Cela a-t-il un sens d'établir, comme l'ONU l'a fait dans un rapport publié en novembre, des projections de la population mondiale jusqu'en... 2300 ? «Oui», estime François Héran, directeur de l'Institut national d'études démographiques (Ined), dans un texte publié aujourd'hui par la revue Population et Sociétés. Pas tant, selon lui, pour l'intérêt statistique, mais plutôt pour l'utilité pédagogique.
Si l'on en croit l'ONU, la population mondiale continuerait en effet de croître jusqu'en 2075 (avec un maximum historique à 9,2 milliards d'habitants) avant de se stabiliser, ou bien d'exploser ou d'imploser, selon que la fécondité se maintient au-dessus du niveau de remplacement des générations ou reste durablement en dessous. L'explosion (à 36,4 milliards d'habitants en 2300) ou l'implosion (à 2,3 milliards) apparaissant comme des perspectives terrifiantes, l'exercice de démographie-fiction peut permettre, selon François Héran, de montrer comment échapper aux scénarios catastrophes. Et faire de la «démographie-action».
Pourquoi avez-vous éprouvé le besoin de revenir sur le travail de l'ONU ?
Parce que je le trouve très audacieux. L'idée de se projeter sur trois siècles, cela paraît fou. Et la première réaction des démographes a d'ailleurs été négative. Pour eux, cela n'a pas de sens, on ne peut être sûr de rien à cet horizon. Toutefois, l'ONU a eu cette réaction assez intelligente d'inviter un panel de démographes à commenter son rapport. J'ai fait partie de ceux qui ont été solli