l’idée de contingenter le nombre de médias admis, les couloirs du court Philippe-Chatrier ont eu des airs de fin de fête de foraine. Si bien qu’il a fallu tromper les vigiles, trouver une coursive menant au toit, et voisiner un faucon hostile pour profiter de cet ultime râle. Le rapace, lui, était là pour fondre sur des pigeons impolis. Nous autres, pour une quête bien précise donc, comme dans le Phédon de Platon : écouter le chant du cygne d’un esthète. Mais c’est beau aussi, les cheveux blancs.