On ne verra pas les athlètes russes et bélarusses voguer sur les eaux de la Seine. Pas même sous bannière neutre. Ce mardi 19 mars, le CIO a une nouvelle fois haussé le ton envers le Kremlin en annonçant que les athlètes russes et bélarusses «ne paraderont pas à la cérémonie d’ouverture» des Jeux Olympiques de Paris qui doit se tenir le 26 juillet. La question était examinée ce mardi par la commission exécutive de l’instance sportive. Avec en toile de fond l’annonce, plus tôt dans la journée, du lancement par la Russie des «Jeux de l’amitié» à Moscou et Ekaterinbourg en septembre prochain, une nouvelle compétition concurrente des JO qui prévoit aussi dans deux ans une édition hivernale à Sotchi. L’organisation basée à Lausanne a accusé le pays de Vladimir Poutine de «politiser le sport». Mise à l’écart, la Russie a jugé ce mercredi 20 mars «discriminatoires» les annonces du CIO. « Les décisions du CIO sont illégales, injustes et inacceptables. Nous sommes scandalisés par les conditions discriminatoires sans précédent imposées par le Comité international olympique aux athlètes russes », la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova lors d’un point presse.
Dans une déclaration publiée ce mardi, le CIO, qui autorise la présence d’athlètes russes aux prochains JO de Paris uniquement sous bannière neutre et à condition qu’ils n’aient pas soutenu l’invasion russe de l’Ukraine, a demandé au monde sportif et aux gouvernements invités par Moscou «de rejeter toute participation et tout soutien» à cet événement. Ces deux initiatives du Kremlin s’ajoutent aux «Jeux du futur» organisés à Kazan du 21 février au 3 mars, un évènement qui mêlait disciplines traditionnelles et e-sport. La capitale du Tatarstan doit également accueillir du 12 au 23 juin les «Jeux des BRICS» (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) qui vont rassembler des «athlètes de plus de 50 pays», selon les autorités russes.
«Afin de rendre leur motivation purement politique encore plus évidente, ces derniers contournent délibérément les organisations sportives de leurs pays cibles», souligne l’instance dans sa déclaration, qui y voit une «tentative cynique» d’exploiter les athlètes «à des fins de propagande politique», en violation de la Charte olympique. Par ailleurs, le CIO accuse Moscou «d’un manque total de respect pour les normes mondiales de lutte contre le dopage et l’intégrité des compétitions», rappelant les inquiétudes formulées par l’Agence mondiale antidopage (AMA) au sujet des Jeux de l’amitié, un événement dépourvu de programme antidopage, dont l’organisation basée à Montréal aurait pu attester le sérieux. La Russie reste au cœur de la plus grande tricherie institutionnalisée de l’histoire sportive récente, qui a culminé lors des JO-2014 de Sotchi et a valu au pays de voir son hymne et ses couleurs officielles bannis des Jeux olympiques de Tokyo en 2021 puis des Jeux d’hiver de Pékin en 2022.
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À l’occasion d’un entretien avec le journal Le Monde ce mardi, le président du CIO Thomas Bach a dénoncé «l’agressivité du gouvernement» russe qui «grandit de jour en jour, contre le CIO, contre les Jeux» et contre sa personne. «Cela va de «fasciste» à «destructeur des Jeux et du mouvement olympique». Et tout cela vient d’officiels russes. Je ne sais pas si cela vient de Vladimir Poutine lui-même, je ne regarde pas Telegram tous les jours, je ne suis pas masochiste à ce point, mais les attaques viennent de tous les niveaux…», a-t-il assuré.
«Aucun échange avec le comité olympique russe»
Depuis des années, le CIO et Moscou entretiennent des relations glaciales, s’accusant mutuellement d’instrumentaliser le sport à des fins politiques. La décision adoptée en fin d’après-midi ce mardi à Lausanne écarte la perspective de tout rapprochement à court terme. Pourtant, mercredi 13 mars, Oleg Matytsine, le ministre russe des Sports avait estimé qu’il ne fallait pas «boycotter» les Jeux de Paris cet été, préférant «préserver la possibilité de dialoguer et de participer à des compétitions».
Pas de quoi réchauffer les relations avec le CIO qui a néanmoins fait une mise au point : «Nous sommes intransigeants quand il s’agit de punir ceux qui ont violé la Charte olympique. Mais je suis tout aussi intransigeant pour protéger ceux qui n’ont pas violé la Charte. C’est un engagement en faveur des droits de l’homme et pour défendre le principe qu’il ne peut y avoir de culpabilité collective», a exprimé Thomas Bach. Il a par ailleurs ajouté que «les athlètes ne peuvent être tenus pour responsables des actes de leur gouvernement. S’ils soutiennent ces actes, ils sont sanctionnés. Mais si ce n’est pas le cas, ils doivent avoir les mêmes droits que les autres».
De son côté, le président français Emmanuel Macron a certifié dimanche 17 mars dans un entretien accordé à la chaîne ukrainienne 1+1 qu’un cessez-le-feu en Ukraine «sera demandé» à la Russie à l’occasion de la tenue des Jeux, en application de la trêve olympique adoptée fin novembre dernier par l’Assemblée générale des Nations unies après des débats houleux. A l’ONU, la représentante russe avait notamment estimé que le choix du CIO de priver les sportifs russes de leurs couleurs officielles était «une décision politisée, discriminatoire et hypocrite».
Mise à jour le mercredi 20 mars à 10 h 52 avec la réaction de la Russie.