Hartlepool (Grande-Bretagne), envoyé spécial.
De part et d'autre de l'embouchure de la Tees se dressent des cratères de béton, des citernes et des cheminées d'usines. Rares sont les promeneurs dans ces landes marécageuses et ces friches industrielles enveloppées de brouillard et de fumées. Situé à l'écart des grands axes routiers et ferroviaires, dans le nord-est de l'Angleterre, ce port sur le déclin espérait attirer des touristes avec son musée naval et ses frégates anciennes restaurées à grands frais. Des vestiges des guerres napoléoniennes amarrées au Jackson Dock.
Cimetière. Mais le Caloosahatchee, arrivé hier des Etats-Unis après avoir été remorqué pendant un mois à travers l'Atlantique, risque fort de déparer sa collection de vieux gréements. Cet ex-pétrolier ravitailleur est le premier des treize bateaux poubelles de l'US Navy envoyés à la casse dans ce lieu déjà déshérité de Grande-Bretagne. Un second navire, le Canisteo, est attendu aujourd'hui. A Hartlepool, ces immenses épaves grisâtres, mangées par la rouille et pleines de substances dangereuses, ne sont pas les bienvenues. D'après un sondage, 90 % des habitants de la ville se déclarent hostiles à leur venue. Depuis des semaines, Barbara Crosbie organise la résistance avec l'organisation écologiste les Amis de la Terre : «On va devenir la décharge de l'Occident. C'est la dernière chose dont nous avons besoin.» La région possède déjà une centrale nucléaire, un site de déchets toxiques et un complexe pétrochimique.