Washington de notre correspondant
Pour faire la peau de Greenpeace, l'une de ses bêtes noires, l'administration Bush a fini par dénicher une arme secrète : une loi poussiéreuse, datant de 1872, interdisant d'escalader un bateau en mer. Ce texte «Code 18, Statute 2779» n'a jusque-là été invoqué qu'à deux reprises, la dernière fois en 1890. Son objet initial était d'empêcher les vendeurs d'alcool ou les prostituées d'attirer des marins en dehors de leurs bateaux... Si la justice admet qu'il s'applique aux activités de Greenpeace, l'organisation risque de perdre non seulement ses avantages fiscaux, mais aussi son indépendance : elle pourrait être contrainte d'avoir à rendre compte aux autorités, chaque mois, de ses activités. Les associations de défense des libertés publiques se mobilisent contre ce qu'elles considèrent comme une menace pour la liberté d'expression, et l'affaire prend un tour politique : l'ancien vice-président Al Gore a ainsi accusé la semaine dernière Bush de chercher à «étouffer les voix discordantes».
L'histoire a commencé par une journée assez ordinaire, pour Greenpeace. Le 12 avril 2002, une douzaine de militants avait abordé, au large de la Floride, l'APL Jade, qui transportait en contrebande une cargaison d'acajou d'Amazonie, protégé à la fois par la Cites (Convention sur le commerce des espèces menacées) et par un moratoire brésilien. Les militants avaient accroché une banderole sur le bateau («Bush, arrête les abattages illégaux»), s'étaient laissé arrê