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Libération
Interview

«Les gardes aussi sont en voie d'extinction»

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publié le 18 septembre 2004 à 2h11

Jean-Pierre Jobogo Mirindi, 37 ans, travaille dans le parc national des Virunga au nord-est de la république démocratique du Congo (RDC) depuis 1988, d'abord comme garde puis comme chef de patrouille. Il vit dans le parc avec sa femme et ses trois enfants. Venu à Paris pour témoigner, il montre une photo prise en 1989 qui en dit long sur ses conditions de travail. Quatorze gardes, jeunes, posent devant l'objectif.

«Nous étions alors quatorze, nous ne sommes plus que trois aujourd'hui. Tous les autres ont été tués. On parle des animaux, mais les gardes aussi sont une espèce en voie d'extinction. Lundi, il y a dix jours, juste avant de prendre l'avion, j'ai appris la mort d'un autre collègue. Quand j'ai préparé mon intervention, je comptais 186 veuves de gardes depuis 1996. Aujourd'hui, nous en sommes à 189. Elles vivent toujours dans le parc, il faut les aider... Avant la guerre, les conditions étaient bonnes, l'Institut congolais pour la conservation de la nature (ICCN) était appuyé par le président de la République. Mobutu passait ses vacances dans les parcs... Le pays était une destination touristique.

Depuis 1990, les conditions se dégradent. Aujourd'hui, nous ne touchons plus de salaire du gouvernement. Nous avons la prime versée par le fonds des Nations unies mais c'est insuffisant : 30 dollars par mois pour risquer sa vie. Notre armement est inadapté : nous disposons de vieux Moser 52 tandis que les groupes armés braconniers possèdent des kalachnikovs et des M16. Nous pa