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Les éclairs qui ont zébré le ciel parisien au soir du 1er mai et les déluges d’eau qui ont suivi auraient pu constituer un parfait crash test. Mais l’orage a éclaté trop tôt. Dommage car un épisode météo «comme celui qui a frappé la capitale hier soir aurait pu être absorbé dans sa totalité par le bassin», trompette Tony Estanguet. Aux côtés du président du Comité d’organisation des JO, la maire de Paris, la ministre des Sports, le préfet d’Ile-de-France ou encore le maire du XIIIe arrondissement ont inauguré ce jeudi 2 mai le «bassin d’orage» d’Austerlitz, pièce maîtresse du dispositif censé rendre la Seine propre à la baignade dès le mois de juillet pour les compétitions olympiques de triathlon et de nage libre. A leurs pieds, une dalle circulaire de 50 mètres de diamètre a remplacé l’ancien square Marie-Curie devant l’entrée de l’hôpital de la Pitié Salpêtrière. En dessous, une cathédrale de béton brut qui pourra accueillir jusqu’à 50 000 m³ d’eau – l’équivalent de 20 piscines olympiques – en cas de fortes intempéries.
Bâtie en quarante-deux mois pour un budget final d’environ 100 millions d’euros, cette infrastructure porte sur ses immenses piliers de 35 mètres la responsabilité d’une promesse un peu folle : «réaliser les épreuves aquatiques de 2024 au pied de la Tour Eiffel et rendre la Seine baignable dès 2025», rappelle Anne Hidalgo, la maire de Paris. Le bassin d’Austerlitz agira comme réservoir de sécurité en cas de fortes intempéries qui, jusque-là, viennent saturer le réseau unitaire des égouts parisiens avant de se déverser sans traitement dans la Seine avec leurs bactéries, nocives pour la santé des nageurs.
Une cathédrale de béton
Captées par un tunnel intercepteur, ces eaux usées seront désormais redirigées et stockées vers cette immense cuve avant d’être progressivement redistribuées dans les stations d’épuration de région parisienne via les égouts de Paris. En moyenne, le bassin devrait permettre de faire tomber de douze à deux le nombre de rejets d’eaux usées sans traitement dans la Seine chaque année. Cette cathédrale de béton, qui sera mise en service «entre mi et fin mai» après de derniers tests, reste un «point de passage fondamental pour aborder avec sérénité les compétitions de cet été», insiste Estanguet devant les inquiétudes formulées par certains compétiteurs sur les eaux de la Seine.
Selon l’ONG environnementale Surfrider Foundation, la qualité de l’eau entre septembre 2023 et mars dernier était «au-dessus voire très largement au-dessus» des seuils recommandés pour la baignade. Mais, entre le bassin d’Austerlitz et les autres infrastructures construites ou rénovées pour assainir l’eau de la Seine, le patron de Paris 2024 redit sans crainte qu’il a pris «rendez-vous cet été, ou même avant, pour goûter l’eau».
Hommage à un chef de chantier décédé
Plus que le concept d’un tel bassin de rétention d’eau, l’insertion urbaine d’une structure aussi massive a été un défi «d’ingénierie et de technicité en génie civil», appuie Samuel Colin-Canivez, responsable des grands travaux du réseau d’assainissement parisien. Car l’ouvrage a dû être construit à 30 mètres de profondeur entre un hôpital du XVIIe siècle, une gare ferroviaire, un RER et une ligne de métro aérienne.
«Je suis très fier de tous les compagnons et ouvriers qui ont travaillé d’arrache-pied pour rendre ce chantier dans les temps», glisse l’ingénieur qui mentionne le nom d’Amara Dioumassy. Ce chef de chantier de 51 ans a perdu la vie sur le chantier en juin 2023, percuté par un camion qui faisait marche arrière. Anne Hidalgo a fait respecter une minute de silence en son honneur avant le début de la cérémonie et le nom d’Amara Dioumassy, qui a été inhumé au Mali, a été inscrit sur la plaque inaugurale.
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Si l’urgence est aux JO, chaque orateur dérive vers «l’héritage» que ce bassin va représenter pour les Parisiens, dans le cadre d’un «plan baignade» – 1,4 milliard d’euros d’investissement – qui doit permettre à monsieur Tout-le-Monde de barboter dans la Seine dès 2025. Un «rêve de gosse» pour la maire de Paris, qui a confirmé qu’elle piquerait une tête dans le fleuve à la fin du printemps. Grâce à un système de drapeaux pour autoriser ou non la baignade en fonction de la qualité de l’eau, Samuel Colin-Canivez voudrait que la capitale fonctionne comme une ville côtière. En cas d’intempéries trop fortes, il sera interdit de plonger. «Quelque part, c’est toujours la nature qui nous gouverne», dit-il dans un sourire. Paris Plage ne deviendra pas Paris Piscine.