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Paris 2024

«Je ne vais pas me plaindre de tout ça parce que je l’ai cherché» : huit mois après les JO, Léon Marchand raconte comment sa vie a basculé

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Le nageur, quadruple médaillé d’or cet été, raconte à «l’Equipe» et au «Parisien» la difficulté à gérer sa notoriété nouvelle et à se remotiver après les Jeux olympiques de Paris 2024.
Léon Marchand le 31 juillet 2024 après son titre olympique à Paris sur le 200m brasse. (Denis Allard/Libération)
publié le 12 avril 2025 à 11h29
(mis à jour le 15 avril 2025 à 9h54)

Voilà plusieurs mois qu’il avait disparu des radars. Depuis ses Jeux olympiques légendaires cet été, les plus prolifiques de l’histoire du sport français (quatre médailles d’or et une de bronze), Léon Marchand s’était fait discret. On l’avait vu faire un passage dans l’émission Clique de Mouloud Achour, un autre sur le canapé du youtubeur Squeezie et sur le plateau de Quotidien, mais depuis, c’était silence radio. Ce samedi 12 avril, Léon Marchand est réapparu en une de l’Equipe, assis dans les gradins du centre de natation d’Austin au Texas, où il s’entraîne depuis mai 2024, casquette NY vissée sur la tête.

Dans une longue interview accordée au quotidien sportif, le quadruple champion olympique est revenu sur les mois qui ont suivi son été fou. Et sur son nouveau statut parfois trop lourd à porter, même pour ses larges épaules. «J’ai connu différents épisodes depuis les Jeux de Paris, ça a été un sacré remue-ménage, dit-il. J’ai pris la tempête ! Une tempête médiatique, populaire… C’était vraiment énorme pour un adolescent de 22 ans.»

Léon Marchand dit avoir «profité au maximum» de ce «moment particulier». Le nageur s’est habitué à être soudainement reconnu dans la rue, à ne plus pouvoir sortir au restaurant sans qu’on l’arrête pour lui demander un autographe, une photo, ou simplement pour le féliciter pour ses performances. Mais cette notoriété, l’athlète s’imaginait qu’elle ne durerait que quelques semaines. Que la «hype», comme il dit, «allait redescendre rapidement».

Huit mois après les JO, le Français ne peut pourtant toujours pas se balader incognito. Dans une autre interview au Parisien ce lundi, il raconte également sa surprise : «J’aurais pourtant dû savoir ce qui allait se passer avec quatre médailles d’or ! Mais en tant que nageur, on n’a pas l’habitude. Les gens ne connaissent pas la natation. Ils regardent les Jeux olympiques et voient de la natation, c’est tout. J’étais préparé à une popularité temporaire mais je n’ai pas fait les choses à moitié à Paris…»

Une coupure en Australie «pour disparaître»

Après des semaines à s’entraîner chez lui, à Toulouse, une tournée fructueuse en Asie dans le cadre du circuit de Coupe du monde de petit bassin à l’automne et des Mondiaux pour lesquels il a dû déclarer forfait en décembre, Léon Marchand est parti s’exiler en Australie «pour disparaître». Non qu’il ait vécu la situation en France comme un calvaire, mais répondre aux sollicitations était «énergivore», explique-t-il à l’Equipe : «Je donne aux gens, et c’est un échange qui m’apporte une énorme satisfaction. Mais je ne peux pas faire ça au quotidien. Ça devient trop difficile de travailler dans l’eau…»

En Australie, où il est resté trois mois, Léon Marchand a pu retrouver l’anonymat. Il a travaillé sur sa nage (le crawl, notamment, qui n’est pas sa spécialité). Il en a aussi profité pour découvrir un pays qui l’attirait et pour surfer sur son temps libre. A des milliers de kilomètres de la France, le nageur a retrouvé la motivation après quelques semaines de doute, confie-t-il au quotidien sportif. Pendant les Jeux, «j’étais fier que la France puisse se passionner pour le sport. Mais, après, tu te demandes quelle va être la prochaine étape ? Je suis quatre fois champion olympique, mais je dois me lever le matin à 6 heures pour aller m’entraîner. Pourquoi ? Au fond de moi, je savais que je n’allais pas m’arrêter, que c’était qu’une étape».

Fin mars, le Français a rejoint Austin où travaille Bob Bowman, son entraîneur. Son retour à la compétition doit avoir lieu en Floride dans trois semaines. Une première étape en vue de sa préparation pour les championnats du monde en grand bassin, cet été à Singapour. Léon Marchand dit désormais à l’Equipe aborder cette échéance motivé et avec de grandes ambitions : «J’ai faim, et j’ai envie de changer ma manière de fonctionner, d’aborder mes courses, ma stratégie. J’essaie d’évoluer chaque année, et encore plus après cet énorme chapitre des Jeux de Paris. Il faut écrire une nouvelle page.»

Pas question pour autant jure-t-il au Parisien, de prendre la grosse tête – «je sais que mes proches me le diront ou me le feront comprendre et j’ai confiance en eux». Malgré tout, le nageur doré raconte avoir vu que les comportements autour de lui changer. «Ce qui est bizarre, c’est que je n’ai pas l’impression d’avoir changé mais que tout le monde me voit différemment. Même des gens que je connaissais avant. Il y a très peu de personnes qui me disent non», dit-il. Léon Marchand s’attend à l’avenir à avoir plus de mal à faire «confiance» aux autres. «Mais je vais m’adapter. Je ne vais pas me plaindre de tout ça parce que je l’ai cherché», philosophe-t-il.

Mise à jour le 15 avril avec l’ajout de certaines déclarations faites au «Parisien».