Niger envoyée spéciale
«Il y a eu une exagération. Dans mon canton, une soixantaine de villages ont été déficitaires en céréales, mais on ne peut pour autant parler de famine. Nous ne sommes pas en 1974, lorsque les paysans pilaient des calebassiers pour s'alimenter.» El Hadj Oussoufou Maydabou, chef traditionnel du village de Dakoro, n'en doute pas : depuis quelques mois s'est développé au Niger un véritable marché autour du concept de famine, dans l'unique dessein de capter l'aide internationale. Il invite même ses visiteurs à discuter avec les villageois alentour, qui ne confirment pourtant pas son analyse. «J'ai perdu dix vaches, il me reste un veau et pas de quoi nourrir mes enfants. Alors, bien sûr, personne n'est mort dans ma famille, mais faut-il attendre la catastrophe pour réagir ?» s'interroge un chef de village. Crise alimentaire ou famine, l'Etat nigérien n'a toujours pas tranché depuis que le président Tandja a déclaré, sur les ondes de la BBC, qu'il n'y avait pas de famine au Niger.
Ambiguïté. «Admettre qu'il y a la famine, c'est dire que le pays est mal géré», analyse un opposant. Toutefois, la persistance de cette ambiguïté illustre aussi la complexité du phénomène. Il faut différencier la crise nutritionnelle structurelle qui touche chaque année les enfants en bas âge et la crise alimentaire conjoncturelle qui, cette année, a affecté les adultes. Aujourd'hui, la famine n'est pas spectaculaire à première vue. Hormis dans les centres de nutrition, les e