La victoire à l’arraché des Springboks samedi a clos la 10e Coupe du monde de rugby de l’histoire, la deuxième organisée sur le sol français. Et si le XV de France n’a pas soulevé le trophée tant convoité, le reste demeure un succès à tous les étages, s’enorgueillissent les organisateurs. A neuf mois des Jeux olympiques de Paris, l’événement, certes de moindre envergure, faisait aussi office d’examen blanc pour les autorités, collectivités, transporteurs et autres services de sécurité avant les JO de l’été prochain. Sécurité, transports, retombées : Libé dresse le bilan extra-sportif durant ce mois et demi de compétition.
Sécurité
Au moment de tirer des conclusions ce dimanche 29 octobre à Saint-Denis, où il s’est adonné à une revue des troupes mobilisées, Gérald Darmanin s’est félicité de la bonne tenue du dispositif en place. Le ministre de l’Intérieur a applaudi ses «bleus en dehors du terrain», qui ont «gagné ce match de la sécurité», avec «des rencontres à très grands enjeux qui se sont passées dans de très bonnes conditions» malgré la «menace terroriste très forte» et le passage en niveau de vigilance «urgence attentat» en cours de tournoi. Il faut dire que le ministre de l’Intérieur avait mis le paquet : entre «5 100» policiers et gendarmes déployés les jours de match et jusqu’à «7 500 effectifs» lors des rencontres à enjeux.
Début septembre, Darmanin évoquait un «niveau maximal» de sécurité et une mobilisation «sans précédent» de l’appareil sécuritaire. «En deux mois, il y a eu 4 880 opérations antidélinquance, soit plus de 80 par jour, qui ont donné lieu à 781 interpellations», a-t-il détaillé dimanche. Plus de 100 000 enquêtes administratives ont été menées, écartant des stades plus de 800 personnes «qui connaissaient soit des antécédents judiciaires soit des risques de radicalisation». Jovial, le ministre de l’Intérieur a continué à filer la métaphore rugbystique en guise de projection : «Nous avons marqué un essai. Il faut maintenant transformer l’essai, c’est les JO.» Le défi sera tout autre.
Gestion des flux
C’est peu dire qu’un an après le fiasco de la finale de la Ligue des champions entre le Real Madrid et Liverpool au Stade de France, les autorités étaient attendues sur ce versant. Pari plutôt réussi, exceptés deux, trois couacs lors du premier week-end de compétition notamment. Des soucis techniques au niveau des portiques de contrôle des billets ont occasionné des difficultés dans l’acheminement des flux de supporteurs qui arrivaient au Vélodrome pour assister au match Angleterre-Argentine. A dix minutes du début du match, des centaines de personnes n’avaient pas encore franchi les tourniquets, qui précédaient les contrôles de palpations par les agents de sécurité. Passé le coup d’envoi, ils étaient encore plusieurs dizaines à devoir patienter. «Dans un tournoi de cette envergure, on rencontre forcément à un moment ou un autre des difficultés, ce serait complètement irresponsable de dire qu’on savait tous que ça se passerait parfaitement bien», admet auprès de Libé Michel Poussau, directeur exécutif du tournoi pour World Rugby. «A chaque fois, ça a été réglé tout de suite», se défend-il, pointant l’effort «de planification en amont».
Transports
Dans certaines villes hôtes comme à Lille, aucune grosse faille logistique à signaler de la part des élus locaux ou du public dans l’acheminement des spectateurs, malgré les fortes hausses de voyageurs recensés par le réseau de transports en commun Ilévia (jusqu’à 20 000 supporteurs les soirs de matchs). D’autres ont dû composer avec quelques accrocs. A Bordeaux, des aficionados roumains et irlandais ont connu de gros problèmes pour rentrer en temps et en heure au Matmut Atlantique le 9 septembre, la voilure des transports en commun n’ayant pas été suffisamment adaptée à un tel afflux de personnes. A Nantes, même constat : le service de tramways a vite été débordé par les vagues de supporteurs en période de pointe. L’adjoint aux sports de la ville et vice-président de Nantes Métropole, Ali Rebouh, a déploré «une utilisation du tram-train surévaluée» par les organisateurs. L’antenne locale d’Actu.fr précise en outre que la gratuité des transports le week-end «n’a pas été comprise par les supporteurs étrangers qui achetaient tout de même des tickets».
Retombées
C’était l’un des objectifs affichés par World Rugby et le comité d’organisation français : mettre sur pied l’édition la plus rentable de l’histoire. Selon les chiffres prévisionnels communiqués par les organisateurs à Libé, le pari est en passe d’être gagné. L’instance internationale va générer entre 400 et 450 millions d’euros de recettes, tandis que le comité d’organisation français chiffre les bénéfices autour de 40 millions d’euros. Des rentrées d’argent conformes aux ultimes prévisions. Le gros des revenus a été généré par les «hospitalités» (les places haut de gamme) et les tickets qui ont tous trouvé preneurs, excepté les centaines de sièges vides lors des demi-finales. Certaines critiques se sont élevées à propos des prix jugés trop hauts de certains menus et boissons dans les stands gérés par France 2023. Michel Poussau se dit «surpris du commentaire parce qu’au contraire, on a beaucoup de retours extrêmement positifs de nos fans». Ce qui n’a pas empêché les spectateurs d’écumer les stocks de bière, qui a plus que jamais coulé à flots. A titre d’exemple, 137 000 pintes ont été consommées lors d’Irlande-Ecosse selon Midi olympique. Un record au Stade de France.