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JO de Paris 2024 : les handballeuses tricolores échouent dans leur quête d’un deuxième or olympique

JO Paris 2024dossier
Opposées en finale à la Norvège ce samedi 10 août, les joueuses d’Olivier Krumbholz, sacrées à Tokyo, se sont logiquement inclinées (21-29), imprécises en attaque et trop friables en défense.
Orlane Kanor lors de la finale olympique contre la Norvège, ce samedi 10 août. (Aaron Favila/AP)
publié le 10 août 2024 à 16h27
(mis à jour le 10 août 2024 à 16h56)

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Elles n’ont pas pu figer la devise de la demi-centre Méline Nocandy dans les tables de la loi de leur sport : «Hors de question qu’on vienne nous battre ici.» Ce samedi 10 août, les filles du hand se sont violemment inclinées face à leurs éternelles rivales norvégiennes en finale du tournoi olympique (21-29), dans l’antre pourtant brûlant du stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq. Le mur de la réalité sera terrible pour une équipe en lévitation durant la quinzaine, et que les commentateurs annonçaient triomphante. La même Nocandy, sèche, lucide : «On n’était pas connectées, on a manqué des passes, des engagements, là où d’habitude on se trouve les yeux fermés. On l’a cherché, mais c’est comme ça.»

Comme en demi-finale face à la Suède, l’entame peut se résumer à gros traits à une joute de gardiennes. Cette fois, la Française Laura Glauser devait surenchérir aux parades d’une dame qui, l’air de rien, avance vers ses 45 ans, Katrine Lunde. La Norvégienne a pris son temps dans une carrière où elle cumulait déjà avant ce week-end dix titres internationaux. Signe de la fébrilité que Lunde installait chez les tireuses françaises, plusieurs – dont Tamara Horacek et Chloé Valentini – ont mitraillé les poteaux pour lui échapper.

Il faut dire que Lunde a aussi pu capitaliser sur un axe défensif furieusement cuirassé, dans lequel les Bleues venaient sans cesse s’enferrer. A ce compte-là, les Françaises n’étaient pas manchotes non plus, mais les Nordiques disposent d’une lumineuse arrière gauche, issue de l’équipe danoise d’Esbjerg. Chirurgicale, Henny Reistad éjectait ses tirs au ras du sol pour surprendre Glauser. A la mi-temps, elle avait déjà remisé quatre buts au coffre-fort : 15-13. Heureusement, la Norvège galvaudait ses penalties, avec deux essais bazardés sur les barres.

Oftedal en cheffe d’orchestre

La suite serait pire encore. En deuxième mi-temps, la palissade bleue s’est mise à prendre l’eau. Outre Reistad, qui continuait d’enfiler bastos et passes décisives, la source des malheurs français s’appelait Stine Bredal Oftedal. La demi-centre, fantassin en cheffe de son équipe qu’elle harangue ou houspille, c’est selon, vibrionnait à l’entrée de la zone tricolore, orchestrant les assauts norvégiens. A la 42e, à -6, le sélectionneur, Olivier Krumbholz, appelait un temps mort pour endiguer la coulée de boue.

Sauf que tout était trop difficile ce samedi 10 août pour les Françaises, comme paralysées par le momentum. Trop tendre, Pauletta Foppa, trop candide Lena Grandveau, trop maladroite, Tamara Horacek, jusqu’à la capitaine Estelle Nze Minko, aux intuitions incohérentes. Les balles perdues se multipliaient, et l’honorable assaut final, porté par l’énergie du désespoir, échouait invariablement sur Katrine Lunde, comme les vagues se cassent sur les falaises anguleuses. La gardienne norvégienne poussa l’indécence jusqu’à infliger un pastis à l’arrière droite des Bleues, Laura Flippes.

«On s’est régalé pendant toute cette compétition et c’est un peu dur aujourd’hui, tentait de se consoler Estelle Nze Minko. Globalement, les Norvégiennes ont été fortes, et nous, on a eu du mal à nous trouver les unes les autres. C’est rageant, parce qu’on a fait des meilleurs matchs dans cette compétition. Mais, je suis extrêmement fière de notre parcours, on a passé des moments incroyables entre Paris et Villeneuve-d’Ascq.»

Attaque en berne

L’histoire de cette finale manquée est aussi celle des insuffisances chroniques des Françaises au tir. Comment conquérir un titre avec 49 % de réussite devant le but, contre 69 % aux Norvégiennes. Pendant ses vingt-trois ans de règne, Krumbholz, le druide du handball féminin tricolore, s’est échiné à inculquer sa prescience défensive. Après une courte pause de trois ans, entre 2013 et 2016, il est revenu flanqué d’un adjoint chargé d’optimiser les compétences françaises devant la cage adverse : Sébastien Gardillou. Loué comme étant un maître Shifu des trajectoires, Gardillou qui pourrait hériter de l’équipe en fonction de la date de retrait de Krumbholz – avant ou après l’Euro de novembre prochain ? – sait où réside encore la marge de progression.

Deux heures avant le match, le panneau lumineux du stade Pierre-Mauroy affichait : «Femmes match or.» Trois mots aussi martiaux que la cérémonie des trois coups, tradition glissée du théâtre (ils symbolisent les acteurs, le public et l’histoire), et jouée par une célébrité avant chaque partie durant ces Jeux. Trois mots d’une soudaine cruauté. Rideau.