La dernière fois, c’était par une douce soirée d’automne, à Lyon. 60-7, huit essais à un, une victoire écrasante de la France face à l’Italie, venait alors valider la qualification pour les quarts de finale de la Coupe du monde, dans une allégresse dont on se refusait à imaginer que neuf jours plus tard, elle eût pu enfanter la plus amère des désillusions.
Changement de décor, ce dimanche 25 février 2024, plus au Nord, dans un stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq, à la lisière de Lille, avec un toit fermé (malgré une grisaille pourtant bien inoffensive) confirmant que les éclosions du printemps ne sont pas pour aujourd’hui, mais peut être pour demain, qui sait ?
Allait-on en effet prendre les mêmes et recommencer, en conclusion d’une troisième journée du Tournoi des six nations, marquée par le sans faute de l’Irlande (troisième victoire de suite à cinq points, contre Galles cette fois), et un spectaculaire succès écossais face à l‘Angleterre ? Après un début de Coupe du monde illusoire, l’Italie, éliminée en poule, a réenclenché son cycle ordinaire de défaites, souvent apparentées à des branlées. Quant à la France, malgré un discours de façade qui ne trompe personne (Grégory Alldritt, capitaine absent, quelques jours avant la rencontre nordiste, dans l’Equipe : «Je ne vois pas un groupe qui doute»), naguère si sereine, elle se retrouve à tâtonner, en quête de nouveaux repères. Que l’Italie, en visiteur courtois, se devait donc de lui fournir, à son corps défendant.
Une Petite Culotte («c’était Loli /C’était Lolo /C’était Lola», un des hymnes pondéreux de l’ovalie, mollement repris par l’assistance en train de remplir les travées) avant une grande déculottée infligée à une Squadra Azzura si pâle qu’elle jouait en blanc ? Eh bien non. Pas vraiment. Et le pire, c’est qu’à 13-13, match qu’il sera pléonastiquement trop facile – et pourtant si tristement juste – de qualifier de nul, la France s’en sort à nouveau miraculeusement, ne devant son salut, en l’occurrence que des plus relatifs, à une pénalité italienne écrasée sur la poteau après la fin du temps réglementaire, après que Paolo Garbisi a dû s’y reprendre à deux fois pour la taper dans l’urgence, suite à un ballon malencontreusement tombé du tee.
Incroyable brouillon
La première mi-temps fut incroyablement brouillonne, avec une domination tricolore vite écrasante (c’est le cas de le dire, vu le poids du pack) des avants néanmoins annulée par le manque d’inspiration des arrières commettant un festival de maladresses. Avec un essai inscrit rapidement par Charles Ollivon, on pouvait néanmoins imaginer, fut-ce sur un malentendu, que la brume provoquée par un feu d’artifice aussi liminaire qu’intempestif tiré avant le coup d’envoi allait se dissiper assez rapidement. Or ce fut l’inverse : fébriles, imprécis (à la main, comme au pied), ces Bleus-là ne devaient s’en prendre qu’à eux-mêmes de ne pas avoir définitivement scellé le match à la pause. Pis, minés par le manque de confiance, ils perdaient même dans le dernier mouvement, Jonathan Danty, à nouveau sorti dans le Tournoi pour dix minutes, puis définitivement, après verdict du bunker (ce qui, fait, après celui de Paul Willemse, le deuxième carton rouge en trois matches pour la France !), permettant mêmes à l’Italie, qui n’avait guère que son abnégation à opposer, de ne pas lâcher le score. A 10-3, rien n’était fait. La deuxième mi-temps voyait même le jeu s’équilibrer, avec une Italie ralentissant intelligemment le jeu dans les rucks, comme s’autorisant certaines hardiesses, à la faveur d’une supériorité numérique qui, à l’inverse, menaçait de plus en plus les Bleus (qui avaient perdu Matthieu Jalibert, jusqu’alors mauvais, sur blessure, à la 35ème minute) d’un naufrage officiel, en définitive évité in extremis.
Avant ce France-Italie nordiste, moche et honteux au possible, les Bleus comptabilisaient 45 victoires, contre trois défaites face à leurs adversaires du jour (qui, rappelons le, sortaient d’un 36-0 encaissé en Irlande !). Ce nul est donc une première. Depuis 2007, le vainqueur du match repart aussi avec le trophée Giuseppe Garibaldi, que, du coup, les nations vont se partager cette année, a annoncé une voix féminine dans la sono du stade. Qui s’était déjà vidé quand les deux capitaines sont venus expédier les formalités d’usage.