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Libération

Maternité à hauts risques au Sénégal

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publié le 15 juillet 2005 à 2h59

Kolda (Sénégal) envoyée spéciale

«Ici, toutes les conditions sont réunies pour que les femmes décèdent.» Gabrielle, sage-femme révoltée de Kolda, région enclavée à 700 km au sud-est de Dakar, regarde tristement en direction du discret cimetière musulman de Bamba Dinka. A peine visible parmi les broussailles jaunies par le soleil, Mamadou Diamanka pleure son épouse Fatoumata, morte quinze jours plus tôt après avoir donné naissance à des jumeaux. Un drame qui n'est pas un cas isolé dans ce village de 370 habitants et cette région de près de 900 000 âmes, l'une des plus pauvres du Sénégal.

Mariée depuis cinq ans, Fatoumata, 20 ans, a accouché comme beaucoup d'autres chez la matrone, dans une case quelconque. «J'étais tellement content de voir que j'avais des jumeaux que j'ai déchiré le boubou que je portais pour faire des pagnes à mes enfants», raconte Mamadou. Une joie de courte durée car, très vite, sa femme se sent mal. Pour la conduire chez l'infirmier, il enfourche son vélo, la met sur son porte-bagages et pédale une vingtaine de kilomètres. «Malheureusement, l'infirmier était en voyage», explique-t-il. Ou plutôt en tournée. Dans cette région, un infirmier soigne environ 15 000 habitants.

Retour au village, toujours à vélo. «Vous transportez votre femme malade et elle souffre plus que si elle marchait à pied», se lamente Mamadou. Impensable pour la jeune maman de se faire évacuer vers l'hôpital de Kolda. Trop sont mortes en s'y rendant à travers les routes cahoteuses en charr