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Libération
«Latins blessés»

Coupe du monde de rugby : avant d’affronter les Bleus, la Nazionale d’Italie au plus mal

Coupe du monde de rugby 2023 en Francedossier
Le XV de France affronte ce vendredi une équipe d’Italie lourdement défaite par la Nouvelle-Zélande. Malgré le rapport de force évident, les Français surjouent la prudence.
Le XV de France à l'entraînement à l'OL Stadium, à Lyon, le 4 octobre 2023. (Anne-Christine Poujoulat/AFP)
publié le 6 octobre 2023 à 6h25

Quelle Italie défiera le XV de France, ce vendredi 6 octobre, à l’OL Stadium de Lyon, temple du football rhodanien aujourd’hui réduit en charpie (dans l’acception masculine du mot naufrage) ? Celle qui vient de subir une des plus grandes humiliations de son histoire (17-96), face à la Nouvelle-Zélande, alors qu’elle commençait à se fantasmer en poil à gratter d’une aventure qui risque fort de n’être bientôt plus la sienne ? Ou celle qui, début février, à domicile, donnait quelques frayeurs au XV de France dans le cadre du dernier Tournoi des six nations, ne perdant que 24-29 après avoir même dilapidé une balle de match dans le money time ?

Parions sur ni l’une ni l’autre. Mais peut être juste une équipe à la fois soucieuse de ne pas revivre à une semaine d’intervalle le même cauchemar, sans avoir pour autant les moyens de décrocher la lune. Car, pour dire les choses sans trop de ménagement, quand l’Italie était allée gagner d’un point à Cardiff, face au Pays de Galles, en mars 2022, cela mettait un terme à une série de 36 défaites consécutives dans le Tournoi des six nations (la précédente perf remontant à 2015, contre l’Ecosse). Une embellie suivie… d’une nouvelle cuillère de bois lors de l’édition 2023, soldée par autant de défaites que de matchs (cinq).

«Un match où ça va taper fort»

Alors oui, en admettant que, une fois digéré le départ à la retraite de l’immense Sergio Parisse, la Nazionale a pu retrouver le sourire en acclamant les folles envolées à l’aile d’Ange Capuozzo, ou la fiabilité de son ouvreur Paolo Garbisi – deux jeunes pépites du rugby… français, qui jouent respectivement à Toulouse et à Montpellier –, l’hypothèse de contredire les oracles n’en demeure pas moins infime. D’autant que le sélectionneur néo-zélandais de l’Italie, Kieran Crowley, a dû se résigner à les changer de poste, l’un passant à l’arrière et l’autre au centre, après une avalanche de défections (Tommaso Menoncello, Edoardo Padovani, Danilo Fischetti, Giacomo Nicotera…), dans un groupe qui ne dispose déjà pas d’un banc capable de faire la différence à l’approche du dénouement.

«Ce sont des Latins […], des Latins blessés», a pointé le sélectionneur tricolore, Fabien Galthié, qu’on a connu plus inspiré voire lyrique, ajoutant «ils ont tout à gagner» comme principal argument censé contrecarrer cet excès de confiance pourtant matraqué par les chiffres. Comme celui-ci : dans le bilan actuel des France-Italie, les Bleus totalisent 94 % de victoires – ratio le plus élevé contre une équipe affrontée au moins cinq fois. Ou celui-là : la France a remporté ses 17 derniers matchs sur ses terres, un record, sans jamais avoir été menée à la mi-temps depuis maintenant cinq ans et demi.

Donc, oui, hormis les précautions d’usage, énoncées mécaniquement («Un match où ça va taper fort», dixit Charles Ollivon, capitaine bien mieux que de substitution), ou sciemment amplifiées («Si on leur laisse le ballon trop facilement, c’est une équipe redoutable», Maxime Lucu), nul ne peut imaginer les Bleus quitter prématurément une épreuve qu’ils n’ont jamais préparée avec autant d’atouts et de minutie. Tout au plus faudra-t-il veiller à ne pas se faire (trop) peur en cédant le moins possible à la facilité, donc à l’approximation, comme ce fut le cas face à l’Uruguay, à Lille, où quinze fautes avaient été sifflées contre les Bleus. Ou… face à l’Italie, en début d’année, quand, à Rome, l’arbitre les avait sanctionnés à 18 reprises !

«Débuter avec lui, c’est quelque chose de fort»

Vigilantes, les troupes de Galthié pourront surtout réviser leurs gammes en conditions réelles, l’ultime rencontre de la poule A présentant les caractéristiques officieuses d’un huitième de finale, où le vaincu n’aura plus que ses yeux pour pleurer. Avant de se projeter dans la seconde phase de la Coupe du monde, à élimination directe, avec un probable quart de finale contre l’Afrique du Sud dimanche 15 octobre. Si le pack (au sein duquel Grégory Alldritt effectuera son retour) présente de solides garanties, les regards se tourneront sans doute avec plus de curiosité du côté de la charnière, aussi «insolite» sous le maillot bleu, qu’elle coule de source en club (Bordeaux).

Bien devin qui, voici à peine deux mois – à savoir juste avant la blessure fatidique de Romain Ntamack – aurait prédit qu’aucun Toulousain ne serait présent à Lyon dans la cabine de pilotage, que vont donc squatter le demi de mêlée, Maxime Lucu, et l’ouvreur, Matthieu Jalibert. «Quand tu joues ou que tu t’entraînes tous les jours avec quelqu’un, tu apprends à le connaître. J’ai joué énormément de matchs avec Mathieu. On s’entend très bien, on passe du temps ensemble. Forcément, on joue dans le même club, donc des liens se créent. […] Débuter avec lui, c’est quelque chose de fort pour nous. C’est une opportunité et aussi une forme de tranquillité de le faire avec lui», a posément précisé le premier, dont, au rayon grigri, on veille à rappeler qu’il n’a jamais perdu avec les Bleus (et vice versa) en 17 sélections.

PS : tout un article dédié à l’équipe de France, sans aucune spéculation sur les conséquences d’une fracture maxillo-zygomatique, ça doit sembler étrange, non ? C’est peut-être aussi un peu reposant, le sujet devant de toute façon revenir sur le tapis dans un futur imminent.