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«La natation, ce n’est pas un sport individuel. Si vous n’avez personne derrière vous, vous ne pouvez pas vous transcender», croit profondément Gilles. Lui-même maître-nageur, il pilote un groupe de huit supporteurs lozériens, baptisé «Flying Lozère», qui réunit ses enfants, amateurs de bassins, et une poignée d’amis. Que des passionnés de natation venus encourager Léon Marchand, pour la modique somme de «700 euros par personne en catégorie A». Il faut y ajouter le budget dépensé dans les accoutrements : tee-shirts, chaussures, et même caleçons de la collection olympique le Coq sportif, drapeaux, claquettes et colliers tricolores. Mais aux yeux de Gilles, rien n’était trop beau «pour vivre cet événement exceptionnel».
Gilles et les autres ont été servis : la pépite française de 22 ans a décroché son premier titre olympique sur sa distance fétiche, le 400m quatre nages, ce dimanche 28 juillet à Nanterre. Il s’est imposé avec un chrono de 4′02″95, presque six secondes devant ses poursuivants, le Japonais Tomoyuki Matsushita et l’Américain Carson Foster. Au passage, il s’est offert un record olympique, effaçant le précédent détenu par Michael Phelps (4′03″84).
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Comme les Flying Lozère, des milliers de supporteurs s’étaient déplacés «pour Léon». Drapeaux français dessinés sur les joues, polos «Colombes natation» (leur club) sur le dos, Sylvain et ses deux filles Lucie et Adeline misaient aussi sur leur voix pour porter Marchand jusqu’à la victoire. «On le suit depuis plusieurs années déjà. Donc on a réservé les billets un an à l’avance, on a cassé la tirelire. C’est un bonheur de pouvoir encourager ce prodige exceptionnel», s’émerveille Sylvain, les larmes aux yeux, tant il est fier de compter parmi les Français «un nageur de la stature de Michael Phelps» (même s’il est encore loin des 23 titres olympiques de la légende américaine).
Pain bénit
Au moment où le Toulousain expatrié aux Etats-Unis s’est engouffré dans le bassin olympique, les 16 000 spectateurs de Paris la Défense Arena n’ont plus formé qu’un bloc. Dans les tribunes, un public grimé en bleu-blanc-rouge s’est égosillé tout au long des quatre minutes de course. Parmi eux, son petit frère Oscar, qui ne se déplace jamais sans un portrait géant de son aîné. Le matin, déjà, le nageur prodige avait eu l’impression de concourir dans «un stade de foot», et confiait sa surprise d’entendre «tout le monde crier [son] nom». Mais, bien préparé à cette ambiance «de dingue», il a servi une course toute en maîtrise. Premier des séries en 4′08″30, on l’aura vu lâcher en sortant du bassin, faussement détaché de l’enjeu : «Je pense que ça va le faire [en finale], ça va être sympa.»
«Let’s play with the world», avait-il annoncé vendredi sur ses réseaux sociaux. Il se savait très attendu, et ne s’en cachait pas lors des interviews au Club France, il y a trois jours. «J’arrive en favori, parce que… parce que les Championnats du monde l’année dernière, tout simplement.» Les Mondiaux 2023 à Fukuoka, ceux qui auront vu le nageur atteindre une autre dimension. Champion du monde pour la deuxième fois en 400m quatre nages, il s’était aussi et surtout illustré en pulvérisant le record du monde sur la distance, jusque-là détenu par Michael Phelps.
Entrer en lice aux Jeux de Paris sur le 400 m quatre nages, c’était donc du pain bénit pour Marchand. Déjà, sur cette épreuve, il était parvenu à se hisser jusqu’en finale lors de la dernière olympiade à Tokyo. Il s’en souvient bien : «Je suis arrivé sixième et j’ai terminé à une seconde et demie des premiers. Donc je me suis dit que trois ans plus tard, j’allais peut-être faire partie des meilleurs.» Il en est. Le 400 m quatre nages n’est qu’une étape dans le voyage olympique de Marchand. Il doit encore disputer le 200m brasse, le 200m papillon, le 200m quatre nages, ainsi que le relais 4x100 m quatre nages. Et il a annoncé la couleur : «Je vise l’or dans toutes mes courses.»