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Libération
Tournoi des 6 nations

Le XV de France rossé par l’Irlande : pour ces Bleus-là, «il en manquait beaucoup»

Sonnés par leur lourde défaite à Marseille en ouverture du Tournoi des 6 nations, les Bleus peinaient vendredi soir à trouver des éléments d’explication.
Paul Boudehent à la fin du match au Stade Vélodrome à Marseille, le 2 février 2024. (Clément Mahoudeau/AFP)
publié le 3 février 2024 à 9h39

Or donc, le XV de France débute l’année 2024 comme il avait terminé 2023 : la tête dans le seau. Et ça n’est pas exactement sous cet angle qu’on nous avait vendu le scénario. A moins qu’on ait mal lu. Prématurément débarqués de la Coupe du monde cet automne, les Bleus viennent en effet d’entamer le Tournoi des 6 nations de la pire des manières. A savoir, une défaite à domicile face à l’Irlande. Cinq ans qu’ils n’avaient pas vécu un tel couac dès la première journée. Et par couac, il faut également entendre le deuxième plus grand écart de points – défavorable, s’entend – depuis qu’ils participent à l’épreuve (allez, on enfonce la lame encore un peu plus profond : c’est-à-dire en 1910 !). On pourrait encore ajouter d’autres données chiffrées, pour finir de noircir le tableau, mais à quoi bon ?

Juste s’en tenir à l’idée morose qu’on a peut-être voulu voir ces Bleus-là plus beaux qu’ils n’étaient et que, si elle n’est pas vite démentie, la déconvenue va virer à l’amertume. Car, du «pastis» marseillais de ce France-Irlande du 2 février 2024, on a retenu une définition, certes moins courue que l’illustre apéro anisé, mais bien réelle, telle qu’on peut aussi la lire dans n’importe quel dico : une «situation embarrassante, compliquée».

«On va essayer de comprendre»

Battue à plate couture, 17-38, la France a encaissé cinq essais (offrant de la sorte à l’Irlande le point supplémentaire du bonus offensif). Symbole – et, en partie, cause – de la déroute, elle a aussi dû jouer à quatorze dès la 32e minute, après que le deuxième ligne Paul Willemse (dont on avait jugé préjudiciable l’absence, pour cause de blessure, lors de la Coupe du monde) s’est fait expulser à la suite d’un deuxième carton jaune reçu (et de toute façon converti en rouge) pour une faute identique à la première : un contact à l’épaule contre une tête adverse. La mission devenait impossible, seule la fin de la première période et le début de la seconde laissant entrevoir un sentiment de révolte qui allait, en définitive, se fracasser contre la robustesse adverse.

Confronté à la sévérité du score, Fabien Galthié, le sélectionneur, n’a eu d’autre choix que celui de concéder «un moment dur», avec «un lot de charges négatives», qu’il peinait sur le coup à décortiquer, préférant botter en touche d’un : «On va essayer de comprendre dès lundi.» Non moins abasourdis, les rares joueurs ayant consenti à balayer devant la porte du vestiaire ont certes tâché de prendre des gants, mais sans minimiser pour autant une déconvenue dont il est encore un peu tôt, effectivement, pour mesurer les conséquences.

Les regards vers l’Ecosse

François Cros, le troisième ligne aile du Stade toulousain : «A chaud, cette défaite est compliquée à analyser. Ils ont démarré fort et nous avons été pris dans l’engagement dès le début. Or, après avoir eu du mal à démarrer ce match, nous ne sommes pas parvenus à recoller au score, ce qui aurait pu permettre d’inverser la pression. Sans parvenir à se libérer, il ne nous a pas été possible de vraiment mettre en place notre système de jeu et nous nous sommes recroquevillés sur nous-mêmes. On dit que le haut niveau se joue parfois à pas grand-chose, mais là, il en manquait beaucoup. Prendre 40 points [en réalité, trente-huit, ndlr] à la maison, ça fait mal.»

Paul Gabrillagues, le deuxième ligne du Stade Français, qui aurait eu deux raisons de se réjouir, en fêtant son retour en équipe de France quatre ans et demi après sa dernière apparition en bleu, et en ayant inscrit le deuxième et dernier essai tricolore, juste avant d’être remplacé, à la 53e minute : «Dans le sport, comme dans la vie, il faut rester positif, regarder devant. On n’a pas le choix, on ne va pas s’apitoyer sur notre sort. Il va falloir être solidaire, c’est important. Si chacun s’éparpille, ça sera compliqué.» Sur ces entrefaites, on apercevait en arrière-plan Paul Willemse traverser la salle de presse en direction du bus, sans un regard pour ses partenaires sacrifiant aux obligations du rituel médiatique d’après match, tous, veillant naturellement à ne pas l’accabler.

Le prochain adversaire de la France dans le Tournoi sera l’Ecosse - qui, elle, commence l’épreuve contre le Pays de Galles, à Cardiff, ce samedi 3 février. Huit jours vont séparer le rendez-vous raté de Marseille de celui de Murrayfield. «Nous n’avons pas de temps à perdre», observe François Cros. Difficile de le contredire.