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Tractations

JO d’hiver 2030 dans les Alpes françaises : la piste d’un duo Michel Barnier-Martin Fourcade pour présider le Comité d’organisation

JO d'hiver 2030 dans les Alpes françaisesdossier
A peine recalé de sa fonction de Premier ministre, le Savoyard pourrait rebondir à la présidence du Comité d’organisation des Jeux, en duo avec le biathlète multimédaillé. Une fonction qu’il a déjà occupée lors des JO d’Albertville 1992.
Michel Barnier et Martin Fourcade. (Reuters et DPPI. AFP)
publié le 18 décembre 2024 à 17h19

C’est peu dire que la nomination pour la présidence du comité d’organisation des Jeux olympiques (Cojo) d’hiver patine. A chaque semaine ses revirements soudains, ses interminables tractations et l’impossible accord autour d’un nom. Ces derniers jours, le scénario a encore évolué mais, cette fois, un projet de gouvernance bicéphale semble se détacher : un duo avec Martin Fourcade à la tête du comité d’organisation, accompagné les premiers mois de Michel Barnier, fraîchement remercié comme Premier ministre.

Mardi 17 décembre, soit quatre jours après la passation de pouvoir avec François Bayrou à Matignon, l’ex-député Les Républicains repassait la cour du 57, rue de Varenne, cette fois pour discuter Jeux d’hiver. Autour de la table, un petit cercle de personnes très impliquées dans le dossier : Laurent Wauquiez, l’ancien président (LR) de la région Auvergne-Rhône-Alpes devenu conseiller spécial de la collectivité sur le sujet, un représentant de la Provence-Alpes-Côte d’Azur, le nouveau délégué interministériel aux JO Pierre-Antoine Molina, et les présidents des comités olympique et paralympique français : David Lappartient et Marie-Amélie Le Fur.

Preuve que le temps presse : figuraient aussi à ce rendez-vous organisé à la hâte deux représentants du CIO, Christophe Dubi, le directeur exécutif des JO auprès de l’instance, et son directeur général, Christophe De Kepper. Au cours des échanges, le nom du Savoyard de 73 ans a été évoqué pour hériter d’une «mission de préfiguration bénévole et temporaire en qualité de représentant du CIO pour accompagner la création du Cojop», glisse un proche des négociations.

Feuille de route

Durant son bail à Matignon, Michel Barnier a toujours gardé le dossier des Alpes 2030 en haut de la pile. Fin novembre, lorsque la fumée blanche pour le Cojo semblait être imminente, Barnier recevait Fourcade à l’Elysée pour échanger sur la mandature à venir, deviser sur la feuille de route des six prochaines années, et régler une épineuse question : le salaire de l’ancien biathlète, qui devrait percevoir la somme de 200 000 euros mensuels selon Ski Chrono (soit moins que les 270 000 que touchait Tony Estanguet). D’après France Info, Michel Barnier a saisi l’Inspection des finances la veille de la censure, le 4 décembre, avec l’objectif de faire chuter les coûts des JO en deçà de 2 milliards d’euros, signe s’il en est qu’il semble déjà avoir un pied dans le dossier.

L’ex-chef du gouvernement peut faire valoir sa connaissance de la région, lui dont l’itinéraire politique le vit enchaîner les fonctions de président du conseil régional de Savoie et de député savoyard. Surtout, il connaît mieux que quiconque la fonction de président du Cojo pour l’avoir lui-même occupée en duo avec Jean-Claude Killy lors des JO d’Albertville en 1992. Les derniers organisés sur la neige française.

Pour peu que le tandem se concrétise – Fourcade serait peu enjoué selon l’Equipe cela serait synonyme d’échec pour Laurent Wauquiez, lui qui défend depuis le début la candidature d’un autre biathlète, Vincent Jay, champion olympique à Vancouver en 2010. Le président des Républicains bataille comme un diable en coulisses, obstiné à bloquer la candidature du quintuple champion olympique, soutenu par Emmanuel Macron. Trop indépendant, peste Wauquiez, qui, comme le président de la région Paca, Renaud Muselier, s’inquiète en outre des risques de conflits d’intérêts qu’engendrerait la nomination de Fourcade. Le nom du Pyrénéen apparaît en effet sur a minima deux contrats de sponsoring paraphés avec plusieurs entreprises. «Les deux partenariats au long cours que je peux avoir sont avec des marques techniques qui, à mon sens, ne sont pas en contradiction avec les enjeux de partenariat du comité d’organisation, Rossignol et Odlo», s’est défendu l’intéressé dans une longue interview à l’Equipe, qui faisait office d’acte de candidature.

«Il y a une certaine urgence»

Ajouter Michel Barnier – dont le poids politique est tout autre qu’il y a quatre mois – à la boucle olympique doit avant tout permettre de rassurer le CIO. Début décembre, le président sortant de l’institution, Thomas Bach, avait dit ne pas être «inquiet». Avant d’envoyer un courrier quelques jours plus tard au gouvernement encore dirigé par Michel Barnier pour le presser d’agir. Nul doute que la censure arrivée entre-temps a échaudé l’instance basée à Lausanne, qui demande désormais du concret. «A cinq ans des Jeux, il y a une certaine urgence à ce que le Cojop soit créé et fonctionnel», s’inquiétait le 12 décembre, en conseil d’administration du CIO, David Lappartient. Les discussions s’enlisent, «notamment parce que Wauquiez s’arc-boute sur Fourcade et a tout fait pour empêcher sa désignation», assure une source proche du milieu olympique et sportif citée par l’AFP.

Le suspense devait prendre fin il y a trois semaines lors de ce qui devait être une ultime entrevue à Matignon. Finalement, aucun nom n’a pu faire consensus, et il a été notifié à la presse que les profils de trois candidats (Martin Fourcade, Vincent Jay et l’ancienne championne de ski acrobatique Marie Martinod) seront soumis à l’avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. L’épilogue ne devrait plus tarder. Selon le contrat de ville-hôte signé le 24 juillet, jour de l’attribution des Jeux, la France dispose de six mois, soit jusqu’au 24 décembre, pour valider un comité d’organisation. En théorie, puisque l’affaire pourrait être repoussée, selon plusieurs sources concordantes, «vers la fin janvier».