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Sur le chemin du stade de France, en venant du tout nouveau terminus de la ligne 14, impossible de le louper. Un bâtiment immense, neuf – inauguré le 6 avril – à la gloire de l’Eglise de scientologie, à cent mètres du stade. En 2021, le projet de ce nouveau «centre de formation», baptisé le «Celebrity Center», avait déjà fait lever le sourcil à la Miviludes, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Elle y voyait «un risque […] d’opérations de tractage».
Depuis les débuts des Jeux olympiques, les dizaines de milliers de spectateurs qui défilent sur l’avenue du Président-Wilson (Saint Denis) pour observer le rugby à 7 ou l’athlétisme n’ont pas d’autre choix que de croiser ces jeunes femmes qui proposent «des jus de fruits», «de l’eau» ou «du café». Elles disent également «non à la drogue, oui à la vie», distribuant des petits livrets, titrés «La vérité sur la drogue». Ce sont ces derniers qui sont visés dans une note de la Miviludes publiée vendredi 2 août. L’organisme public affirme avoir «reçu des signalements au sujet de la distribution de tracts par l’association “Non à la drogue, oui à la vie”, avant ou pendant les JO», à «Paris, Marseille, et à Angers [lors du passage de la flamme olympique].» Dans la capitale, les tractages ont été signalés dans les IXe, XIIe, XIVe, XVIe et XVIIIe arrondissements.
La Miviludes a été destinataire de signalements relatifs à une association « Non à la drogue, Oui à la vie » qui profite des JO pour faire la promotion de l’Eglise de Scientology sous couvert de prévention.
— Miviludes (@Miviludes_Gouv) July 31, 2024
La Miviludes incite à la plus grande vigilance ! pic.twitter.com/OnUFqombF2
Sur son site internet, l’association loi 1901 «Non à la Drogue, oui à la vie» explique être «en partenariat avec la fondation américaine “Foundation for a Drug-Free World”, une association internationale d’information et de formation sur la drogue, parrainée par l’Eglise de Scientologie». Pourtant, sur les 700 000 livrets qui auraient été distribués cette semaine selon l’association, le lien avec la scientologie n’est jamais précisé.
Ces distributions de tracs contre la drogue seraient-elles en réalité une sorte de cheval de Troie pour convertir un maximum de personnes ? C’est ce que sous-entend la Miviludes, qui explique que «les représentants de la scientologie proposent notamment de convertir des personnes à l’occasion d’un test de personnalité gratuit, de la diffusion de tracts ou de brochures, de conférences “d’introduction” gratuites, de cours […] ou de toutes autres manifestations “culturelles” ou à “visée humanitaire”.» Selon le Parisien, «des camions flanqués d’écrans ont circulé dans la capitale, diffusant des spots de l’association». «Le 30 juillet, des bénévoles ont embarqué à bord d’une péniche, sur la Seine, arborant des bannières aux couleurs de l’association.»
Récit
«Déstabilisation mentale et rupture familiale»
Un matraquage qui semble avoir énervé certains internautes. Sur X, l’un d’entre eux avisait la préfecture de police de Paris et de Seine-Saint-Denis lundi 29 juillet pour leur demander si l’association et l’Eglise «ont demandé une autorisation pour tracter sa propagande dans la rue». De son côté, le vice-président du bureau européen de la scientologie Eric Roux a expliqué au Parisien que les accusations de la Miviludes constituaient un procès d’intention «particulièrement offensant», défendant que «l’Eglise parraine actuellement, avec l’aide de l’Association internationale des scientologistes, la plus grande campagne de prévention sur les dangers des drogues qui ait jamais été menée dans notre pays».
Est-ce que la #secte #scientologie et son association écran #narconon ont demandé une autorisation à la @prefpolice ou à @prefet93 pour tracter sa propagande dans la rue ?
— Vicieux \o/ 🇺🇦 (@Anonyme_Vicieux) July 29, 2024
Le public des #JO est exposé à une organisation dangereuse et condamnée.@D_Le_Vaillant @Miviludes_Gouv pic.twitter.com/Uk43yC04GV
De son côté, la Miviludes pointe que «les pratiques de la scientologie présentent des risques de déstabilisation mentale, d’exigences financières exorbitantes, et de rupture avec l’environnement d’origine, notamment familial». Avant de rappeler que la scientologie en France a été condamnée à de multiples reprises, en 1997, en 1999, et en octobre 2013. La Cour de cassation avait alors confirmé «la condamnation de deux des principales structures françaises de la scientologie pour escroquerie en bande organisée, recel aggravé, extorsion, à des amendes d’un montant cumulé de 600 000 euros».
«Tout nouveau fait de nature pénale porté à la connaissance de la Miviludes sera systématiquement transmis aux parquets à des fins de poursuites», conclut la mission interministérielle. Un avertissement qui résonne avec la possible participation à la cérémonie de clôture des Jeux de l’acteur américain Tom Cruise, régulièrement considéré comme la principale figure médiatique internationale de la scientologie.
Droit de réponse de l’Eglise de Scientology & Celebrity Centre du Grand Paris :
C‘est l’Eglise de Scientology & Celebrity Centre du Grand Paris installée à Saint Denis qui est «sur le chemin du stade de France» que votre article stigmatise très injustement. En effet, l’emplacement du «bâtiment immense, neuf - inauguré le 6 avril», lui a notamment permis d ‘apporter un soutien logistique à une association d’intérêt général afin que cette dernière sensibilise des milliers de passants aux dangers des drogues. Si c’est cela qui inquiète la Miviludes lorsqu’elle évoque un prétendu «risque de tractage», elle serait mieux avisée de se concentrer sur les véritables troubles à l’ordre public que génèrent le trafic de drogue. Vous faites état d’un internaute mécontent qui aurait interrogé la Préfecture sur l’activité de notre église «dans la rue». Pour être équitable, il faudrait aussi mentionner les milliers de personnes qui ont salué notre action à l ‘occasion des JO. Après tout, elles se sont entretenues avec des bénévoles stationnés juste devant l’entrée de notre Eglise, en leur adressant des compliments en toute connaissance de cause. Ainsi, nous présenter comme l’«invitée gênante des Jeux» est vraiment tendancieux, lorsque, en vérité, l’immense majorité des passants a soutenu notre initiative.
Droit de réponse de l’association Non à la drogue, oui à la vie :
Après que notre association se soit plainte auprès de la Miviludes des propos calomnieux figurant dans sa ‘note’, dénigrant le travail sincère, dévoué, et efficace de nos bénévoles pour informer le public sur le danger des drogues, celle-ci a supprimé le communiqué concerné de son site. En effet, l’association Non à la Drogue, Oui à la Vie a été reconnue d’intérêt général par l’administration française. Un examen très approfondi a permis de conclure à une activité à caractère social, dont l’objet est «de venir en aide à des personnes en situation de difficulté du fait de la réalisation d’un risque social» en «sensibilisant la population au risque social de l’addiction». Du reste, l’association ne diffuse pas des « tracts » mais des livrets d’information sur les drogues qui sont plébiscités pour leur simplicité et leur message préventif. Lorsque les bénévoles présentent ces livrets au grand public, ils agissent au nom d’un objectif laïc et non confessionnel. L’association ne cherche donc pas à «convertir» mais à permettre aux jeunes et moins jeunes de vivre une vie sans drogue et d’éviter le piège de ce fléau qui détruit des millions de vie chaque jour. La transparence de nos liens est pleinement assurée, entre autres, en première page de notre propre site internet, sous la rubrique QUI SOMMES NOUS ? indiquant : «parrainée par l’Eglise de Scientology et soutenue par les scientologues du monde entier».
Droits de réponse ajoutés le 29 octobre 2024.