Mixité sociale

Alors que le sujet est quasiment passé aux oubliettes avec l’arrivée de Gabriel Attal à la tête du ministère de l’Education nationale, une étude de l’Institut des politiques publiques vient rappeler les effets positifs de la mixité sociale.

Pour lutter contre le séparatisme scolaire, des syndicats de l’enseignement soutiennent une proposition de loi qui propose de conditionner les subventions accordées aux établissements privés sous contrat à des critères de mixité sociale.

Tour d’horizon des trois dossiers sur lesquels le ministre de l’Education nationale, en poste depuis un an, a beaucoup promis pour un résultat jugé largement décevant.

Effacé derrière Emmanuel Macron, qui prend les devants sur les annonces en matière d’école et l’a désavoué sur la mixité sociale, le ministre, intellectuel venu de la gauche, fête sa première année au gouvernement isolé et mutique.

Depuis son arrivée il y a un an, le ministre de l’Education a tenté de mettre en branle des chantiers d’importance. Critiqué par les syndicats et isolé au sein du gouvernement, il justifie sa politique des «petits pas».

Attendu depuis des mois, le protocole d’accord avec le privé pour plus de mixité sociale, signé ce mercredi 17 mai entre l’enseignement catholique et le ministère de l’Education nationale, n’impose rien de contraignant. Une déception.

Pour la sociologue du CNRS Agnès Van Zanten, le ministre de l’Education nationale a très peu de marges de manœuvre sur un dossier sensible électoralement.

C’est en Bretagne que le privé recrute proportionnellement le plus d’élèves. Sans surprise, les familles favorisées sont les plus enclines à éviter le secteur public.

Alors que le ministre de l’Education comptait faire de ce sujet un marqueur de sa politique, il n’a communiqué ce jeudi 11 mai que sur deux éléments, en catimini, loin du plan espéré. La question du privé, cruciale, n’a pas été abordée.

Comme dans beaucoup de villes moyennes et pauvres, les établissements privés de Melun concentrent les élèves les plus favorisés, au détriment du public qui dénonce une concurrence déloyale.

Incitée à participer à l’effort de mixité, l’école privée se dit prête à en faire plus… à condition d’avoir davantage de financements. De quoi faire tousser les personnels éducatifs en manque de moyens et de reconnaissance.

Mis sous pression pour participer à l’effort de mixité sociale, le secrétaire général de l’enseignement catholique, Philippe Delorme, demande en échange une meilleure prise en charge de la cantine et des transports scolaires.

Le ministre de l’Education entend faire participer l’enseignement sous contrat à l’effort de mixité sociale à l’école, dont le plan est dévoilé ce jeudi. Mais Pap Ndiaye n’imposera rien à ces établissements pourtant abondés par l’Etat.

Alors que les établissements sous contrat sont financés aux trois quarts par de l’argent public, il est légitime que l’Etat leur demande d’ouvrir davantage leurs portes aux élèves les moins favorisés.

Depuis leur publication, les indices de position sociale sont utilisés par nombre de parents d’élèves pour réclamer une meilleure répartition des moyens, en particulier entre le public et le privé. Mais ces données ont aussi leurs limites.

Pap Ndiaye est attendu de pied ferme sur son plan mixité sociale. Car si certaines expérimentations ont plutôt bien fonctionné, elles ont aussi démontré qu’un pilotage national et des dispositifs d’accompagnement sont indispensables.

Le sénateur communiste des Hauts-de-Seine Pierre Ouzoulias vient de déposer une proposition de loi pour moduler les dotations aux établissements privés sous contrat en fonction de leur mixité sociale.

Une étude bat en brèche les idées reçues sur Paris : 48% des habitants vivent dans un quartier mixte, mêlant des revenus faibles, intermédiaires et élevés, et 21% dans un quartier ségrégué.

En deux ans, la ségrégation sociale a reculé de près de 40 % dans les lycées publics de la capitale, grâce à une réforme de la plateforme Affelnet.

L’Etat finance l’enseignement privé sous contrat à hauteur de 73 %, sans droit de regard sur son recrutement. «Libération» a sondé six spécialistes sur les pistes d’amélioration de ce système.

Si l’hétérogénéité sociale et scolaire est bénéfique pour les élèves les plus fragiles, elle ne pénalise pas pour autant les enfants de milieux favorisés malgré les idées reçues. Au contraire.

L’expérience menée depuis cinq ans dans deux collèges du XVIIIe arrondissement de Paris montre qu’on peut atteindre des résultats à force de travail et de persuasion.

Symbole des ghettos scolaires parisiens, cet établissement du nord de Paris a ressuscité grâce à une expérience volontariste de mixité sociale lancée en 2017.

Le ministre de l’Education nationale a annoncé jeudi un «éventail d’actions» pour limiter la ségrégation sociale dans les écoles. Des mesures efficaces – notamment une contribution du privé – seront-elles enfin prises ?

Les écoles et collèges privés sous contrat sélectionnent surtout des enfants venant de milieu social aisé, d’après les nouvelles données finalement communiquées par le ministère de l’Education.

Les chiffres sont affolants : les collègues ghettos comptent 60 % d’enfants d’ouvriers, de parents au chômage ou inactifs, alors qu’ils ne représentent que 37 % des élèves au niveau national.

Après le succès des expérimentations lancées en 2017, Najat Vallaud-Belkacem appelle à un sursaut collectif pour en finir sous trois ans avec la situation des 100 collèges les plus ségrégués de France.

Pour tenter de réduire la ségrégation scolaire, Paris expérimente depuis 2017 une nouvelle méthode d’entrée en sixième : les secteurs multi-collèges, réunissant des établissements proches avec des compositions sociales différentes.

Pour la sociologue, présidente du Conseil national de l’évaluation du système scolaire, durcir la carte scolaire ne suffira pas, il faut démontrer aux parents ce que leurs enfants ont à gagner à fréquenter une école mixte.