Niger envoyée spéciale
A proximité d'un champ de mil prêt à être récolté, Ahmed coupe du bois, en sueur. Sa femme est assise en tailleur devant une marmite d'eau bouillante, un bébé au sein. Une dizaine d'enfants jouent autour de la grand-mère qui tisse une natte de paille. Dans cette concession de plusieurs cases où paissent des vaches bien grasses, aucun signe de détresse. Pourtant, cette famille d'agriculteurs-éleveurs touaregs n'a plus rien depuis six mois. Ils ont perdu leur maigre troupeau et quitté leur champ de 1 hectare, à 500 km au nord, près de Tahoua, pour s'installer dans la région de Maradi, à 30 km du Nigeria. Ils sont hébergés par un grand propriétaire qui détient une quarantaine d'hectares pour lesquels il embauche chaque année des manoeuvres qui, tel Ahmed, n'ont plus les ressources suffisantes pour cultiver leur parcelle.
Ahmed a ainsi gagé une partie de son terrain auprès d'un voisin, il y a sept ans, et ne l'a toujours pas récupéré. «Notre vrai problème, ce n'est pas la sécheresse ou les criquets, c'est l'accès à la terre ! s'exclame-t-il. Du coup, nous sommes trop pauvres pour acheter le mil. Cette année, le prix du sac (100 kg, ndlr) a triplé !» Paradoxe : son hôte est aussi un grand commerçant qui spécule sur le marché aux céréales.
«A Maradi, ce sont eux qui font et défont la vie économique. Ils profitent des déficits céréaliers entre le Niger et le Nigeria. Ils achètent des céréales pour plusieurs millions de CFA au moment de la récolte. Ils les stocke