Menu
Libération
Rugby

Champions Cup : Toulouse remporte la finale au bout des prolongations face au Leinster

Accrochée jusqu’aux prolongations, la finale 2024 de la Champions Cup installe un peu plus le club occitan, vainqueur du Leinster, 31-22, ce samedi 25 mai à Londres, dans les hautes sphères du rugby mondial.
Matthis Lebel lors de son essai. (Glyn Kirk/AFP)
publié le 25 mai 2024 à 18h30
(mis à jour le 25 mai 2024 à 20h34)

Sans chercher le moins du monde à minimiser le mérite de La Rochelle, qui, en 2022 et 2023, a si brillamment joué les trouble-fêtes, nul n’aurait su vraiment contester à l’affiche Stade Toulousain-Leinster, le statut de choc des titans. De fait, cadrait-on ainsi, en ce samedi 25 mai de gala XXL (cf les verdicts cannois et finale PSG-Lyon de foot), une finale de la Champions Cup (ex-Coupe d’Europe aux appellations diverses et variées – de même que le règlement change à peu près tous les ans, jusqu’à l’intégration cocasse des équipes sud africaines depuis 2022) correspondant à ce qui se fait de mieux à l’échelle… planétaire. Sachant qu’une dizaine de nationalités différentes constellaient la feuille de match d’une rencontre diffusée dans 150 pays.

Au coup d’envoi, les deux équipes totalisaient ainsi seize finales, le club français en ayant déjà remporté cinq quand, avec «seulement» quatre trophées soulevés, la province irlandaise, qui sortait de deux échecs consécutifs face à La Rochelle précisément, escomptait égaliser le record en venant à bout d’un meilleur ennemi qu’elle avait plutôt dominé ces dernières saisons. Mais il faudra éplucher les dicos, pour trouver comment on traduit «bisque bisque rage» en gaélique, puisque ça ne sera pas encore pour cette fois, le verdict étant tombé au bout du bout d’un suspense prolongé de deux fois dix minutes qui, compensant la qualité du spectacle stricto sensu, verra en définitive les rouges broder une sixième étoile sur le maillot quand, les bleus, eux, perdaient d’un rien, avec neuf points d’écart, 31-22, leur quatrième finale consécutive.

Partie cadenassée

D’autres stats à donner le tournis, on aurait pu en enfiler encore un certain nombre, concernant les Antoine Dupont, Dan Sheehan ou Cian Healy, entre autres stars d’un casting éminemment rutilant, mais comme dirait l’autre, entre autres truismes ressassés, une finale, ça ne se joue pas, ça se gagne. Y compris sur la pelouse du Tottenham Hotspur Stadium, pourtant plus acclimatée au ballon rond qu’ovale, prise d’assaut par 61 000 aficionados. Aussi, pendant quatre-vingts minutes, les amateurs de grandes chevauchées pouvaient-ils maugréer en débinant une partie cadenassée qui voyait les défenses prendre le dessus (l’engagement gargantuesque du troisième ligne anglais, Jack Willis, au top depuis qu’il a rejoint Toulouse en 2022), aucune des deux équipes ne rompant face aux assauts adverses (il est vrai parfois souillés par des erreurs techniques plus imputables à l’enjeu qu’au talent intrinsèque d’individualités fondues dans le collectif comme rarement).

Stratégique, fermée, ingrate, fébrile, (chiante ?), la rencontre refusait ainsi de se conclure à l’heure prévue, faute aussi de ce petit coup du sort qui aurait pu tout changer dans un camp (deux essais toulousains, au début et à la toute fin, refusés pour un bout de godasse qui effleure la ligne de touche), comme dans l’autre (une tentative de drop de Ciaran Frawley qui passe juste à gauche des perches à la 80e minute).

A 15-15, tout restait donc à faire, mais Toulouse avait pour lui le fameux adage du «jamais deux sans trois», ayant déjà vécu par le passé des finales ainsi prolongées (contre Cardiff en 1996 et le Stade Français en 2005) qui lui avaient souri. De fait, après avoir si longtemps compensé par la qualité de sa défense et de son jeu au sol, des difficultés récurrentes rencontrées en conquête, l’équipe d’Ugo Mola réussissait elle un premier et dernier break décisif en tirant en quelques secondes le meilleur parti d’une supériorité numérique à 15 contre 13 (un Irlandais exclu dix minutes et un deuxième en train de se faire soigner) pour permettre à l’ailier, Matthis Lebel, de plonger dans l’en but.

«Ça n’a pas été simple»

Avec un avantage de dix points on commençait à sortir les flûtes quand, soucieux de faire durer le plus masochiste des plaisirs, le deuxième ligne toulousain, Arnold, avait la riche idée de célébrer à sa façon le nombre de records de participation à une finale de Cian Healy en déblayant avec l’épaule contre la tête du vétéran irlandais. Un geste stupide qui heureusement pour Toulouse, à son tour en infériorité numérique pour les dix dernières minutes, allait se révéler d’autant moins préjudiciable que les guibolles de Thomas Ramos, remplaçant surprise au coup d’envoi rentré à la 59e minute, ne tremblaient pas au moment de passer deux dernières pénalités qui scellaient l’addition sur le score en trompe-l’œil de 31-22.

«Ça n’a pas été simple» a concédé François Cros au micro de France 2, maîtrisant ainsi un art consommé de la litote, en rappelant la notion de «solidarité» sans laquelle le rugby n’existerait tout simplement pas. Quand son compère, Matthis Lebel, lui, mentionnait ce «supplément d’âme» dans lequel il veillait à englober non seulement l’ensemble du groupe, mais aussi tous les supporters, présents dans le stade, ou agglutinés à domicile sur la place du Capitole, pour qui la nuit s’annonce d’ores et déjà longue. Vainqueur de la toute première édition, en 1996, cela faisait trois ans que Toulouse n’avait plus remporté l’épreuve suprême du continent européen (élargi). Autant dire un bail, pour un club hors norme qui a bien mérité de s’accorder un ou deux jours de répit, avant de rêver tout haut d’un vingt-troisième bouclier de Brennus (il caracole actuellement en tête de la «saison régulière» du Top 14), dans un mois à Marseille.