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Crunch

Tournoi des six nations : le XV de France en rouste pour la gloire

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Etincelants de bout en bout, les Bleus infligent au XV de la Rose le plus cinglant revers de son histoire à Twickenham (10-53), gardant ainsi espoir de remporter l’édition 2023 du Tournoi, si l’Irlande perd en Ecosse dimanche.
Thomas Ramos poursuivi par Freddie Steward, ce samedi à Londres. (Adrian Dennis/AFP)
publié le 11 mars 2023 à 19h31
(mis à jour le 11 mars 2023 à 21h24)

«Un vrai test, une énorme opportunité de se jauger physiquement […] On tâchera de rivaliser», avait bien tenté d’entonner à J-1 le (presque nouveau) sélectionneur anglais, Steve Borthwick, plutôt profil bas néanmoins. De fait, si, au coup d’envoi d’Angleterre-France, les deux nations affichaient le même nombre de points au classement (10), à l’aube de la quatrième journée du Tournoi des six nations, l’équilibre des forces semblait nettement plus douteux, entre, d’une part, des visiteurs qui, malgré une nette défaite en Irlande (32-19) lors de la deuxième journée, affichent depuis plus d’un an et demi un bilan largement positif et, d’autre part, des locaux qui, eux, n’en finissent plus de douter après une défaite liminaire, à domicile face à l’Ecosse et, d’une manière générale, un niveau de jeu inquiétant, car nettement en deçà du standing supposé de la seule nation européenne qui, rappelons-le, a été un jour de 2003 sacrée championne du monde.

Mais, nul ne l’ignore, conformément à la dimension folklorique soigneusement entretenue au fil des siècles, le «Crunch» garde une saveur particulière qui, chaque année, voit s’opposer sur un grand rectangle verdoyant la France et l’Angleterre, mêmement motivés par une rivalité aussi fratricide qu’immémoriale. Aussi devait-on se méfier de la bête blessée qui, en définitive, est pourtant partie néanmoins à l’abattoir : 53-10 pour les Bleus. Du jamais vu, si l’on considère l’écart et, au moins tout autant, la manière. Au point, sans doute, de donner des idées de seppuku au sein du XV de la Rose, sans épine et si fané qu’il n’a pas fini de se demander quelle tornade a bien pu souffler ce samedi 11 mars sur Twickenham. Car certes, quand bien même les Bleus partaient (légèrement) favoris, nul n’aurait pu prédire l’abyssale différence de niveau qui, en étant magnanime, aura prévalu soixante-quinze minutes durant – seule l’entame de deuxième mi-temps laissant planer l’illusion d’un équilibrage des forces qui, en réalité, ne surviendra jamais.

Maraboutée d’entrée de jeu par un XV de France aussi intransigeant en défense qu’inspiré en attaque (les sept essais font foi, à commencer par le premier, magistral, au bout de deux minutes !), – et enfin performant dans ce jeu au sol où il s’emmêlait les pinceaux depuis plusieurs semaines –, l’Angleterre a donc coulé à pic et l’on ose imaginer le traitement que la presse britannique va réserver aux Farrell, Cole, Itoje ou Sinckler, ex-terreurs transformées en zombies, quand le XV tricolore, lui, marchait sur l’eau, parfaitement imperméable à la pluie londonienne qui n’a même pas gâché la fête. Gloire, donc, aux Thibaud Flament (la révélation tricolore du Tournoi), Grégory Alldritt, Jonathan Danty, Thomas Ramos ou Charles Ollivon, prouvant une détermination à défendre jusqu’au bout leurs chances de remporter la compétition… Quand bien même c’est l’Irlande, actuellement en tête, qui a son destin en main, avant d’aller défier l’Ecosse, ce dimanche à Murrayfield… puis de recevoir l’Angleterre.

Un «moment difficile» pour les Anglais

Au coup de sifflet final, Antoine Dupont, capitaine des Bleus, avait de son propre aveu «un peu de mal à réaliser». Fabien Galthié, moins, le sélectionneur peinant à retenir ses larmes d’émotion devant les caméras de France 2, eu égard à la difficulté notoire de gagner dans un des stades les plus légendaires du rugby mondial. Toute la semaine durant, d’ailleurs, c’est l’année 2005 qui était mentionnée, puisque correspondant à la dernière victoire tricolore in situ, dans le cadre du Tournoi. Dix-huit ans plus tard (ce qui ne fait jamais «que» huit matchs), la série de défaites prend donc fin, d’une manière si éclatante que la date revêt un caractère historique pour la France qui, si supérieure aux Anglais, n’aura même pas pu «féliciter» ses adversaires de la formule aussi fameuse que perfide, «Sorry, good game».

Au lieu de quoi, Galthié a juste eu une pensée, qu’on ne soupçonne même pas sarcastique, pour «cette équipe qui va vivre un moment difficile». Tandis que son groupe, lui, à condition de battre Galles dans une semaine, au Stade de France, aura a priori toutes les cartes en main pour préparer sereinement la Coupe du monde qui doit démarrer dans maintenant moins de six mois à Saint-Denis. Wonderful !