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Investigations

Paris 2024 : perquisitions au siège du Comité d’organisation et dans des agences d’événementiel chargées des cérémonies d’ouverture

JO Paris 2024dossier
Des enquêteurs de l’Oclciff ont perquisitionné mercredi 19 octobre les locaux du comité d’organisation et ceux des sociétés Double 2, Ubibene, Obo et Paname 24 en charge des cérémonies d’ouverture, dans le cadre d’une nouvelle enquête menée au Parquet national financier (PNF).
L'entrée du siège du Cojo à Saint-Denis, le 20 juin 2023. (Julien De Rosa /AFP)
publié le 19 octobre 2023 à 17h50
(mis à jour le 19 octobre 2023 à 17h50)

Nouvelle secousse pour Paris 2024, qui vacille à neuf mois des Jeux. Le comité d’organisation des olympiades parisiennes et des agences d’événementiel chargées des cérémonies d’ouverture du rendez-vous planétaire l’été prochain ont été perquisitionnés mercredi dans le cadre d’une nouvelle enquête menée au Parquet national financier (PNF), selon plusieurs sources proches du dossier.

D’après ces sources, le Cojo et les sociétés Double 2, Ubibene, Obo et Paname 24 ont reçu la visite des limiers de l’Office central de lutte contre la corruption et les infractions financières et fiscales (l’Oclciff). Paris 2024 confirme auprès de Libération que le PNF s’est présenté à son siège ce mercredi, «et a obtenu l’ensemble des informations qu’il demandait. Paris 2024 collabore pleinement à l’enquête comme il l’a toujours fait».

«Aucune garde à vue n’a eu lieu», précise une autre source judiciaire, selon laquelle «ces opérations interviennent dans le cadre d’une enquête préliminaire dirigée par le PNF des chefs de prise illégale d’intérêt, favoritisme et recel concernant plusieurs marchés liés au JO 2024, ouverte postérieurement aux perquisitions du 20 juin 2023», date à laquelle plusieurs sites, dont le comité d’organisation, avaient déjà été perquisitionnés dans le cadre d’autres enquêtes ouvertes par le PNF.

Le relais de la flamme aussi visé par l’enquête

Ces premières opérations avant l’été avaient été menées dans le cadre de deux autres enquêtes également dirigées par le PNF et portant aussi sur des soupçons de favoritisme et de détournement de fonds publics lors de l’attribution de marchés par le Cojo et la Solideo, l’établissement responsable de la construction des ouvrages olympiques. Dans ces deux procédures, les enquêteurs s’intéressent à une vingtaine de contrats potentiellement litigieux, selon une source proche de l’enquête.

Mais cette fois, comme le confirme l’une des sources proches du dossier, la nouvelle procédure vise notamment l’emblématique cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques minutieusement programmée le 26 juillet 2024 sur la Seine, ainsi que celle des Jeux paralympiques le 28 août sur le bas de l’avenue des Champs-Elysées et place de la Concorde. En effet, les sociétés Double 2, Ubi Bene et Obo font partie du quintet d’agences de production événementielle françaises réunies sous le pavillon de Paname 2024 et chargées de ces cérémonies d’ouverture.

Inédite sur un fleuve et hors stade, la cérémonie du 26 juillet est un défi organisationnel et sécuritaire, et son aspect artistique est ultra-confidentiel. Des centaines de milliers de spectateurs sur place mais aussi 1,5 milliard de téléspectateurs sont attendus, a rappelé mi-septembre à la presse Thierry Reboul, directeur des cérémonies du Cojo. Selon la source proche du dossier, plusieurs autres marchés sont également visés par cette enquête, dont celui d’un autre événement emblématique, le relais de la flamme olympique.

«La frontière entre l’endogamie et le conflit d’intérêts est au centre des enquêtes»

Dans un article de décembre 2022, le média en ligne Mediapart avait souligné le risque de conflits d’intérêts de Thierry Reboul, depuis 2018 directeur exécutif des cérémonies, des événements et de la marque Paris 2024 et chef d’orchestre de cet ambitieux projet. Il dirigeait auparavant la société d’événementiel Ubi Bene, fondée en 2000, avant de rejoindre le Cojo.

A l’époque, sur CB News, l’homme avait affirmé qu’on lui avait proposé de «mettre de côté (sa) plus grande aventure pour une autre peut-être plus belle encore, celle des jeux à Paris». «Je ne pouvais pas dire non», avait-il alors justifié, annonçant avoir vendu ses parts de la société d’événementiel. Ubi Bene s’est ensuite associée aux autres agences d’événementiel pour former ce consortium Paname 24, chargé d’organiser les cérémonies d’ouverture. «L’organisation de grands événements sportifs, c’est un petit univers. La frontière entre l’endogamie et le conflit d’intérêts est au centre des enquêtes et dépend de l’appréciation», relevait récemment une source proche du dossier.

Outre ces procédures, le PNF enquête aussi depuis septembre pour vérifier les accusations de favoritisme à l’encontre du directeur général délégué du Cojo, Michaël Aloïsio, après la plainte d’un ex-salarié, Sébastien Chesbeuf, dénonçant du favoritisme et du trafic d’influence dans l’attribution d’un marché public avec la région Paca. Le parquet financier a également ouvert en juillet une procédure pour vérifier les conditions dans lesquelles un ancien inspecteur de Bercy aurait loué des chalets familiaux dans les Alpes à la Solideo, qu’il était chargé de contrôler.