Si elle avait eu lieu en 2021, la confrontation entre les deux joueuses aurait tout eu d’un match classique. Une édition d’US Open plus tard, le deuxième tour opposant ce jeudi, à 17 heures, Victoria Azarenka et Marta Kostyuk, prend une tout autre épaisseur.
Sur le plan sportif, toutes les deux ont de quoi être satisfaites. Azarenka, ancienne numéro 1 mondiale bélarusse aujourd’hui classée 26e, triple finaliste à Flushing Meadows, a réussi son entrée en lice mardi, en venant à bout (6-1, 4-6, 6-2) de l’Américaine Ashlyn Krueger. Idem pour Marta Kostyuk (60e), jeune ukrainienne de 20 ans, victorieuse 7-6 (7/2), 6-4 aux dépens de l’Egyptienne Mayar Sherif (63e).
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Leur qualification respective les conduit à présent à jouer l’une contre l’autre, conformément au tirage au sort. Pas sûr que le public américain ait droit à une accolade entre les deux joueuses : la confrontation, qui risque de rafraîchir l’ambiance très chaleureuse des courts new-yorkais, s’inscrit dans un contexte très tendu entre joueuses et joueurs ukrainiens d’un côté, russes et bélarusses de l’autre, depuis six mois que dure le conflit en Ukraine.
Le Bélarus est un proche allié de la Russie. L’autocrate qui dirige le pays, Alexandre Loukachenko, a notamment permis à Moscou d’utiliser son territoire, limitrophe de l’Ukraine, pour lancer des frappes sur son voisin. Raison pour laquelle de nombreux joueurs ukrainiens souhaitent que les Russes et les Bélarusses soient interdits de compétition, conformément aux recommandations émises par le Comité international olympique.
C’est particulièrement le cas de Kostyuk, très véhémente sur la question. Quelques jours à peine après le début de la guerre, la jeune Ukrainienne publiait un communiqué dans lequel elle faisait part de sa «grande surprise» et son «mécontentement» face à l’absence de réaction de la WTA à l’égard ce qui se passe dans son pays : «Nous demandons à la WTA de condamner immédiatement le gouvernement russe, de retirer tous les tournois organisés en Russie et de contacter l’ITF [Fédération internationale de tennis] pour qu’elle fasse de même.»
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Or seuls les organisateurs de Wimbledon ont pris la décision d’ostraciser les joueurs bélarusses et russes cet été, contrairement aux autres majeurs et tournois des circuits ATP et WTA qui autorisent Daniil Medvedev, Aryna Sabalenka et consorts à jouer, toutefois sans mention de leur pays et sans drapeau.
Azarenka, sacrée à deux reprises à l’Open d’Australie, n’est pas la plus timorée lorsqu’il s’agit d’évoquer le conflit. Quand d’autres ne font aucun commentaire, elle avait déclaré en mars trouver «déchirant de voir combien de personnes innocentes ont été affectées et continuent de l’être par cette violence. J’ai toujours vu et vécu les Ukrainiens et les Bélarusses comme des gens amicaux et solidaires les uns des autres. Il est difficile d’être témoin de la séparation violente qui a lieu actuellement».
Pas de quoi lui attirer la sympathie de ses homologues ukrainiens. Le week-end dernier, Azarenka faisait initialement partie des stars devant prendre part à un tournoi d’exhibition organisé à la veille de l’US Open, dans le but de collecter des fonds pour l’Ukraine. Un événement caritatif, «Le tennis pour la paix», qui coïncidait avec les célébrations du jour de l’indépendance du pays. Mais Kostyuk, comme d’autres nombreux joueurs de son pays, s’était insurgée, entraînant le rétropédalage de la Fédération de tennis des Etats-Unis.
«Lorsque nous avons appris qu’il y aurait des représentants de la Russie ou du Bélarus à cet événement, j’ai immédiatement dit que je n’y participerai pas», a déclaré la jeune Ukrainienne de 20 ans. «Ne prenez jamais pour acquis l’impact d’un geste aimable», s’est alors contentée de réagir Azarenka. En amont de leur duel, Kostyuk n’a cette fois pas fait de commentaires sur le sujet, ni à propos d’un éventuel retrait du tournoi.