Vers la fin de l’affaire ? Le porte-parole du tribunal de Mendoza (ouest) a déclaré ce vendredi que le parquet avait demandé un non-lieu pour Auradou et Jegou. «La défense a demandé le non-lieu devant le parquet, et le parquet soutient ce non-lieu et demande une audience auprès du juge», a déclaré Martin Ahumada. Le non-lieu sera examiné lors d’une audience à huis clos fixée au 18 octobre par le juge chargé du dossier, a-t-il précisé, et la décision devrait être mise en délibéré.
L’un des avocats argentins des deux jeunes rugbymen français, Me Rafael Cuneo Libarona, s’est déclaré «satisfait» de la position du parquet. Il estime que cette affaire doit «alerter sur les cas de dénonciations abusives contre des personnes innocentes». «Si dans mon cabinet nous défendons de nombreuses femmes qui sont agressées sexuellement, je crois cependant que le rôle de la justice était de protéger ces deux hommes face à ces fausses accusations», a-t-il ajouté. En France, Me Antoine Vey a salué «une décision en droite ligne avec l’ensemble des éléments qui ont été collectés, vérifiés et discutés tout au long de l’enquête». «Nous attendons sereinement la fin cette procédure», a ajouté l’avocat des deux joueurs dans une déclaration transmise à l’AFP.
Profils
La demande de non-lieu du parquet intervient après la validation fin septembre d’un dernier acte de procédure, un rapport d’expertises psychiatrique et psychologique de la plaignante réalisées par les experts mandatés par le parquet lui-même qui paraissait fragiliser la position de l’accusation. Il a révélé «une série d’inconsistances et de contradictions […] qui dessinent globalement un récit peu vraisemblable». Les deux praticiens co-auteurs de l’expertise notent «des contenus contradictoires et inconsistants au moment d’expliquer des situations auxquelles on la confronte». L’expertise met aussi à mal la spontanéité de la plaignante, relevant une «perméabilité à ce que disent les autres», un «récit ni libre ni spontané […] et teinté d’influences externes évidentes, notamment de son amie» avec qui elle avait eu peu après les faits une conversation «rieuse» par messages audios.
«L’accusation initiale a perdu de sa force»
Hugo Auradou et Oscar Jegou, tous deux âgés de 21 ans, sont toujours inculpés en Argentine de viol aggravé car commis en réunion pour des faits présumés survenus dans la nuit du 6 au 7 juillet dans une chambre d’hôtel de Mendoza, où ils venaient de remporter un match contre l’Argentine pour leur première sélection avec le XV de France. Les joueurs affirment depuis le début que les relations sexuelles avec la plaignante, rencontrée en boîte de nuit, étaient consenties. Et ils nient toute violence, alors que l’avocate de la plaignante a évoqué «une violence terrible», qui a vu sa cliente «sauvagement battue». D’abord détenus puis placés en résidence surveillée, ils ont été libérés mi-août, puis autorisés à quitter l’Argentine dans l’attente de la fin de l’instruction, le parquet estimant «que l’accusation initiale a perdu de sa force». Ils ont regagné la France le 4 septembre.
Hugo Auradou, fils de l’ancien international David Auradou, avait fait son retour au centre d’entraînement de Pau cinq jours plus tard et repris l’entraînement collectif mi-septembre. Le deuxième ligne de Pau va d’ailleurs retrouver les terrains de rugby samedi en Top 14 à Perpignan pour le compte de la 5e journée, presque trois mois jour pour jour après cette accusation de viol. «Le jour est venu de le mettre sur un terrain de rugby et ça sera demain (samedi)», a annoncé vendredi le manager de la Section paloise, Sébastien Piqueronies. «Il démarrera la rencontre», a-t-il précisé en conférence de presse d’avant-match. «Rien ne l’interdit de jouer au rugby, il est présumé innocent. Aujourd’hui il convient à ceux qui le défendent et à la direction du club d’assumer la cohérence comme ils l’ont fait depuis le début.» Oscar Jegou, lui, a repris l’entraînement la semaine dernière avec La Rochelle, où il évolue au poste de troisième ligne, mais aucune date n’a pour l’instant été évoquée publiquement pour son retour à la compétition. Sollicitée, Me Céline Astolfe, avocate d’Oscar Jegou et du Stade rochelais, n’a pas «souhaité commenter».
La plaignante a pour sa part exposé jeudi devant une commission législative son sentiment de droits «bafoués» par la justice, après avoir demandé en vain, par le biais de ses avocats, la récusation des deux procureurs chargés de l’enquête. Son expertise psychologique n’exclut aucunement qu’elle «puisse connaître un mal-être émotionnel, vivant ce qui s’est passé comme traumatique», relèvent les deux experts. Néanmoins «au sens strict», elle «ne présente pas de symptômes cliniques de stress post-traumatique causé par ce qu’elle dénonce».
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