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Coupe du monde à 24 pays et création de plusieurs nouvelles compétitions : World Rugby acte la refonte de l’ovalie

Coupe du monde de rugby 2023 en Francedossier
Concomitamment à un élargissement du Mondial, World Rugby officialise mardi 24 octobre la création d’une compétition «semi-fermée» qui regroupera les dix meilleures nations et deux invitées. Au détriment des pays inférieurs, regroupés dans un deuxième championnat et sans garantie de rallier les quarts en Coupe du monde.
La Coupe du monde de rugby mettra en compétition 24 sélections nationales plutôt que 20 dès sa prochaine édition. (Paul Childs /Reuters)
publié le 24 octobre 2023 à 17h05

La planète rugby acte sa révolution. Sûrement la plus importante que le sport ait connue depuis sa professionnalisation en 1995. Ce mardi 24 octobre, en pleine dernière ligne droite de Coupe du monde et à l’issue d’une réunion dense et animée à Paris, les différents membres de World Rugby, l’instance organisatrice du rugby mondial, se sont mis d’accord autour de plusieurs grandes réformes dans un futur très proche.

Depuis 2003 et jusqu’à aujourd’hui, les vingt sélections qualifiées pour la Coupe du monde étaient réparties en quatre groupes de cinq équipes et les deux premiers de chaque poule accédaient directement aux quarts de finale. Lors du prochain Mondial, en 2027 en Australie, il n’y aura plus 20 mais 24 nations de représentées, qui seront réparties en six groupes de quatre avec des huitièmes de finale. La compétition sera réduite à six semaines, «tout en promouvant un rythme qui donne de l’élan à la phase de poules et en respectant le même nombre minimum de jours de repos (cinq) entre les matches» que lors du Mondial en France, détaille l’instance.

Autre grande nouveauté : les consortiums du Six Nations Rugby et de la South Africa New Zealand Australia and Argentina Rugby (SANZAAR), organisation détentrice des droits des grandes compétitions de clubs et de nations de l’hémisphère sud, viennent de finaliser les ultimes détails préalables à la création d’une nouvelle ligue mondiale. Bisannuelle, lancée dès 2026 pour combler le vide entre chaque Coupe du monde sans empiéter sur les tournées des Lions britanniques, elle remplacera les traditionnelles tournées d’été et d’automne au cours desquelles se tenaient de simples test-matchs (matchs amicaux) entre sélections.

Les fédérations adhérentes se sont dit oui sur l’instauration de deux divisions : les participants de la Division 1, la «Nations Cup» seront les équipes du Tournoi des six nations (Angleterre, Ecosse, France, pays de Galles, Irlande et Italie), et les quatre du Rugby Championship (Afrique du Sud, Argentine, Australie et Nouvelle-Zélande), plus deux sélections supplémentaires choisies sur invitation. En l’occurrence, il s’agirait des Fidji et du Japon respectivement 10e et 12e du classement.

En parallèle, un second échelon nommé «Challenger Series» a été créé. Cette division 2 ramasserait les pays classés entre la 13e et le 24e rang mondial. Dans le détail, cela concerne le Portugal, la Géorgie, les Samoa, les Tonga, l’Uruguay, les Etats-Unis, l’Espagne, la Roumanie, la Namibie, le Chili, le Canada et Hong Kong. Exception faite des Etats-Unis et Hong Kong, toutes ces nations étaient qualifiées pour le Mondial en France. Les rencontres, six par pays, auront lieu lors des fenêtres de juillet dans l’hémisphère Sud et de novembre dans l’hémisphère Nord et donneraient lieu à une finale fin novembre.

Risques d’augmenter l’écart entre nations fortes et faibles

L’objectif derrière ce second championnat étant, à terme, d’instituer un système de promotion-relégation à partir de 2030. Autrement dit : d’ici là, cette nouvelle proposition ne risque pas de réduire l’écart de niveau abyssal entre les meilleures nations de la planète et les plus faibles. Un éternel refrain scandé à l’unisson par tous les suiveurs de l’ovalie après chaque phase de poules de Coupe du monde, où l’on retrouve très souvent les mêmes qualifiés en quarts (et la Coupe du monde à 24 ne devrait pas bousculer cet état de fait), après un début de compétition dénué de tout suspense et marqué par bon nombre de raclées. Ce qui fut encore le cas en France cette année.

«Cela signifie que les équipes du Top 12 vont jouer entre elles de manière régulière, avec les avantages de performances et de sponsoring allant avec, faisait observer Peter Harding directeur général de la Fédération des Tonga il y a dix jours lorsqu’on l’interrogeait sur le sujet. Les équipes du deuxième échelon joueront les unes contre les autres et n’auront pas souvent l’occasion d’affronter celles du meilleur niveau.» D’autant que les accessions en D1 telles qu’imaginées pour l’instant seront cher payées : les deux premières équipes des «Challenger Series» devront encore passer par un barrage contre les deux moins bonnes de la «Nations Cup» avant de prétendre l’intégrer. Un système calqué sur ce qui se fait entre le Top 14 et la Pro D2.

Ces réticences formulées notamment par les pays des échelons inférieurs expliquent pourquoi l’accord a mis du temps avant d’être signé, alors que cette compétition était en discussion depuis un moment. Les tractations en marge de la Coupe du monde en France, rendez-vous idéal pour que tout le monde se voie, ont en outre permis d’achever les ultimes détails commerciaux, financiers et sportifs du projet.

Calendriers surchargés à harmoniser

Un autre tournoi, annuel, entériné par World Rugby sera par ailleurs lancé en 2024 : la Pacific Nations Cup, sorte de Six Nations opposant les pays de seconde zone du Pacifique, à savoir les Fidji, le Japon, les Samoa, les Tonga, le Canada et les États-Unis. Le tournoi se jouera en août et septembre, et comprendra deux poules de trois équipes : l’une regroupera l’Amérique du Nord et le Japon, l’autre mettra aux prises les îles du Pacifique. Avant des phases finales qu’accueilleront à tour de rôle le Japon et les Etats-Unis.

Enfin, il y a l’autre gros morceau qui anime encore à ce jour les discussions internes : l’harmonisation des calendriers des hémisphères nord et sud. Pour faire tenir cette nouvelle formule au sein d’un agenda rugbystique déjà (sur) chargé, une première disposition entérinée ce mardi matin va allonger la trêve automnale de trois à quatre semaines, et réduire la durée des Six Nations de sept à six semaines. De quoi réduire au maximum les fameux «doublons», ces périodes au cours desquelles les écuries de top 14 par exemple, doivent composer sans certains de leurs cadres, partis renforcer les sélections.

«Dans sa globalité, le texte initial imposait même sept doublons supplémentaires. Cela signifiait quasiment la mort de la LNR (Ligue Nationale de Rugby), ce que nous ne voulions pas, précise ce mardi le président de la FFR Florian Grill auprès de Midi Olympique. C’est là-dessus, entre autres, qu’ont porté les négociations hier (lundi) jusqu’à tard le soir et encore ce matin. Nous voulions des ajustements au texte, nous les avons obtenus. Nous avons donc donné notre feu vert ce mardi à 8 heures.»

Les discussions à venir porteront notamment sur un affinage de ces calendriers. Parmi les pistes évoquées pour optimiser les saisons : décaler le Six Nations de fin février à début avril ; idem pour le Rugby Championship (le pendant de l’hémisphère sud avec l’Argentine, l’Afrique du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande), actuellement programmé d’août à septembre, qui pourrait être déplacé de plusieurs mois pour se dérouler en même temps que la compétition européenne.