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JO de Paris 2024 : Marchand sacré en 200 m papillon, cette dernière coulée qui a tout changé

Dans une finale qui semblait déjà pliée au bénéfice du favori hongrois Kristóf Milák, le nageur tricolore a «envoyé la coulée» pour une remontada d’anthologie mercredi 31 juillet.
Léon Marchand lors de la finale du 200m papillon masculin des Jeux olympiques de Paris 2024 à La Défense Arena, le 31 juillet 2024. (Denis Allard/Libération)
publié le 1er août 2024 à 6h41

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C’est une course à inscrire dans les annales de la natation. Sur les plots, Léon Marchand s’alignait comme «outsider» dans un 200 m papillon promis au Hongrois Kristóf Milák et son brillant pedigree : premier sur les séries et les demi-finales, recordman du monde, jusque-là détenteur du record olympique. Sur le papier, un concurrent imbattable. Mais à Marchand, rien d’impossible. Le nageur tricolore a signé une phénoménale remontée, pour finalement toucher le mur en premier. Léon Marchand devance Kristóf Milák de cinq dixièmes, tout en lui subtilisant son record olympique. Et le Toulousain exilé aux Etats-Unis s’empare de sa deuxième médaille d’or des Jeux, suivie d’une troisième moins de deux heures plus tard.

Finish d’anthologie

Dans cette course folle du 200 m papillon, un geste a fait toute la différence. Sur les 150 premiers mètres, on se dit que c’est plié : Milák est devant, semble irrattrapable. Marchand nage dans son sillon. «Je sais qu’il a plus de vitesse que moi, donc je voulais rester avec lui jusqu’aux 150», débriefe le Français. Puis vient le troisième virage, les ultimes instants sous l’eau avant d’entamer la dernière ligne droite. Et là, le déclic. Il dégaine son arme fatale : «Je me dis “bon allez faut que j’envoie la coulée”. Je fais une super coulée, je mets tout sur les jambes, j’essaye d’être bien profilé dans l’eau et au final j’arrive à remonter.» Marchand sous l’eau, le temps est comme suspendu. Il ressort aux 13 mètres. Après avoir viré avec une large avance – sept dixièmes – Kristóf Milák voit surgir de l’eau, à côté de lui, le licencié des Dauphins du Toec, devenu requin à la poursuite de sa nouvelle proie. Marchand reprend ses battements de papillon, et plus rien ne l’arrête. Il gagne du terrain, mouvement après mouvement. Un finish d’anthologie.

Passions déchaînées

Autour de la piscine olympique, les cris redoublent, on se dit qu’il peut le faire. Cette remontada déchaîne les passions bien au-delà de Nanterre. Les yeux rivés sur les écrans géants du Grand Palais, le public exulte, brisant le silence qui règne habituellement lors des épreuves d’escrime. En pleine finale du sabre par équipes, qui oppose la Hongrie à la Corée du Sud, les deux combattants sont obligés de s’interrompre – les équipes finalistes iront d’ailleurs s’en plaindre à l’issue de la soirée. L’exploit de Léon Marchand s’est invité sur d’autres sites olympiques, à l’Arena Paris Sud ou sur le court Philippe-Chatrier de Roland-Garros. Pendant trente secondes, leurs téléphones branchés sur la course de Léon Marchand, les spectateurs se sont évadés d’un morose match nul de l’équipe de France de handball ou de la douloureuse élimination de la paire Rafael Nadal-Carlos Alcaraz dans le tournoi de tennis en double. On a vibré jusqu’au stade Pierre-Rajon, dans l’Isère, où se tenait un match de foot amical entre l’Olympique lyonnais et le Torino. Sur les derniers mètres, le commentaire au micro d’Eurosport s’époumone : «Accélère, accélère, ne lâche pas.» Et enfin, Léon Marchand tend les bras vers le mur. Il l’a fait. On en tremble toujours.

«Ça s’est joué à la touche, c’était vraiment une des plus belles courses que j’ai jamais faites», lâche le triple champion olympique. Qui a un message à faire passer : «Je remercie Kristóf Milák parce qu’on a vraiment réussi à se pousser et à faire un super temps à la fin.» Pas sûr que le médaillé d’argent soit du même avis. Jamais facile de digérer une deuxième place après s’être fait doubler au dernier moment, dans une finale qui vous est promise, qui ne se tient que tous les quatre ans. On ne saura jamais ce que le Hongrois en pense. Mercredi soir, Milák n’a pas répondu à la presse.