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Il recule, Florent Manaudou. A petits pas, mais il recule. Médaillé d’or du 50 m aux Jeux de Londres 2012, à 21 ans, pour son premier plouf dans un bassin olympique. Médaillé d’argent à Rio 2016, puis encore à Tokyo en 2021. Et finalement le bronze, à la maison, pour Paris 2024. Un pas en arrière, puis un autre. Mais ce vendredi soir, le public chauffé comme un bain turc de la Défense Arena est reparti de la piscine, après la dernière course, en jurant ses grands dieux de l’avoir vu glisser sur l’eau comme s’il était équipé d’un moteur. Les plus enflammés ont même été tentés de le traiter en vainqueur.
Une illusion d’optique ? Pour ses quatrièmes Jeux olympiques, Florent Manaudou n’a pas décroché la lune. Il a laissé le trentenaire australien Cameron McEvoy et le Britannique Benjamin Proud, plus jeune d’une poignée de mois, batailler dans un bouillon d’écume pour le titre olympique, le premier distançant le second pour cinq petits centièmes (21”25 contre 21”30). Mais le Français, même resté à distance (21”56), s’est offert en une seule longueur de bassin assez de tranches d’histoire et d’actes de bravoure pour donner à sa médaille de bronze l’éclat d’une victoire.
Jamais, depuis l’entrée du 50 m dans le programme olympique, aux Jeux de Séoul en 1988, un nageur n’avait été quadruple médaillé. Jamais, non plus, un athlète de 33 ans (il est né le 12 novembre 1990) n’était monté sur le podium. Jamais, enfin, un sprinteur ayant mis ses maillots au clou pendant plus de deux ans pour tenter sa chance dans une autre discipline – le handball –, n’avait été capable de décrocher coup sur coup deux médailles olympiques. Florent Manaudou l’a fait, vendredi soir, dans une ligne d’eau extérieure, avec plus de dix mille paires d’yeux fixées sur sa seule silhouette. Très fort. Bluffant.
Au bord du précipice
La veille, une demi-finale mal embouchée l’avait conduit au bord du précipice. Huitième temps des deux courses, dernier qualifié, Florent Manaudou avait été à deux doigts, et même à un seul, de prendre la porte. Plus jeune, l’incident l’aurait secoué. Sa confiance en aurait été fissurée. Mais à son âge, il en faut plus pour l’éprouver. «Une quatrième finale olympique, je ne vais pas cracher dessus. Pour le public, ça va être super», avait-il commenté sans s’interdire de distribuer les sourires.
Sur le plot de départ, en finale, il ose un exercice rarement joué dans une piscine de compétition : un clapping. Le public lui répond dans la seconde. La finale n’a pas encore livré son verdict. Ils sont huit à accrocher leurs regards sur le mur d’en face, huit nageurs à pouvoir en faire leur allié. Mais la course appartient déjà au Français. Cameron McEvoy, le vainqueur, le reconnaîtra plus tard : il n’avait encore jamais connu pareille ambiance. «Du début à la fin, on a vécu un truc assez extraordinaire. Avec Flo qui a excité le public, je ne pense pas avoir vécu une finale qui se rapproche de ça.»
«Je suis un homme de finale»
Sa médaille en bronze, Florent Manaudou rembobine avec patience une course et une soirée dont il n’oubliera rien. «Je suis un homme de finale, dit-il. J’aime bien être prêt au bon moment. Avec ma famille dans les tribunes, je suis trop content d’avoir une médaille. Mes parents ne m’avaient jamais vu aux Jeux. Ma copine, mes amis, je leur ai fait vivre des émotions. Mais cette médaille est aussi pour mon staff. Pendant la course, je ne me suis pas affolé. Quand je touche, je regarde le plot et je vois des lumières allumées. Champion olympique, c’est incroyable, mais 2e ou 3e c’est la même chose.»
L’or en avait fait un frangin digne de son illustre sœur Laure. Une double dose d’argent l’avait invité parmi les plus grands. Avec le bronze, Florent Manaudou referme la boucle. Le voilà éternel.