Inscrivez-vous pour recevoir gratuitement notre newsletter Libélympique tous les matins pendant les Jeux.
Une finale perdue de peu face au numéro 1 mondial au bout de neuf minutes de baston (le vainqueur, l’ultra favori azerbaïdjanais Hidayet Heydarov le reconnaîtra d’un royal baiser sur le front), une demie où il claque le ippon le plus pur des trois premiers jours de tournoi – sode-tsuri-komi-goshi avec la veste de l’adversaire, sorti de la malle à merveilles comme à l’entraînement… Joan-Benjamin Gaba, 23 ans, outsider total, 35e au classement mondial, nobody jusqu’à son récent bronze européen, sélectionné comme «équipier» (comprendre : bouche-trou) pour l’épreuve par équipes, a réalisé une journée en apesanteur, dans ce que les initiés des tatamis considèrent comme la catégorie la plus relevée : les moins de 73 kilos, celle sur laquelle le Japonais Shohei Ono (meilleur combattant de ce millénaire et tête de pioche notoire) a régné pendant deux olympiades.
Cinq médailles en trois jours
Norman Mailer écrivait, parlant de boxe, que le champion du monde des lourds est le gros orteil de Dieu. En judo, c’est le cador des 73. Porté par le boucan métallique de l’Arena Champ-de-Mars, Gaba a côtoyé ces altitudes, épatant d’aisance et d’endurance. En zone mixte, ruisselant de sueur, il semble le dernier surpris. «Bah si on ne croit pas en soi, personne le fera à votre place», répond celui qui rappe à ses heures perdues. «Si la tête est là, le corps suit», insiste le natif des Yvelines, et le voilà qui trotte, comme si c’était une évidence, tranquille, vers le podium.
Il y a un mois presque jour pour jour, on avait écouté d’une oreille Baptiste Leroy, responsable de l’équipe masculine. Excepté les cas de Teddy Riner et Luka Mkheidze, personne ne donnait cher de la peau de ses troupes. Lui disait, et ça sonnait comme de la méthode Coué : «Il y a des mecs qui se révèlent sur un seul jour, qui font le tournoi de leur vie sur “un Jeux”.» On avait tort, Leroy raison, et ce mec-là, c’est Gaba. Cette breloque d’argent pèse une tonne et vient s’ajouter au bronze courageux arraché par Sarah-Léonie Cysique en moins de 57 kilos. Le judo français a atteint sa vitesse de croisière, cinq médailles en trois jours. En attendant l’or.