Le Vatican a ses entrées à Washington. A l'instar de la doxa catholique, l'administration américaine pense que l'abstinence doit primer sur les préservatifs. «Le préservatif a été au coeur des campagnes de prévention ces dernières années, et je crois qu'on a juste besoin de jeter un coup d'oeil sur les taux de contamination dans le monde pour constater que cela n'a pas marché», a lâché hier à Berlin Randall Tobias, coordinateur américain de la lutte contre le sida. Une phrase en forme de bombe décochée en marge d'une rencontre de la Global Business Coalition, réseau de plus de 120 firmes mobilisé par la pandémie.
«C'est consternant et criminel d'oser sortir de tels propos, qui nous ramènent vingt ans en arrière», souffle Gaëlle Krikorian, d'Act Up, alors qu'un consensus existe aujourd'hui pour associer prévention (préservatif) et accès vital aux traitements. «C'est du dogmatisme pur, ajoute un responsable du Fonds mondial contre les pandémies. Le pire, c'est que ce n'est pas un lapsus...» Pour de nombreux activistes antisida, Tobias ne fait que mettre en musique l'Emergency Program, plan lancé par Bush en janvier 2003. D'un montant de 15 milliards de dollars sur cinq ans, ses crédits aux 14 pays sélectionnés sont notamment conditionnés à la mise en place de programmes vantant l'abstinence sexuelle avant le mariage. Parallèlement, pressé par son industrie pharmaceutique, Washington multiplie les pressions pour que les pays du Sud ne s'engouffrent pas dans la brèche des génériq