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Libération
Pistes de réformes

Violences sexistes et sexuelles, proposition de loi-cadre, réforme des organes dirigeants : ce qu’il faut retenir du rapport du Comité d’éthique dans le sport

L’ex-ministre des Sports Marie-George Buffet a remis ce jeudi 7 décembre une série de propositions au gouvernement, qui a annoncé plancher sur une loi sport après les JO. «Libé» fait la synthèse des principales mesures consignées dans le document.
Marie-George Buffet lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée Nationale, le 14 avril 2020. (Stephane Lemouton /AFP)
publié le 7 décembre 2023 à 19h42

Il doit contribuer à faire bouger le mouvement sportif français. Long d’une cinquantaine de pages et lourd de 37 propositions, le rapport ébauché par le «Comité d’éthique pour renforcer l’éthique et la vie démocratique dans le sport», coprésidé par Marie-George Buffet et l’ancien champion d’Europe du 400 m haies Stéphane Diagana, a été remis ce jeudi 7 décembre à la ministre des sports Amélie-Oudéa-Castéra.

Mis sur pied en mars, ce comité indépendant, composé de 12 personnalités du monde du sport, a mené une large consultation entre le début du mois d’avril et la fin du mois d’octobre. Près de 170 personnes ou structures ont été entendues au cours de près de 70 entretiens. Stéphane Diagana et l’ancienne ministre communiste des Sports (1997-2002) souhaitent que leurs travaux préfigurent «une loi-cadre» sur le sport, précédée d’une «grande consultation élargie des acteurs et des élus locaux du sport dès le début de l’année 2024» dans le cadre de la Grande cause nationale afin d’adopter certaines de ces mesures.

Requête entendue par Oudéa-Castéra : dans la foulée de la remise du rapport, cette dernière s’est dite «parfaitement à l’aise» avec 70 % des propositions, et a annoncé au cours d’une conférence de presse «une concertation» début 2024 suivie d’une loi «héritage» qui arrivera «au lendemain des JO».

Un milieu du sport mal outillé» face aux maux de la société

En présentant son rapport, Marie-George Buffet a rappelé que «le milieu du sport n’est pas déconnecté des maux de la société» mais qu’il était «mal outillé» pour répondre aux défis. Sur le volet des violences sexistes et sexuelles, qui secouent le monde du sport depuis les révélations en 2020 de la patineuse Sarah Abitbol violée par son entraîneur, le rapport préconise la mise en place d’une «agence spécifique», sous forme d’«autorité administrative indépendante». Cela permettrait de «poursuivre et prolonger l’action» de la cellule ministérielle «Signal sport» mise en place par l’ex-ministre Roxana Maracineanu et d’«assurer le traitement centralisé et unifié aux niveaux administratif et disciplinaire» de ces violences.

Ce point a fait l’objet d’échanges «nourris» au sein du comité qui a travaillé sur le rapport, et divise souvent le monde du sport. La ministre des Sports s’est dit en désaccord avec cette proposition. Elle entend privilégier la cellule «Signal Sport».

Le rôle des fédérations sportives, qui parfois n’ont rien fait et n’ont pas protégé des victimes, est remis en question, comme l’ont d’ailleurs montré récemment les auditions de certains présidents de fédérations devant une commission d’enquête à l’Assemblée. Devant ces mêmes députés, Marie-George Buffet avait qualifié le mouvement sportif d’«extrêmement fragilisé» notamment en raison de son «entre-soi».

Stéphane Diagana a estimé jeudi que ces auditions avaient démontré une «prise de conscience insuffisante des enjeux d’éthique» des acteurs du monde du sport. Afin de protéger les athlètes, le rapport recommande «un mécanisme de suspension conservatoire en cas de condamnation pénale d’un dirigeant ou d’une dirigeante de fédération à l’issue d’un examen par le comité d’éthique fédéral».

La «parité stricte dans tous les organes dirigeants» préconisée

Pour renforcer la démocratie au sein des fédérations, le texte préconise que les clubs puissent participer aux «élections» et «assemblées générales» de leur fédération ainsi qu’un mode de «scrutin proportionnel» pour l’élection des comités exécutifs.

Le rapport recommande aussi la «parité stricte dans tous les organes dirigeants» du mouvement sportif, Comité olympique français (CNOSF) compris, «ainsi que dans leurs commissions régaliennes». De même qu’il mentionne le renforcement de «la limitation maximale du nombre de mandats des présidents de fédérations, organes déconcentrés et des ligues professionnelles, en la portant strictement à trois mandats». Deux recommandations déjà mentionnées - mais pas encore appliquées par toutes les instances - dans la loi sport de 2022.

Afin de renforcer «l’indépendance des comités d’éthique fédéraux», les auteurs veulent notamment «des règles d’incompatibilité strictes» et souhaitent que ces comités puissent s’autosaisir. «Nombreux sont ceux qui manquent encore aujourd’hui d’indépendance et de compétences internes», relève le rapport. Et il prévoit que le CNOSF puisse se substituer «en cas de carence» à un comité d’éthique fédéral. Autant de points qui devraient être soulevés dans les mois à venir, dans la perspective de la loi-cadre en discussion pour 2024.