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JO de Paris 2024 : les personnels des aéroports rejoignent policiers, pompiers ou agents de la RATP parmi les médaillés des négos

La menace d’un mouvement social dans les aéroports parisiens à l’aube des Jeux olympiques s’est dissipée mardi 16 juillet, les syndicats levant leur préavis après avoir obtenu une prime. A l’instar de salariés d’autres secteurs, tandis que d’autres n’ont rien obtenu.
A l'aéroport d'Orly, le 19 juin. (Emmanuel Dunand/AFP)
publié le 17 juillet 2024 à 16h09

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Atterrissage social en douceur dans les aéroports de Paris à quelques jours du début des Jeux olympiques. Les trois organisations représentatives des salariés au sein du groupe ADP (CFDT, CFE-CGC et CGT) ont signé mardi 16 juillet un «accord majoritaire» avec l’entreprise, contrôlée à 50,6 % par l’Etat. Le deal prévoit selon le communiqué de la direction «le versement d’une prime uniforme» de 300 euros «pour chacun des collaborateurs d’ADP SA», distribuée «à l’ensemble des salariés au mois de septembre, sans distinction de catégorie». En outre, «des primes particulières sont prévues pour les collaborateurs volontaires à l’accueil des délégations olympiques et la gestion de leurs bagages», a rappelé ADP. Si le secrétaire général de la CGT à ADP Daniel Bertone a estimé que «le montant aurait pu être meilleur», il reconnaît que l’arrangement «répond à notre demande de prime homogène».

Une victoire syndicale donc, qui a permis de lever de justesse le préavis de grève, déposé le 8 juillet, et qui annonçait une importante journée de perturbation ce mercredi. Un soulagement pour les organisateurs des JO, à dix jours de la cérémonie d’ouverture, alors même que les aéroports de Roissy-Charles-de-Gaulle et Orly s’apprêtent à accueillir quelque 350 000 passagers par jour. L’accord intervient dans un contexte de tension sociale à ADP, quatre ans après la suppression de plusieurs centaines d’emplois au moment de la pandémie. Les syndicats avaient dénoncé dans leur préavis une «dégradation des conditions de travail» et réclamé un plan d’embauche «massif» de 1 000 postes, notamment opérationnels. Si la direction s’est engagée à «poursuivre les discussions» sur les effectifs en septembre, après les versements des primes, cette dernière question reste en suspens.

«Evitement», négociations électriques et primes olympiques

Toutefois, si le Comité d’organisation des JO (Cojo) s’évite quelques sueurs froides, les aéroports ne sont pas le secteur le plus en tension à l’approche de l’évènement. D’abord grâce au phénomène d’«évitement» de Paris qui devrait toucher l’aérien. Selon Air France notamment, les touristes, effrayés par la perspective de se retrouver pris au piège dans une capitale surchauffée par l’heure olympique, ont tendance à choisir d’autres destinations ou à décaler leur voyage. Une manière de s’épargner la surfréquentation, l’inflation des tarifs d’ébergement et les perturbations de transport attendues à l’occasion des Jeux. ADP s’attendrait ainsi à ce que ses volumes de voyageurs ne s’accroissent pas plus que ça entre le 26 juillet et le 11 août.

Ensuite, parce que d’autres secteurs clés sont toujours confrontés à un contexte social compliqué. L’approche des JO a électrisé les négociations dans certaines branches. Certains ont déjà réussi à obtenir des primes olympiques substantielles, comme les policiers et les gendarmes (jusqu’à 1 900 euros) ou les pompiers (1 600 euros voire 1 900 euros brut). Les cheminots de la SNCF (95 euros brut par jour, avec un plafond de 1 900 euros maximum) et les agents de la RATP (1 000 euros brut en moyenne) et du RER (jusqu’à 2 500 euros) ont également obtenu des bonus importants. Des secteurs absolument vitaux pour la bonne tenue des JO, qui vont être très sollicités durant l’évènement et qui se sont aussi mobilisés avec succès ces derniers mois, en dépit des appels du Cojo à la trêve sociale.

D’autres luttes ont également abouti, comme celle des salariés de la tour Eiffel, qui, au bout de leurs cinq jours de grève qui avait vidé la Dame de fer de ses touristes, ont obtenu un droit regard amélioré sur la gestion financière du monument. D’autres sont toujours en cours, comme la grève reconductible conduite depuis près de deux semaines à l’hôpital européen Georges Pompidou par une partie du personnel des urgences, qui réclame une prime de 2 000 euros par semaine pour tout le personnel mobilisé, quel que soit le statut.

«Pour éviter les grèves, il faut négocier», prévient Sophie Binet

Et d’autres secteurs, eux, n’ont rien eu. L’hôtellerie, la restauration, la sécurité privée ou encore les travailleurs sans-papiers n’ont pas obtenu d’avancées significatives, malgré des mouvements de grève. «C’est comme pendant le Covid», juge Diego Melchior, secrétaire général de la CFDT en Ile-de-France, cité par l’AFP. «Pour les premières lignes, c’est toujours très compliqué d’avoir des contreparties très intéressantes» tandis que «ceux qui sont en back-office, ou dans le tertiaire, ont réussi à négocier du télétravail, des aménagements d’horaires pour qu’ils évitent de prendre les transports en commun». Le syndicaliste déplore «un système à deux vitesses».

Pas d’apaisement général donc. La CGT maintient sa vigilance et ses préavis de grève déposés au printemps dans les trois fonctions publiques. La centrale a notamment mis en place un «numéro vert» en semaine, du 22 juillet au 9 août, pour «venir en aide aux salarié·es» et leur permettre de «signaler toutes les violations aux droits des travailleurs et de leurs représentants» pendant les Jeux. A l’annonce de l’accord à ADP, Sophie Binet a estimé sur RTL ce mercredi que «pour éviter les grèves, il faut négocier», et qu’«il faut que ça fasse tache d’huile.» Le 11 juillet, sur LCI, la même avait dit n’avoir «pas prévu de grève pendant les JO», mais mettait en garde Emmanuel Macron, lui conseillant de cesser de «jeter des bidons d’essence sur les incendies qu’il allume».

Du côté de la direction de la CFDT, la secrétaire générale Marylise Léon a assuré à l’AFP qu’«à la CFDT on n’utilise pas les JO pour obtenir des choses qu’on n’aurait pas eues par ailleurs». Chez Force ouvrière, le membre de la charte sociale aux JO Pascal Lagrue assume à l’inverse : «il n’y a pas de trêve olympique ! S’il y a des revendications qui doivent s’exprimer, elles s’exprimeront», tout en reconnaissant que «sur le plan intersyndical, il n’y a aucun appel à faire grève».